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JO-2020 - Escrime: Cannone, l'invité de dernière minute, se couvre d'or

Sélectionné en dernière minute, novice aux Jeux olympiques, un gabarit atypique et un palmarès jusque-là vierge: à 24 ans, Romain Cannone, a fait sensation dimanche en remportant le tournoi d'épée, synonyme de premier titre olympique pour la délégation française à Tokyo.

Vainqueur en finale du champion du monde 2019, le Hongrois Gergely Siklosi, 15 touches à 10, Cannone a survolé la journée pour devenir le premier champion olympique français à l'épée depuis Éric Srecki en 1992 et pour offrir à l'escrime française son premier titre en individuel depuis le fleurettiste Brice Guyart en 2004 à Athènes.

"Je ne me suis pas posé de questions, j'ai vraiment +kiffé+ la journée", a expliqué à France Télévisions le nouveau champion olympique d'épée après sa victoire.

"Il faut jouer, il ne faut pas s'enfermer, il faut +kiffer+, il faut créer, plus on joue, plus on s'amuse, plus on prend du plaisir. Je me suis même fait plaisir toute la journée", a insisté le benjamin de l'équipe de France à l'escrime virevoltante.

On attendait l'expérience, sous les traits de Yannick Borel, champion du monde en 2018, mais c'est la jeunesse qui a brillé grâce à "Pano", alias Romain Canonne, ainsi surnommé par ses coéquipiers en référence à Peter Pan et son côté "naïf".

Une innocence qu'il a balayée de main de maître en éliminant entre autres sur son chemin vers le titre, tout en sérénité et maîtrise, rien de moins que le Vénézuélien Ruben Limardo Gascon, champion olympique à Londres en 2012, et le Russe concourant sous bannière neutre Sergey Bida, vice-champion du monde en 2019.

- "Escrime champagne!" -

Selon ses coéquipiers, Cannone n'arrive pas de nulle part: depuis le début de la préparation, "on sentait qu'il avait ça sous le pied", a expliqué le leader des Bleus Yannick Borel qui, dans les gradins, n'a pas arrêté de l'encourager.

Pour Brice Guyart, désormais consultant à la télévision, "c'est plutôt un tireur qu'on attendait en 2024, mais qui, sur une compétition comme celle-là, montre une maturité tactique dans son jeu: il sait très bien appliquer les consignes, imposer un rythme à son adversaire, c'est toujours lui qui est à la manœuvre sur les déplacements".

"Dès qu'il sent qu'il est sur le rythme de l'autre, il corrige, il fait du pressing...", ajoute-t-il, saluant également "des coups qui sortent de nulle part: c'est une escrime champagne!".

La surprise est d'autant plus belle que Cannone, formé aux États-Unis, n'a dû sa sélection qu'à l'éviction au dernier moment de l'expérimenté Daniel Jérent (champion olympique 2016 et champion du monde 2014, 2017 et 2019), pour répondre à une convocation de l'antidopage.

Sur cette double formation américaine/française, son coéquipier Ronan Gustin, remplaçant à Tokyo, explique qu'aux États-Unis, "on lui a appris à répéter des coups, nous on lui a appris à construire des touches".

"Très souple, très élastique, avec une très bonne souplesse et de la puissance (...), il se sert énormément de son agilité et de sa mobilité et en même temps, il va très loin", renchérit Brice Guyart, qui se dit "très impressionné", évoquant un tireur possédant "un bon mélange entre l'instinct, la vista et un schéma tactique, décidé avant mais qui peut évoluer si ça ne se passe pas bien".

- Borel déçu mais lucide -

Enfin, le gros avantage sur ce tournoi de Cannone, c'est que ses adversaires le connaissaient peu, estime Brice Guyart: "il les surprend, et puis c'est tellement bien exécuté, ça va tellement vite que c'est difficile à +lire+".

Il est en outre "capable de tout faire: une touche au pied puis celle d'après, d'aller plus haut, donc c'est assez déroutant et surprenant. On ne sait pas par où ça va arriver et en plus, ça va arriver vite", conclut-il.

Quant à Yannick Borel, qui visait un titre olympique en individuel après avoir remporté l'or par équipes à Rio-2016, il s'est fait surprendre par son adversaire du premier tour, Mohamed Elsayed, un Égyptien de 18 ans.

"Je n'ai pas d'excuses, je peux même pas dire que j'ai fait un bon match", a soufflé, très déçu mais lucide, le Guadeloupéen de 32 ans, reconnaissant que son adversaire avait été "intelligent", "contrairement à moi", a-t-il estimé.

Les fleurettistes en piste dimanche, Ysaora Thibus, Pauline Ranvier et Anita Blaze, ont également fait chou blanc et auront l'occasion de se racheter jeudi, lors de la compétition par équipes.

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