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Grand Orient: un "appel de la fraternité" contre l'extrême droite et "les intégrismes religieux"

Les "frères" et "soeurs" du Grand Orient de France (GODF) lancent samedi un "appel de la fraternité": une réponse à la montée de l'extrême droite et des "intégrismes religieux" qui mettent "en danger" la République, explique le grand maître de la principale obédience maçonnique.

"La fraternité, c'est un peu notre ADN", explique dans un entretien à l'AFP Philippe Foussier, le dirigeant du GODF, sous la devise maçonnique et républicaine "Liberté, Egalité, Fraternité" qui orne le grand temple du siège de l'obédience, rue Cadet dans le IXe arrondissement de Paris.

C'est ici que le grand maître lancera samedi un "appel de la fraternité" dans l'espoir de "restaurer l'universalisme républicain, qui seul libère l'individu et garantit l'égalité des droits". Parmi les premiers signataires: la Licra (Ligue contre le racisme et l'antisémitisme), l'association de lutte contre l'homophobie Le Refuge, l'essayiste Caroline Fourest...

"Beaucoup d'autres que nous incarnent la fraternité: l'idée est de les rassembler autour d'un texte", explique Philippe Foussier.

La principale obédience maçonnique française revendique 53.000 membres - dont près de 3.500 femmes, accueillies depuis 2010 - répartis dans 1.300 loges parmi les quelque 160.000 à 180.000 maçons de France, qui défendent une société plus humaniste au travers de rites initiatiques et symboliques.

Trois siècles après la naissance de la franc-maçonnerie en 1717 à Londres, le GODF affiche une "hausse continue" de ses effectifs, assure Philippe Foussier.

Mais le grand maître sonne l'alerte sur l'état de la société, qui "est bien mal en point". La faute à "tous ceux qui veulent encore dresser des murs et des barrières, opposer les uns aux autres, à raison de leurs origines ou convictions".

"Entre l'extrême droite d'un côté et les intégrismes religieux de l'autre, entre ceux qui veulent la +préférence nationale+ et ceux qui pensent que les personnes extérieures à leur communauté sont des +mécréants+, ça ne fait que monter en permanence", accuse le grand maître du GODF, évoquant une "tenaille identitaire".

Son "appel" anticipe le 70e anniversaire en décembre de la Déclaration universelle des droits de l'Homme (DUDH), qui postule dans son article 1er que les êtres humains "doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité".

"Nous estimons que la DUDH, dans sa conception universaliste des droits, vient rejoindre ce qu'a toujours porté la franc-maçonnerie: abattre les séparations entre les hommes ou, comme nous disons nous francs-maçons, +abolir les catégories du monde profane+", fait valoir Philippe Foussier.

"Dans nos loges se rassemblent des gens dont il nous est indifférent de savoir ce qu'ils sont censés représenter: il n'y a pas de patrons, d'ouvriers, de noirs, de blancs, de riches, de pauvres, de militants de gauche ou de droite, on rassemble tout le monde - à part les intégristes religieux et l'extrême droite", soutient-il.

- "Air du temps concordataire" -

En France, c'est par un regard vigilant sur la laïcité que le Grand Orient entend construire "une même communauté de destins".

"La laïcité est en recul et elle n'est pas suffisamment défendue et promue par nos dirigeants. Depuis plusieurs décennies déjà, ce n'est pas nouveau", dit-il comme en réponse aux articles de presse décrivant un "bras de fer" entre le président Emmanuel Macron et le GODF.

"Nous sommes dans un air du temps concordataire", estime-t-il en déplorant les "flatteries permanentes" de l'exécutif à l'égard des cultes, comme au temps du concordat ayant précédé la séparation (1905) des Eglises et de l'Etat.

"Le coeur de notre combat pour la laïcité, c'est la séparation entre le spirituel et le temporel, ce n'est pas la négation du spirituel. Au contraire: dans nos temples, nous sommes là pour révérer la vie spirituelle! Et ça peut passer par la foi religieuse", remarque-t-il.

En citant le cas du père Pascal Vesin, "frère" du Grand Orient démis de ses fonctions de prêtre du diocèse d'Annecy en 2013. "Il a malheureusement perdu son ministère car sa hiérarchie estime qu'il y a incompatibilité, mais il est toujours dans nos rangs", observe Philippe Foussier en rappelant le combat du GODF pour une "liberté absolue de conscience".

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