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Ploërmel: la statue de Jean-Paul II bientôt vendue à l'Église

La Pologne voulait la "sauver de la censure". C'est finalement l’Église catholique qui devrait acheter, pour 20.000 euros, la statue de Jean-Paul II à Ploërmel (Morbihan). L'édifice fera ensuite un "saut de puce" pour échapper à la loi de 1905, en sortant de l'espace public.

Le conseil municipal de la cité bretonne (9.000 habitants) doit se prononcer jeudi soir sur la cession de ce monument en bronze de 7,50 mètres de haut, installé sur un parking public depuis plus de douze ans.

Le diocèse de Vannes se propose "de se rendre propriétaire du monument offert gratuitement à la ville de Ploërmel par l’artiste" russe Zourab Tsereteli en 2006, "pour le réinstaller sur une propriété privée", indique la délibération soumise au vote jeudi soir, dont l'AFP a obtenu copie.

"D’un commun accord entre les parties, il est proposé de céder la statue au prix de 20.000 euros", est-il ajouté.

Une fois vendue, la statue devrait être déplacée de quelques dizaines de mètres, aux frais de l’Église, vers un terrain adjacent du collège privé catholique du Sacré-Cœur, où elle restera visible depuis l'espace public.

"Elle va faire un saut de puce", a résumé à l'AFP Patrick Le Diffon, maire (LR) de Ploërmel. "Cela ne devrait pas prendre des délais considérables", a-t-il ajouté.

Ce "saut de puce" est la solution retenue par le maire pour se conformer à une décision du Conseil d’État du 25 octobre dernier. La plus haute juridiction administrative française, saisie par plusieurs requérants, avait ordonné le retrait de la croix surplombant l'édifice, dans un délai de six mois, au nom de la loi de 1905 qui interdit "d'élever ou d'apposer aucun signe ou emblème religieux" dans un "emplacement public".

Une fois installée sur un terrain privé, la statue devrait ainsi sortir du champ d'application de la loi de 1905.

Contacté par l'AFP, le diocèse de Vannes a indiqué qu'il ne communiquerait qu'à l'issue du vote du conseil municipal.

- 'minable'-

La décision du Conseil d’État, visant une statue du pape polonais Karol Wojtyla, avait ému de nombreux catholiques et suscité de vives réactions en Pologne, où la laïcité à la française est souvent mal comprise.

Fin octobre, la Première ministre conservatrice polonaise Beata Szydlo avait ainsi proposé de transférer la statue en Pologne afin de la "sauver de la censure", et dénoncé "le diktat du politiquement correct" et "de la laïcisation de l'État" qui "mènent à terroriser la vie quotidienne des Européens".

Localement, le monument avait été contesté avant même son édification, le 9 décembre 2006, 101 ans exactement après la promulgation de la loi de séparation des Églises et de l'État. Son déplacement vers un terrain privé recueille aujourd'hui l'assentiment des principaux protagonistes de l'affaire.

"C'est ce qui aurait dû être fait dès le départ", a ainsi estimé André Le Béhérec, président de la fédération morbihannaise de la Libre Pensée, association à l'origine des recours administratifs.

"D'ici le 26 avril, cette statue ne doit plus être sur un terrain public", a-t-il ajouté, en référence au délai fixé par le Conseil d’État.

Même l'ancien maire (divers droite) Paul Anselin, qui avait fait édifier la statue, a annoncé qu'il voterait en faveur de la délibération. "Il faut sortir de cette situation !", a lancé l'ancien colonel de parachutistes, âgé de 87 ans, aujourd'hui conseiller municipal d'opposition.

L'élu a cependant regretté que la mairie cède la statue pour 20.000 euros. "Ça ne se fait pas de vendre un cadeau ! C'est minable", s'est-il exclamé.

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