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Derrière le pass vaccinal, nouveau repêchage pour une mesure psychiatrique trois fois retoquée

Le projet de loi transformant le pass sanitaire en pass vaccinal, examiné à l'Assemblée à partir de mercredi, comporte également un article encadrant l'isolement et la contention des malades psychiatriques, objet de trois censures du Conseil constitutionnel en 18 mois.

Le Covid n'est pas la seule urgence. Pris en défaut sur une mesure portant atteinte à la liberté individuelle, le gouvernement n'a plus le droit à l'erreur, face à un risque imminent de vide juridique.

A l'origine était un amendement déposé en mars 2015 par une quarantaine de députés de l'ex-majorité socialiste - dont l'actuel ministre de la Santé Olivier Véran - dans la loi "de modernisation de notre système de santé" portée par Marisol Touraine et promulguée en janvier 2016.

Puisant ses motivations dans "les principes des Nations unies" et les recommandations du Conseil de l'Europe ainsi que du Défenseur des droits, le texte affirmait que "le placement en chambre d'isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours" ne pouvant relever que de la "décision d'un psychiatre, prise pour une durée limitée".

Hélas, le législateur avait omis de préciser ladite durée. Saisis en mars 2020 d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), les Sages de la rue Montpensier n'ont pas manqué de soulever cette lacune pour justifier, en juin de la même année, leur première censure, assortie d'un "effet différé" au 31 décembre pour se prémunir de "conséquences manifestement excessives".

Un délai mis à profit par le gouvernement pour fixer, dans le budget de la Sécurité sociale pour 2021, "une durée maximale" de 48 heures pour l'isolement et de 24 heures pour la contention, conformément aux recommandations de la Haute autorité de santé.

Mais le Conseil constitutionnel, à nouveau saisi d'une QPC en avril 2021, constate que "le législateur n'a, de nouveau, pas prévu (...) l'intervention systématique du juge judiciaire" et censure une deuxième fois la réforme en juin, encore avec "effet différé" au 31 décembre.

Qu'à cela ne tienne, le gouvernement revoit encore sa copie et intègre la disposition dûment modifiée dans le budget de la Sécu pour 2022. La mesure est pourtant retoquée une troisième fois car considérée comme un "cavalier social" n'ayant pas sa place dans un texte budgétaire.

Les Sages n'ont "pas censuré sur le fond mais sur la forme", a relevé M. Véran mercredi devant la commission des Lois de l'Assemblée nationale, soulignant que "cette disposition est indispensable pour offrir un cadre juridique solide et stable à ces situations si particulières" et que "les professionnels de la santé mentale et de la psychiatrie" sont "très en attente".

Ce dernier revirement contraint toutefois l'exécutif à agir vite, car la date butoir reste inchangée. Le texte retoqué est donc repris à la virgule prêt dans le nouveau projet de loi, avec la bénédiction du Conseil d'Etat qui n'y a décelé "aucun obstacle d'ordre constitutionnel ou conventionnel".

Selon l'étude d'impact, la mesure "s'appliquera dès le lendemain de la publication de la loi", en même temps que le pass vaccinal dont l'entrée en vigueur est envisagée "à compter du 15 janvier".

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