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Procès Balkany: aucun "pacte de corruption" pour la défense du promoteur saoudien

Une procédure "lamentable" et "pas la moindre preuve d'un pacte de corruption": la défense du milliardaire Mohamed Al Jaber, accusé d'avoir corrompu le maire de Levallois-Perret Patrick Balkany en échange de délais dans un contrat immobilier, a plaidé mardi la relaxe au nom du respect du droit.

"L'exemple que doit donner notre justice ce n'est pas de condamner à tout crin mais de se conformer à ses principes. La preuve de la culpabilité incombe à l'accusation et je n'ai pas entendu la moindre démonstration de culpabilité", a attaqué Hervé Temime, très remonté.

L'accusation affirme que Patrick Balkany s'est fait offrir fin 2009 un luxueux riad à Marrakech par le milliardaire saoudien en échange de délais de paiements dans l'affaire des Tours de Levallois, un projet immobilier de 800 millions d'euros dont 243 millions de droits à construire, qui n'a finalement pas abouti.

Les intéressés nient tout pacte de corruption alors que le parquet national financier (PNF) voit un "lien incontestable entre l'acquisition de la maison et le contrat immobilier de Levallois", notamment à travers la "chronologie éclairante" des versements du milliardaire précédant des délais de paiement accordés par la ville cossue de l'ouest parisien.

Le PNF a requis quatre ans de prison dont deux avec sursis et 150.000 euros d'amende contre le milliardaire saoudien, pour avoir "sciemment corrompu un élu de la République", et sept ans ferme contre Patrick Balkany pour corruption passive et blanchiment.

Pour la défense, rien ne tient dans ce dossier. La première et plus grossière erreur selon Me Temime tient dans les poursuites retenues contre son client, qui relèvent non pas de la loi de 2011 mais de celle en vigueur en 2007.

La loi de 2007 "implique de prouver le pacte de corruption" et non pas "se borner à l'affirmer encore et encore comme l'a fait l'accusation": "Il ne suffit pas que des avantages aient été accordés pour que le pacte existe, le pacte doit être antérieur", a-t-il assené, promettant de se coiffer d'un "bonnet d'âne" s'il était pris en défaut.

- Traçabilité des flux -

Si le tribunal n'était pas convaincu par cet argument, les avocats du Saoudien en ont développé deux autres: "l'absence d'avantages" accordés au promoteur et la traçabilité des flux financiers qui, selon les avocats, "ne désignent pas Al Jaber" comme l'auteur des virements destinés à payer le riad.

Me Flavie Hannoun a décortiqué le contrat des Tours de Levallois, analysant chaque accord, chaque avenant, chaque clause, pour démontrer que le promoteur n'avait pas été favorisé, le contrat définitif prévoyant un "échéancier qui pourrait être aménagé UNIQUEMENT si la vente est conclue". Or l'affaire a finalement échoué.

Concernant le financement du riad, les avocats ont remonté la piste des trois virements bancaires imputés au milliardaire vers des comptes du notaire marocain chargé de la vente du riad, Mohamed Al Jazouli.

Le premier virement "arrive sur un compte qui n'est pas celui de l'étude du notaire", relèvent-ils, les deux autres proviennent d'un compte dont le titulaire est Mohamed Al Jazouli lui-même: "ces virements portent la mention +rapatriement+", les avocats supposent que le notaire marocain a voulu rapatrier des fonds dans une opération qui n'a sans doute "rien à voir" avec le riad.

Alors qui a payé sa villa saharienne? "Peu nous importe", tance Me Temime.

Avant lui, la défense de l'avocat de la société d'aménagement de Levallois Arnaud Claude avait aussi plaidé la relaxe. Le PNF a requis contre cet homme présenté comme "le pilote de l'opération" marocaine quatre ans dont deux avec sursis et une interdiction d'exercer.

Ses conseils ont décrit "le gouffre" séparant le portrait dressé par l'accusation d'un architecte de la "sécurisation juridique" de montages illégaux et la réalité d'un avocat qui a "commis des erreurs" mais jamais "accordé la moindre fleur" à Mohamed Al Jaber.

La défense de Patrick Balkany plaidera mercredi.

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