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Patrick Balkany: sept ans ferme et incarcération immédiate requis

Sept ans ferme, incarcération immédiate, dix ans d'inéligibilité et la confiscation de tous ses biens: le parquet national financier (PNF) a requis jeudi une peine à la hauteur de "l'atteinte à la démocratie" du maire LR de Levallois-Perret Patrick Balkany, jugé à Paris pour blanchiment et corruption.

"Beaucoup ont fait de cette affaire un symbole de l'impunité des puissants, de l'impuissance et de la lenteur de la justice en matière de grande délinquance économique et financière", a relevé le procureur Arnaud de Laguiche, lors d'un réquisitoire à deux voix avec Serge Roques.

Les représentants du parquet ont appelé le tribunal correctionnel à sanctionner des années de dissimulation et un "blanchiment continu et systématique", à travers une cascade de sociétés écran, logées au Liechtenstein ou à Panama et dotées de comptes en Suisse ou à Singapour.

Patrick Balkany et son épouse Isabelle sont soupçonnés d'avoir caché 13 millions d'euros d'avoirs au fisc entre 2007 et 2014, notamment deux somptueuses villas, Pamplemousse aux Antilles et Dar Guycy à Marrakech.

Le baron des Hauts-de-Seine, qui a régulièrement grommelé pendant le réquisitoire, n'a fait aucun commentaire en sortant de la salle, se retranchant, pour une fois, derrière son avocat Eric Dupond-Moretti: "On requiert contre cet homme, qui est peut-être aujourd'hui l'incarnation du mal absolu dans cette France qui devient puritaine, ce que parfois on ne requiert pas dans les crimes de sang".

A l'encontre d'Isabelle Balkany, les procureurs ont requis quatre ans de prison avec sursis et 500.000 euros d'amende. Ils ont noté que la première adjointe du maire de Levallois, en convalescence après une tentative de suicide début mai, avait "reconnu une faute" dans une lettre lue par son avocat: l'achat non déclaré en 1997 de la villa Pamplemousse, avec des fonds familiaux cachés en Suisse.

- "Pacte de corruption" -

Contrairement à la villa antillaise pour laquelle les enquêteurs ont démêlé un entrelacs de sociétés offshore et retrouvé le nom des Balkany, un épais nuage entoure la transaction marocaine de 2010. Le couple a toujours nié posséder le riad.

Celui-ci est la propriété d'une SCI marocaine, Dar Guycy, elle-même détenue par une société panaméenne et dont le bénéficiaire déclaré est Jean-Pierre Aubry, ancien bras-droit de Patrick Balkany.

Les procureurs affirment que l'édile s'est fait offrir cette villa par un milliardaire saoudien en échange de délais de paiements dans un énorme contrat immobilier à Levallois, qui n'a finalement pas abouti.

S'ils se sont parfois violemment opposés à l'audience, Patrick Balkany et Mohamed Al Jaber, le promoteur ayant réglé le prix officiel du riad, se sont accordés pour nier tout pacte de corruption.

Pour l'accusation, cette entente existe bien: "Peu importe que le pacte de corruption n'ait pas été explicitement formulé" car il y a un "lien incontestable entre l'acquisition de la maison et le contrat immobilier de Levallois", a affirmé Serge Roques, égrenant une "chronologie éclairante" des versements du milliardaire précédant des délais accordés par la ville.

"Une corruption de cette ampleur, c'est la négation de la démocratie locale, une blessure, une atteinte à la démocratie tout court", a martelé Serge Roques: "aucune complaisance n'est possible".

Le PNF a requis quatre ans dont deux avec sursis et 150.000 euros d'amende contre le milliardaire saoudien, qui "a sciemment corrompu un élu de la République". Pour les procureurs, "le pacte de corruption continue de lier les prévenus, tout aveu de l'un entraînerait la chute de l'autre".

Contre Jean-Pierre Aubry, alors directeur général de la société d'aménagement de Levallois, "prête-nom jusqu'au sacrifice" pour son "maître" Patrick Balkany, le parquet a demandé trois ans dont un avec sursis et 150.000 euros d'amende.

Les procureurs ont requis quatre ans dont deux avec sursis et une interdiction d'exercer contre l'avocat Arnaud Claude, "le pilote de l'opération" marocaine, "la direction intellectuelle et juridique".

Contre le fils Balkany, Alexandre, "entraîné dans cette aventure par ses parents" et poursuivi pour les avoir "couverts" en souscrivant des baux de location fictifs, le PNF a demandé 100.000 euros d'amende.

Avant le réquisitoire, l'avocat de l'Etat Xavier Normand-Bodard avait réclamé un total d'un million d'euros de dommages et intérêts aux prévenus poursuivis pour "blanchiment": tous sauf le promoteur saoudien.

Dans un premier volet portant sur le seul délit de fraude fiscale, les représentants de l'accusation avaient requis mi-mai quatre ans de prison, avec mandat de dépôt, contre Patrick Balkany, deux ans ferme contre son épouse Isabelle, et dix ans d'inéligibilité contre eux deux.

Les plaidoiries de la défense débutent lundi.

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