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Mère infanticide en Gironde: huit ans de prison et une prise de conscience

Ramona Canete, jugée pour avoir tué cinq de ses nouveau-nés, a été condamnée vendredi par la cour d'assises de Bordeaux à huit ans de réclusion, au terme d'un procès éprouvant, qui aura permis à cette mère de se confronter enfin à la "terrible réalité" de ses meurtres.

Agée de 37 ans, cette femme frêle d'origine espagnole encourait la réclusion à perpétuité. Elle a écouté, la tête droite et le visage crispé, l'énoncé du verdict qu'elle n'a pas immédiatement compris.

"Huit ans d'emprisonnement", a répété le président Jérôme Hars, "avec un suivi socio-judiciaire" durant les cinq ans qui suivront sa libération, et "obligation de soins". Puis le magistrat a pris soin d'expliquer que la cour avait pris en compte la "personnalité" de l'accusée et le difficile "contexte" conjugal dans lequel les meurtres ont été commis.

Deux points également retenus comme "circonstances atténuantes" par l'avocat général Xavier Chavigné qui avait requis douze ans de réclusion.

Dès le premier jour de ce procès "hors normes", le président Jérôme Hars avait souligné la "forte emprise" sur Ramona de Juan Carlos Canete, son mari, décrit par tous les experts comme un "amoureux obsessionnel, possessif et jaloux", et exhibitionniste à l'occasion.

Parfois violent, il surveillait tous les déplacements de sa femme.

Initialement mis en examen pour "non dénonciation de crimes" et "recel de cadavres", il a bénéficié d'un non-lieu à l'issue de l'instruction et s'était porté partie civile "pour ne pas être un simple témoin", selon son avocate.

C'est lui qui avait donné l'alerte, le 19 mars 2015, après la découverte par l'une des filles du couple d'un premier nourrisson dans un sac isotherme dans la maison familiale de Louchats (Gironde), avant celle de quatre autres dans un congélateur.

Pour Me Arnaud Dupin, avocat de la défense, ce verdict est une "peine remplie d'espoir, "l'espoir d'une nouvelle vie pour Ramona". Et pour cette détenue incarcérée depuis trois ans à Gradignan (Gironde), c'est peut-être aussi la possibilité d'une libération conditionnelle "dans quelques mois", relève-t-il.

"Sa prise de conscience" durant les cinq jours de procès, a-t-il encore souligné, "montre que cette femme a avancé dans la réflexion pour comprendre son geste fou".

- "Franchi un cap" -

Pour la jeune mère, cette semaine "très chargée émotionnellement" et "très dure" a "ravivé de terribles et cruels souvenirs", a-t-elle dit aux jurés avant qu'ils ne se retirent pour délibérer. Au terme de ce procès, elle a pu enfin, selon sa propre formule, "poser des mots sur (ses) actes" et se "confronter à cette terrible réalité".

Nathalie Bucquet, avocate de l'association de protection de l'enfance "Innocence en danger", partie civile, estime que la peine prononcée vendredi "est un équilibre de justice entre l'extrême gravité des crimes et la personnalité de l'accusée".

Depuis le début de l'enquête, Ramona Canete n'a jamais nié ses crimes, mais disait ne pas se souvenir réellement des événements.

Tout au long des débats, le président Hars s'est employé à faire sortir Ramona de son mutisme. Jusqu'à confronter cette jeune mère aux terribles clichés des cinq nourrissons qu'elle a noyés puis congelés après leur avoir donné naissance dans le secret de sa salle de bains.

"J'ai franchi un cap qui peut m'aider à avancer", a-t-elle déclaré d'une voix plus affirmée. Puis elle s'est engagée devant la cour à "approfondir" le travail avec les psychiatres, "pour parvenir un jour à considérer ces bébés comme mes enfants".

Les derniers mots de Ramona Canete devant la cour ont été pour demander "pardon", en larmes, à ses proches et ses deux filles (17 et 19 ans), venues toutes deux la soutenir à la barre. "Pardon aussi à la société que j'ai choquée par ces actes".

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