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Le texte controversé "sécurité globale" en attente du feu vert de l'Assemblée

L'Assemblée nationale doit voter mardi après-midi la proposition de loi controversée sur la "sécurité globale" qui pénalise la diffusion malveillante de l'image des policiers, au grand dam de ses opposants, vent debout contre un texte jugé "liberticide".

Trois jours après la fin des débats, samedi au petit matin, et de nouvelles manifestations qui ont rassemblé des milliers d’opposants dans toute la France, les députés doivent donner leur feu vert, lors d'un vote solennel sur l'ensemble du texte présenté par LREM et son allié Agir.

Le texte pourrait être examiné par le Sénat en janvier en première lecture.

Polices municipales, sécurité privée: la proposition de loi devait prolonger un rapport parlementaire sur le continuum de sécurité. Elle a pris un tour polémique en raison d'une série de mesures sécuritaires pilotées par la place Beauvau autour de la "guerre des images" censées viser les forces de l'ordre.

Si des dispositions sur les caméras-piétons ou l'utilisation des drones ont suscité l'inquiétude d'associations citoyennes ou de militants de gauche, c'est l'article 24 du texte qui a cristallisé passions et antagonismes.

Pour "protéger ceux qui nous protègent", jetés "en pâture sur les réseaux sociaux", la majorité souhaite pénaliser d'un an de prison et 45.000 euros d'amende la diffusion de "l'image du visage ou tout autre élément d'identification" de membres des forces de l'ordre en intervention, quand elle porte "atteinte" à leur "intégrité physique ou psychique". Une mesure plébiscitée par les syndicats policiers.

Mais qui suscite une levée de boucliers à gauche et chez les défenseurs des libertés publiques, qui y ont vu "une atteinte disproportionnée" à la liberté d'informer, et le signe d'une nouvelle dérive autoritaire de la Macronie.

Des déclarations tous azimuts du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, plaidant pour un floutage des forces de l'ordre ou pour l'accréditation obligatoire des journalistes devant couvrir une manifestation, avant de se raviser, n'ont rien arrangé à l'affaire.

Si bien que gouvernement et majorité ont voulu déminer la controverse en réécrivant l'article incriminé.

Au bout de quatre heures de débats âpres et denses, l'Assemblée a finalement adopté par 146 voix contre 24 la mesure, qui spécifie dorénavant que le futur délit ne peut porter "préjudice au droit d'informer", et que l'intention malveillante contre les forces de l'ordre doit être "manifeste".

- "Petite musique" -

La disposition a reçu un soutien quasi sans faille du groupe LREM et des LR. Le vote a en revanche divisé le Modem.

Les garanties votées par la majorité sont-elles pour autant suffisantes pour apporter la "clarté" revendiquée par le chef de file des députés LREM Christophe Castaner?

A gauche, la réponse est sans surprise. S'il accédait à l'Elysée en 2022, Jean-Luc Mélenchon abrogerait la proposition de loi "sécurité globale", estimant que la France serait devenue un "régime autoritaire de surveillance généralisée".

Trente-trois personnalités ayant voté pour Emmanuel Macron en 2017, de Costa-Gavras à Lilian Thuram, ont en outre demandé dimanche de retirer ce projet, ainsi que celui sur les "séparatismes".

Même Bruxelles fait les gros yeux. La Commission européenne a rappelé lundi que les journalistes devaient pouvoir "faire leur travail librement et en toute sécurité".

Mais le texte ne fait pas non plus l'unanimité au sein de la majorité, voire au gouvernement.

"Je ne crois pas en un Etat autoritaire et je ne voterai pas ce texte", a déclaré la députée LREM de la Loire, Nathalie Sarles, à France Bleu.

Le garde des Sceaux a également fait entendre une "petite musique" dissonante.

"Il y a des discussions au sein du gouvernement. Il n'est pas question d'interdire à des journalistes de filmer" et "il faut qu'on trouve un certain nombre d'équilibres", a dit dimanche Eric Dupond-Moretti à BFMTV.

Pour le sénateur LR Philippe Bas, le futur délit est "inapplicable et inconstitutionnel", c'est "un vrai marché de dupes pour les policiers qui n’en retireraient aucune protection! Et une atteinte à la liberté de la presse". Et d'annoncer: "Le Sénat devra le corriger".

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