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Le sexisme dans les écoles militaires des Etats-Unis sur la sellette

Le sexisme rampant dans les écoles militaires américaines et la fréquence des agressions sexuelles qui y sont commises ont été dénoncées jeudi lors d'une conférence présentée comme historique, mais les solutions pour y remédier sont restées élusives.

Une sénatrice américaine ayant révélé récemment avoir été violée quand elle était dans l'armée a décrit des pratiques favorables à la multiplication d'agressions sexuelles dans les écoles militaires américaines, au cours de cette conférence à l'Ecole Navale d'Annapolis, près de Washington, à laquelle participaient de hauts responsables du Pentagone.

Les élèves officiers de deuxième année sont ainsi très rapidement appelés à prendre la responsabilité des élèves de première année, notamment les week-ends, a expliqué l'ancienne pilote de chasse Martha McSally, qui fut la première femme à piloter un avion de chasse au combat puis à commander un escadron de combat.

"On charge des jeunes de 19 ans de la responsabilité de jeunes de 18 ans", a-t-elle souligné. "Je n'ai jamais compris ça".

"Ce sont des adolescents!", s'est-elle exclamée, avant d'appeler les directeurs de l'école de l'Air, de l'Ecole Navale et de West Point (armée de terre) à revenir sur cette pratique.

"Ce n'est pas parce qu'on a toujours fait comme ça qu'il faut continuer à faire comme ça", a-t-elle conclu. "Vous devez peut-être faire les choses différemment."

Malgré cet appel vibrant, les responsables militaires ont paru peu enclins à changer ces pratiques.

"Le fait est que (...) les jeunes de 19 ans vont superviser des jeunes de 18 ans parce que c'est comme ça que nous leur apprenons à diriger", a répliqué Richard Spencer, vice-ministre de la Défense chargé de l'US Navy, au cours d'une conférence de presse.

Mais "nous pouvons nous assurer qu'ils ont les outils nécessaires pour le faire correctement", a-t-il ajouté, sans préciser quels outils il envisageait.

- "L'autre" -

Heather Wilson, vice-ministre chargée de l'US Air Force,a souligné pour sa part que les agressions sexuelles les plus fréquentes n'étaient pas commises par des supérieurs mais "entre égaux" et que la solution viendrait de la recherche des outils qui fonctionnent le mieux.

Martha McSally a précisé que, selon son expérience, les élèves officiers quittaient les écoles militaires plus sexistes qu'à leur arrivée.

Au fur et à mesure de l'entrainement apparait une "dynamique étrange qui fait qu'on devient +l'autre+ parce qu'on appartient au groupe minoritaire", a-t-elle dit.

Elle avait provoqué la stupeur en mars en révélant à la tribune du Sénat avoir été violée par un officier de rang supérieur. Elle n'avait pas révélé le nom de son agresseur, ni la date à laquelle les faits s'étaient déroulés mais elle avait précisé n'avoir décidé de parler de ce traumatisme que des années plus tard.

Elle avait alors déjà passé 18 ans sous l'uniforme et la réaction des militaires l'avait tellement déçue qu'elle avait failli quitter l'armée de l'Air. Elle l'a finalement quittée en 2010 avec le grade de colonel après 26 ans sous les drapeaux.

Selon un rapport publié en janvier par le Pentagone, le nombre d'agressions sexuelles signalées dans les académies militaires américaines a augmenté de près de 50% ces deux dernières années, en dépit des efforts officiels pour combattre le problème.

La conférence de jeudi sur la prévention des agressions sexuelles était la première à regrouper les trois académies militaires qui forment les futurs officiers appelés à diriger l'armée américaine, ainsi que des représentants de nombreuses universités américaines.

Mais les associations de victimes d'agressions sexuelles n'ont pas été autorisées à participer aux débats et, à part la sénatrice républicaine, aucune victime d'agression sexuelle ne s'est exprimée.

Pour l'ancien juge militaire Don Christensen, président du groupe de défense des victimes Protect our defenders, c'est le signe que "le leadership militaire est complètement coupé des réalités".

La question des agressions sexuelles est un problème depuis quarante ans et "personne n'en a jamais été tenu responsable", a-t-il déclaré à l'AFP.

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