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Coup dur pour Anne Hidalgo: son premier adjoint démissionne avec fracas

"Approximations", "déficit d'humilité", "opportunisme": Anne Hidalgo a essuyé un désaveu cinglant lundi avec la démission de son premier adjoint Bruno Julliard, qui reproche à la maire PS de Paris son "inconstance".

M. Julliard, 37 ans, a annoncé sa décision à Mme Hidalgo lundi matin, en déclinant sa proposition de devenir son directeur de campagne pour les municipales de 2020 dans 18 mois. "Je n'y crois plus. Je ne veux pas faire semblant", affirme-t-il dans une interview au Monde, où il étrille le bilan de la maire.

"Depuis plusieurs mois, de vifs désaccords d'orientation et de méthodes de gouvernance nous ont éloignés", justifie-t-il.

Pour l'ancien président de l'Unef, "si l'orientation générale est la bonne, l'exécution est défaillante", et des "approximations ou erreurs (...) trop nombreuses" émaillent la gestion de la maire, conduisant aux "péripéties juridiques" dans le dossier de la fermeture des voies sur berge, ou au fiasco des services de partage Vélib et Autolib.

M. Julliard lie ces embûches à "une certaine inconstance et à une manière de gouverner à l'instinct", soulignant les volte-faces d'Anne Hidalgo sur la gratuité du passe Navigo pour les seniors ou sur l'ouverture des commerces le dimanche. Il décèle de "l'opportunisme" dans ses premières orientations pour 2020, et regrette un "déficit d'humilité et de compréhension" face aux "mécontentements".

Anne Hidalgo a pris "acte" de la "décision personnelle" de celui qui avait été son porte-parole en 2014, et aussitôt nommé à sa place Emmanuel Grégoire, l'adjoint chargé du Budget. Christophe Girard, adjoint chargé des Ressources humaines, hérite de son côté de la Culture.

- Pas de "plan caché" -

M. Julliard entend-il lui-même être candidat ? S'il dit croire pour 2020 en "un projet visionnaire, social-démocrate et écologique", qui devra être porté par une majorité "dont le cœur devra être au centre-gauche", il semble a priori ne pas vouloir en être le porteur. "Après dix années de responsabilité dans l'exécutif parisien, je vais désormais réfléchir à un autre avenir professionnel. Ma démission ne répond à aucune stratégie personnelle, aucun plan caché", assure-t-il.

Un avenir qui sera "différent d'un avenir politique parisien", même si M. Julliard conserve pour l'instant son mandat de conseiller de Paris et s'accorde "quelques semaines de réflexion" avant de clore ou pas sa vie politique, a-t-il précisé sur RTL lundi soir.

Certains parmi les proches de la maire de Paris soupçonnent cependant l'ex-adjoint de vouloir rallier le parti présidentiel LREM.

"Je suis convaincu qu'il travaille main dans la main avec l’Élysée depuis plusieurs mois. Au moment où notre équipe était en train de s'en sortir, il fallait nous remettre un coup sur la figure", accuse un adjoint sous couvert d'anonymat, rappelant que M. Julliard avait prôné une alliance avec LREM en mars.

Pour le PCF parisien, la démission de M. Julliard est "une opération politicienne". "On est définitivement trop à gauche pour (lui)", critique dans un communiqué l'aile gauche de la majorité municipale.

L'adjoint chargé de l'urbanisme, Jean-Louis Missika, attribue lui à des raisons d'ordre psychologique la "violence" des propos de M. Julliard. "Il y a une sorte de spleen chez Bruno, un désenchantement de la politique. Il a une quarantaine d'années et s'interroge sur ce qu'il va faire", croit-il savoir. "J'ai eu Philippe Grangeon (un proche de la maire de Paris et d'Emmanuel Macron, NDLR) il a le même sentiment que moi: c'est quelqu'un qui s'en va et qui arrête. Il a eu besoin de le justifier", confie-t-il à l'AFP.

Cette démission - "un séisme", selon un collaborateur de la maire - fait en tout cas les affaires de l'opposition. "En démissionnant brutalement de ses fonctions, Bruno Julliard rejoint ce que les Républicains et indépendants dénoncent depuis 4 ans: une gouvernance solitaire (...), des décisions incohérentes, inefficaces et coûteuses pour les Parisiens", a réagi le groupe LR au Conseil de Paris.

"Il dit tout haut ce que beaucoup pensent tout bas (...) peut-être que d'autres suivront, car il y a un vrai problème de méthode politique et de gestion opérationnelle", a de son côté déclaré au Figaro l'ancien conseiller en communication de Bertrand Delanoë Gaspard Gantzer, qui pourrait se lancer prochainement à l'assaut de la mairie.

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