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Parcours d'accompagnement des étudiants: un calendrier trop serré pour certaines facs

Les parcours d'accompagnement, que les universités doivent proposer dès la rentrée 2018 aux étudiants les plus fragiles, sont un pilier essentiel de la loi sur les nouvelles modalités d'accès à la fac. Mais de nombreux établissements jugent le calendrier trop serré pour monter ces dispositifs.

La ministre de l'Enseignement supérieur Frédérique Vidal a annoncé le déblocage de huit millions d'euros supplémentaires pour financer les "parcours personnalisés" prévus par la loi ORE (Orientation et réussite des étudiants).

Les candidats qui ne possèdent pas les compétences et acquis jugés nécessaires pour suivre la licence demandée sont acceptés à condition de suivre un parcours d'accompagnement: ils reçoivent la réponse "oui si" sur la nouvelle plateforme Parcoursup.

Ces parcours, qui visent à réduire le taux d'échec en première année (de quelque 60% en moyenne), peuvent revêtir plusieurs formes: année de remise à niveau, modules d'accompagnement dans une matière spécifique, cours de méthodologie etc.

"Cela ne veut pas dire que toutes les filières proposeront ces dispositifs mais ils existeront dans toutes les universités dès la rentrée", a assuré Frédérique Vidal à Libération.

Pourtant, l'université de Poitiers par exemple prévoit de répondre seulement "oui" ou "en attente" sur Parcoursup, jamais "oui si". Car "nous sommes strictement incapables de mettre en place ces parcours pour la rentrée prochaine, faute de moyens humains", déclare Virgine Laval, en charge des formations. L'université compte quelque 7.000 étudiants en première année de licence.

L'établissement réclame "des moyens humains supplémentaires et du temps pour les équipes pédagogiques", ajoute Virgine Laval, qui adhère cependant "à l'idée et à l'esprit des parcours d'accompagnement". "Mais la rentrée 2018, c'est beaucoup trop tôt. Nous y réfléchirons pour l'année suivante".

"A la rentrée 2018, on va se heurter au mur de la réalité", prévient de son côté Pierre Chantelot, professeur et chargé des formations au Snesup-FSU, syndicat dans l'enseignement supérieur fermement opposé à la nouvelle loi.

"La ministre donne de l'argent et c'est tant mieux. Mais nous n'avons pas les bras", dit-il. Plusieurs universités vont donc se garder de répondre "oui si" pour ne pas avoir à proposer un parcours d'accompagnement, selon lui.

- Trois ans ? -

Certaines universités ne mettent en place aucun parcours sous prétexte que leurs filières peuvent accueillir tous les candidats en raison d'un nombre de places suffisant, relève Jimmy Losfeld, président du premier syndicat étudiants, la Fage, favorable à la réforme.

"Elles n'ont rien compris", ces parcours sont faits non pour classer les candidats mais pour assurer leur réussite, souligne-t-il, regrettant le manque de volonté de certaines facs.

Si beaucoup d'établissements jugent le calendrier très serré, plusieurs décident de s'appuyer au moins sur des dispositifs qui existaient déjà et qui étaient ouverts aux étudiants en difficulté sur la base du volontariat, selon une note de l'inspection générale de début mars. Qui relevait aussi "quelques initiatives intéressantes".

L'université de Nantes a mis en place il y a quelques années plusieurs parcours, notamment pour sa filière sciences. L'un était était destiné aux jeunes venus de filières non scientifiques pour une remise à niveau (bacheliers littéraires ou technologiques), l'autre pour des bacheliers scientifiques mais avec des difficultés.

Ses filières histoire, sociologie, Staps (métiers du sport) proposaient aussi un accompagnement pour des bacheliers professionnels et techno, avec du tutorat, des cours d'expression écrite et des sorties culturelles. "Il est prévu de les augmenter l'an prochain", indique Dominique Averty, professeur à Nantes et un des coordinateurs du réseau national des chargés de formation.

"Le texte de loi ne fait que renforcer des pratiques qui existent à titre expérimental" dans nombre d'universités et qu'il faudra évaluer et étendre au fil des ans, ajoute-t-il.

Le processus prendra bien trois ans, estime François Germinet, président de l'université de Cergy-Pontoise et membre de la Conférence des présidents d'universités (CPU), favorable à la réforme.

Près de 888.000 candidats se sont inscrits sur la nouvelle plateforme Parcoursup et ont formulé quelque 7 millions de vœux pour entamer des études après le bac. Les réponses commenceront à tomber le 22 mai.

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