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Immigration: Macron tente de déminer le débat parlementaire

Ne pas accueillir "tout le monde", pour "accueillir bien": Emmanuel Macron a cherché mercredi à déminer le débat sur l'immigration prévu la semaine prochaine au Parlement, se posant en défenseur d'un équilibre entre accueil et fermeté sur ce sujet abrasif jusque dans la majorité.

Dans un entretien à Europe 1 enregistré à New York, où il participe à l'Assemblée générale de l'ONU, le chef de l'Etat plaide pour un débat "apaisé" qui ne soit pas "simpliste", souhaitant un "vrai +en même temps+ sur la politique migratoire aussi", entre humanité et efficacité.

Ainsi de l'Aide médicale d'Etat (AME) aux immigrés sans papiers, qu'il souhaite voir "évaluée", mais pas supprimée, pour lutter contre certains "excès" probables.

Neuf jours après avoir lancé le débat devant les parlementaires de la majorité en appelant à regarder "en face" le sujet de l'immigration, Emmanuel Macron estime que "la France ne peut pas accueillir tout le monde si elle veut accueillir bien".

"Pour continuer à accueillir tout le monde dignement on ne doit pas être un pays trop attractif", fait encore valoir le chef de l'Etat à quelques jours des débats, sans vote, à l'Assemblée (30 septembre) et au Sénat (2 octobre), durant lesquels le Premier ministre notamment s'exprimera.

Admettant un "échec" sur les reconduites à la frontière, il décline les quatre axes d'une politique migratoire qui deviendrait "opportunité économique": donner l'asile "le plus rapidement possible à ceux qui ont besoin de notre protection", les "intégrer beaucoup plus efficacement", "traiter et protéger tous ceux qui sont sur notre territoire", et "reconduire beaucoup plus efficacement les personnes qui n'ont pas vocation à (y) rester parce qu'elles y sont entrées illégalement".

Persuadé que la présidentielle de 2022 se jouera sur les sujets régaliens et qu'il se retrouvera de nouveau confronté à la présidente du Rassemblement national Marine Le Pen, Emmanuel Macron s'empare de ce thème un an après la promulgation de la loi "asile et immigration", qui avait fait tanguer la majorité tout en étant jugée trop timide à droite.

- "Pas de surdité" -

"Bla bla bla... Il y a 30 ans, Rocard nous disait que nous ne pouvions accueillir toute la misère du monde... Regardez le résultat !", a tweeté mercredi la présidente du Rassemblement national Marine Le Pen.

Le président LR du Sénat Gérard Larcher a appelé à "parler de manière apaisée mais en vérité", et "le faire avec nos valeurs", tout en critiquant le bilan en forme d'"échec" d'Emmanuel Macron.

A gauche, Boris Vallaud, porte-parole des députés PS, estime que la France doit "accueillir plus, et mieux", et critique la "forme d'instrumentalisation" du sujet par le président de la République.

"On peut parler mieux que Marine Le Pen sur ces sujets-là", estime en revanche un membre du gouvernement. "On veut montrer qu'il n'y a pas de surdité, de myopie par rapport à ces problèmes-là. (...) La réalité, à travers l'immigration et les demandes d'asile, c'est l'ajout de la précarité à la précarité" qui peut dans certaines situations devenir "insupportable à un territoire", justifie-t-il.

"On ne peut pas ne pas en parler. C'est ce qu'a fait Hollande pendant cinq ans", abonde un autre ministre. "Et le vrai risque c'est qu'on ne soit que dans de l'eau tiède alors que ce sujet peut devenir à tout moment bouillonnant", insiste cette même source.

Pour étayer les débats, dont on ne sait pas s'ils déboucheront sur de nouvelles mesures, Matignon prépare un document de synthèse - selon une source gouvernementale: "un power point très +à plat+, factuel, quasiment des données brutes" - issu de remontées des ministères de l'Intérieur, des Affaires étrangères et de la Santé.

Et La République en marche tient mercredi soir un bureau exécutif consacré à un sujet qui menace de diviser en son sein, à l'image du rappel à l'ordre adressé à la députée Delphine Bagarry: elle avait comparé le discours d'Emmanuel Macron sur l'immigration à celui "d'un responsable du Front national".

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