Accueil Actu

Pérou : le nouveau président Vizcarra promet de combattre la corruption

Martin Vizcarra, jusqu'ici premier vice-président péruvien, a prêté serment vendredi en tant que chef de l'Etat et promis de combattre la corruption, après la démission de Pedro Pablo Kuczynski sur fond de scandale.

Grand et sec, cet ingénieur austère de 55 ans, sans lien avec les partis politiques traditionnels, s'est vu remettre l'écharpe présidentielle par le chef du Parlement.

"Nous allons placer tous nos efforts dans la lutte contre la corruption. (...) La transparence sera un pilier de notre mandat", a-t-il déclaré ensuite devant les députés, promettant des "temps meilleurs".

Peu avant, les députés ont tranché le sort du président sortant en acceptant la démission de M. Kuczynski, accusé d'avoir menti sur ses liens avec le géant brésilien du BTP Odebrecht, au coeur d'un vaste scandale de corruption qui éclabousse une partie de la classe politique d'Amérique latine.

M. Kuczynski, un ancien banquier de Wall Street de 79 ans, avait jeté l'éponge mercredi.

Le premier défi du nouveau dirigeant sera de constituer un gouvernement "large, d'unité nationale" pour vaincre la crise, a déclaré à l'AFP l'analyste Mirko Lauer.

M. Vizcarra, qui se trouvait au Canada, est arrivé tard dans la nuit de jeudi à vendredi à Lima, accueilli par des dizaines de supporters qui lui ont offert un maillot du Pérou, qualifié pour le Mondial en Russie. Conformément à la Constitution, la présidence lui échoit jusqu'au terme du mandat actuel, en juillet 2021.

- "Bonne chance" -

"Le gouvernement de Vizcarra va assurer une continuité en matière d'économie et d'investissements. Il devrait jouir d'un capital politique plus important que Kuczynski, sans pour autant réussir à faire avancer les réformes structurelles", juge le cabinet Eurasia Group.

Pour cela Martin Vizcarra qui, contrairement à "PPK", n'a aucune relation avec les milieux d'affaires, devra lui aussi affronter la toute-puissance du clan Fujimori, incarné par ses enfants Keiko et Kenji.

M. Kuczynski a justement souffert face au parti de Keiko, Force populaire (droite), dans l'opposition et majoritaire au Parlement. Il avait déjà échappé de justesse fin décembre à une premier procédure de destitution, en échange d'un accord avec Kenji à qui il a offert en retour, quelques jours plus tard, la grâce de son père Alberto, qui purgeait une peine de 25 ans de prison pour crimes contre l'humanité et corruption.

"Le vice-président aura le même problème de gouvernance. Il lui faudra composer avec le fujimorisme divisé en deux entre Keiko et Kenji", souligne Gaspard Estrada, le directeur de l'Opalc, l'observatoire sur l'Amérique latine de l'Institut d'Etudes Politiques de Paris.

Pour l'heure, Keiko a écrit sur Twitter qu'il s'agissait "d'un moment où il fallait être unis en tant que Péruviens, fermes et optimistes face aux défis qui nous attendent" avant de souhaiter "bonne chance" à M. Vizcarra.

- "Contrat de bonne entente" -

"Le Parlement est obligé (de mettre en place) un nouveau contrat de bonne entente" avec le président, a fait valoir le député Mauricio Mulder (social démocrate), jeudi lors du débat sur le sort de PPK.

PPK, comme est surnommé le chef de l'Etat sortant, est devenu le premier président à chuter dans cette affaire qui a déjà mené en prison nombre de parlementaires brésiliens et le vice-président de l'Equateur.

Ses deux prédécesseurs, Ollanta Humala et Alejandro Toledo, sont eux aussi accusés d'être impliqués dans ce scandale. Le premier est en détention provisoire. Quand au second, il est installé en Californie, mais le Pérou a validé jeudi la demande d'extradition qu'il va présenter aux autorités américaines.

Cette crise politique tombe à quelques semaines du sommet des Amériques, les 13 et 14 avril à Lima, où sont attendus une trentaine de chefs d'Etat dont le président américain Donald Trump.

Mais elle ne devrait pas remettre en cause le déroulement du sommet, ni susciter de grandes agitations au Pérou, où le président de centre droit, élu dans un mouchoir de poche en 2016, n'a jamais suscité l'enthousiasme de la population.

Jeudi, des centaines de Péruviens ont manifesté à Lima pour demander qu'ils (les hommes politiques) "s'en aillent tous", et les réseaux sociaux débordaient ces jours-ci de critiques contre la classe politique.

"Nous ne voulons pas seulement un renouvellement du gouvernement mais aussi du Parlement, il faut dératiser!", écrit ainsi @Pilysays sur Twitter.

"La faible probabilité d'une incertitude politique prolongée renforce notre opinion que ce bouleversement politique ne devrait pas détériorer l'économie", estime le cabinet britannique Capital Economics.

À lire aussi

Sélectionné pour vous