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Instit en banlieue parisienne ? Des jeunes sautent le pas, loin de chez eux

"Ce qu'on entendait sur la banlieue parisienne ne nous donnait pas envie": Marie et Joan, étudiants à Marseille, ont surmonté leurs réticences et s'apprêtent à passer le concours de professeurs des écoles à Créteil. Pour augmenter leurs chances de devenir instits et "se sentir utiles".

Les académies de Créteil et Versailles organisent depuis quelques années un "concours supplémentaire", dispositif mis en place sous la précédente ministre de l’Éducation, Najat Vallaud-Belkacem, pour augmenter le nombre de candidats.

Car ces deux académies peinent à recruter, alors que la démographie scolaire y augmente fortement.

Les candidats, étudiants en master, passent dans l'académie de leur choix, le même jour, le concours de professeur des écoles, qui se déroule cette année lundi et mardi. Ceux qui le souhaitent peuvent aussi passer un "concours supplémentaire", dans ces deux seules académies, quelques jours plus tard.

“Il y a une crise du recrutement qui perdure", déclare Rachel Schneider, secrétaire départementale en Seine-Saint-Denis du SNUipp-FSU, premier syndicat enseignant dans le primaire.

L'académie de Créteil (Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Seine-et-Marne) proposait 1.450 postes au "premier concours" en 2018. Au départ, 1.650 candidats ont passé les épreuves, 1.379 ont été admissibles à l'oral et 1.087 professeurs stagiaires ont été au final recrutés, selon les chiffres du ministère de l’Éducation.

Le concours supplémentaire a permis de recruter 400 personnes de plus. Mais même avec ce deuxième concours, "on a 500 contractuels dans les écoles de Seine-Saint-Denis", déclare Rachel Schneider. "Il y a bien des postes qui sont créés budgétairement mais ils n'ont pas été pourvus par des titulaires".

Selon le rectorat, l'académie de Créteil dans son ensemble compte 640 professeurs des écoles contractuels.

L'attractivité du territoire est à améliorer, reconnaît-il, et il a mis en place un accompagnement renforcé des professeurs stagiaires (statut des étudiants ayant réussi le concours, en dernière année de master, effectuée à mi-temps dans une classe).

- "Des a priori sur Créteil" -

Karine Lamoureux, du syndicat SE-Unsa, prône des modules de pré-professionnalisation à l'université pour "faire découvrir le métier d'enseignant".

Elle explique en partie le "manque d'attractivité" par une "méconnaissance du métier" et des territoires. "Attirer des candidats peut passer par quelque chose de très simple: des témoignages. Il faut que les étudiants aient une image juste de ce qu'est l'académie de Créteil".

"On avait beaucoup d'a priori sur Créteil", raconte à l'AFP Marie, de Marseille. Avec son compagnon, Joan, ils ont demandé conseil auprès d'instits qui exercent dans l'académie de Créteil, jeunes recrues ou plus expérimentés.

"Les retours ont tous été positifs", raconte la jeune femme de 23 ans. "Certains nous disent y avoir été par dépit et finalement ils veulent rester dans l'académie".

Rachel Schneider voudrait que plus de personnes issues du territoire soient recrutées. Elle trouve dommage de "continuer à aller chercher des professeurs ailleurs alors que nous sommes le département métropolitain le plus jeune".

Son syndicat pointe la difficulté de financer ses études pour une partie des jeunes de Seine-Saint-Denis et souhaite la mise en place de dispositifs de pré-recrutement.

Le ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer propose, dans un projet de loi en cours d'examen, une préprofessionnalisation des assistants d'éducation (les surveillants) désireux de suivre des études pour devenir professeurs, avec rémunération à la clé.

Une mesure qui ne convient pas au SNUIpp-FSU, qui souhaite lui une aide financière pendant les cinq ans d'études après le bac nécessaires pour devenir professeur. L'étudiant, de son côté, s'engagerait à enseigner pendant un certain nombre d'années.

Marie et Joan ont échoué en 2018 au concours de l'académie d'Aix-Marseille, où les candidats sont très nombreux par rapport au nombre de places offertes (comme à Toulouse, Montpellier, Bordeaux etc.).

Pendant leurs études, ils ont effectué des stages dans des écoles de Marseille classées en éducation prioritaire (REP). Ils ont apprécié l'ambiance entre collègues et les relations avec les enfants.

"Entre une école dans les quartiers nord de Marseille et une école à Saint-Denis, je ne pense pas qu'il y ait de grandes différences", explique Joan. Qui "se sent plus utile en REP" car son "métier prend plus de sens".

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