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Le procès du féminicide de Julie Douib s'est ouvert à Bastia

Ce féminicide avait entraîné une vaste mobilisation contre les violences faites aux femmes en France: le procès de l'ex-compagnon de Julie Douib, accusé de l'avoir assassinée à l'Ile Rousse, en Haute-Corse, en mars 2019, s'est ouvert jeudi à Bastia.

Bruno Garcia-Cruciani, 44 ans, crâne rasé, vêtu d'un jean bleu, d'un tee-shirt et d'un masque noirs, comparaît devant la cour d'assises jusqu'au 16 juin et encourt la réclusion à perpétuité.

Son procès a débuté au lendemain de l'annonce par le gouvernement de nouvelles mesures après les conclusions d'une mission d'inspection diligentée dans la foulée d'un féminicide commis à Mérignac (Gironde) début mai, et qui pointent une série de défaillances dans le suivi du conjoint violent multirécidiviste et la protection de la victime.

Trentième féminicide sur les 146 dénombrés en 2019, le meurtre de Julie Douib --qui avait déposé plusieurs plaintes et mains courantes contre son ex-compagnon, comme son père et l'accusé lui-même-- avait suscité lui aussi des questionnements et une vive émotion dans toute la France en 2019.

"Elle n'a pas été suffisamment protégée", s'était emportée Marlène Schiappa, alors secrétaire d’Etat à l'Egalité hommes-femmes, avant d'organiser un "Grenelle" --équivalent d'un sommet-- contre les violences conjugales à l'automne suivant, qui a débouché sur plusieurs mesures, toutefois jugées insuffisantes par plusieurs associations.

Evoquant ce contexte, l'avocat de l'accusé, Camille Radot a dit à l'AFP avant l'audience jeudi qu'il espérait que son client serait "jugé normalement": "On a voulu faire de ce cas un emblème, on ne voit pas pourquoi M. Garcia devrait payer ce prix-là", a-t-il insisté.

Il s'agit "du procès de l'assassin de Julie, de personne d'autre" et notamment pas de la gendarmerie, a aussi réagi auprès de l'AFP Laetizia Costantini, présidente de l'association de défense des droits des femmes Donne di Corsica, tout en disant regretter néanmoins le "classement sans suite de plusieurs plaintes de Julie".

- "Qu'il dise la vraie vérité" -

Plusieurs témoins manquaient à l'appel à l'ouverture des débats, notamment la précédente compagne de M. Garcia-Cruciani, avant Julie Douib, qui a transmis des certificats médicaux faisant état "d'un état psychologique fragile" et a indiqué "craindre des représailles".

"Le meilleur ami" de M. Garcia-Cruciani, mis en examen pour "destruction de documents ou objets concernant un crime ou délit pour faire obstacle à la manifestation de la vérité" dans cette affaire et renvoyé devant le tribunal correctionnel de Bastia, était également absent. La cour s'est réservée la possibilité de les entendre.

La présidente a présenté le résumé des faits et un premier enquêteur a été entendu jeudi matin. "On s'aperçoit que M. Garcia a menti sur l'itinéraire emprunté ce matin-là", a-t-il notamment déclaré, expliquant également comment un "téléphone occulte" de l'accusé a été découvert.

Lors de l'instruction, l'accusé a reconnu être venu au domicile de son ex-compagne, avec qui il a eu deux fils et dont il était séparé depuis septembre 2018, et lui avoir tiré dessus avant de se rendre aux gendarmes.

S'il affirme que son acte n'était pas prémédité, le juge d'instruction qui l'a renvoyé devant la cour d'assises pour assassinat assure le contraire, soulignant notamment que Bruno Garcia-Cruciani avait notamment fait des recherches sur internet avec les mots-clés "peine pour homicide avec arme" et "partir vivre en Thaïlande".

"J'attends juste qu'il nous dise la vraie vérité", a déclaré à la presse le père de la victime, Lucien Douib, qui assiste au procès avec son épouse et leur fils.

"Mes clients sont particulièrement angoissés parce qu'ils savent que ça va être un moment d'émotion, un moment difficile, sans doute douloureux", a indiqué à l'AFP un de leurs avocats, Jean-Sébastien de Casalta, assurant aborder "ce procès avec confiance, avec le souci que la vérité puisse être dite et que le verdict qui sera rendu réponde à la gravité des faits".

Les fils du couple, âgés de 10 et 13 ans aujourd'hui, n'assistent pas à ce procès mais leur avocate, Me Francesca Seatelli a indiqué à l'AFP attendre "que la souffrance" de ses clients "soit entendue par la cour" et que les enfants "retrouvent leur place de victimes".

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