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De l'attentat à une traque sans relâche, retour sur les dernières heures de Chérif Chekatt

Retranché dans un quartier du sud de Strasbourg, qui l'a vu grandir, depuis son périple meurtrier sur le marché de Noël de la ville mardi, Chérif Chekatt a été tué par une patrouille de police jeudi soir, pris dans les mailles d'un dispositif exceptionnel.

L'appel à témoins lancé mercredi soir pour retrouver la trace de Chekatt paie pour les 720 membres des forces de l'ordre, dont 380 enquêteurs, lancés aux trousses de celui qui est devenu l'ennemi public numéro un. En quelques heures, ils reçoivent près de 800 appels sur le numéro mis en place. Parmi eux, deux attirent plus particulièrement leur attention. Un riverain a aperçu un homme correspondant au signalement de Chekatt dans un jardin du quartier où il a grandi et où il s'était réfugié mardi soir avant que l'on ne perde sa trace.

Selon une source proche de l'enquête, une femme a également indiqué avoir vu un homme correspondant au signalement du fugitif, qui franchissait une clôture et était blessé au bras. Or Chekatt a été atteint au bras par le tir d'une patrouille de l'opération Sentinelle mardi soir. Des traces de sang retrouvées sur le grillage et des images vidéo-surveillance de la ville lèvent les derniers doutes des enquêteurs. Il s'agit bien du fugitif.


Les fouilles méthodiques du Raid

En parallèle, les proches de Chekatt placés en garde à vue permettent aux enquêteurs d'identifier les lieux où il aurait pu trouver refuge. Au fil des heures, la police acquiert la conviction qu'il est encore caché quelque part à Neudorf. Dans l'après-midi, une importante opération est conduite dans le quartier par des hommes du Raid, l'unité d'élite de la police, armés jusqu'aux dents et protégés par des boucliers. Les riverains sont évacués ou confinés, comme les enfants de l'école de Schluthfeld dont Chérif Chekatt a été l'un des élèves.

Le Raid fouille méthodiquement maisons, caves et jardins. La police évoque une simple opération de "levées de doute" parmi d'autres, mais en réalité, l'étau se resserre un peu plus et la pression monte.

Dès 19H30, un hélicoptère équipé d'une caméra thermique commence à tournoyer au-dessus du quartier. Le secteur est quadrillé par tous les effectifs et les services de police disponibles, dont la brigade de recherche et d'intervention (BRI) et le Raid. Vendredi, l'enquête n'avait pas encore permis de déterminer précisément l'itinéraire de Chekatt dans le quartier du Neudorf, ni son ou ses points de chute pendant les 48 heures de la traque. Elle devra aussi déterminer s'il a bénéficié de complicités.


L'échange de tirs

C'est une simple patrouille, un équipage de trois agents de la brigade spécialisée de terrain (BST) qui aperçoit jeudi à 21H00 un homme dont le signalement semble correspondre à celui du fuyard, rue du Lazaret, au sud du Neudorf.

Chekatt repère le véhicule de police. Il fait mine de rentrer au numéro 74. Les policiers reprennent la rue à contre-sens et s'approchent de lui pour le contrôler. Ils s'aperçoivent que l'individu dont l'habillement correspond au signalement, ne parvient pas à entrer dans l'immeuble.

Chekatt fait volte-face, brandit un revolver datant de la fin du XIXe siècle et ouvre le feu. La portière arrière-gauche du véhicule est atteinte par un projectile. Deux agents répliquent et tirent à de nombreuses reprises.

L'homme de 29 ans s'écroule.

Les enquêteurs retrouvent sur lui un couteau et huit munitions de calibre 8mm dans la poche intérieure de sa parka. A côté du corps, un revolver - vraisemblablement l'arme utilisée pour l'attaque mortelle du marché de Noël - avec six munitions dont cinq percutées. Son décès est constaté à 21H05. Il est formellement identifié ensuite grâce à ses empreintes digitales.

Quelques minutes après l'annonce de sa mort, Chérif Chekatt est adoubé "soldat de l'Etat Islamique" par l'agence de propagande de l'organisation jihadiste EI, revendication "opportuniste", selon de nombreux analystes.  Rue du Lazaret, les habitants du quartier, rassemblés autour du périmètre de sécurité établi par la police, applaudissent les forces de l'ordre présentes sur place. "Bravo !", lancent certains d'entre eux.

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