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Procès France Télécom: mobilisation de salariés et syndicats devant le tribunal de Paris

Au dernier jour des plaidoiries des parties civiles, près d'une centaine de personnes se sont réunies jeudi sur le parvis du tribunal de grande instance de Paris pour réclamer la condamnation des anciens dirigeants de France Télécom, poursuivis pour "harcèlement moral", a constaté une journaliste de l'AFP.

Des associations de victimes, syndicats et salariés ont évoqué un "procès historique". "C'est la première fois que des dirigeants d'une entreprise du CAC 40 sont mis en cause de cette manière", a rappelé Patrick Ackermann, représentant SUD.

Les manifestants espèrent que les anciens dirigeants de France Télécom "reconnaîtront enfin leurs responsabilités" dans la vague de suicides au sein de l'entreprise, entre 2007 et 2010. "Ils méritent une condamnation à la hauteur de notre souffrance", a estimé Béatrice Pannier, salariée d'Orange depuis 37 ans.

Beaucoup souhaitent la mise en place d'un fonds d'indemnisation des familles de victimes, une revendication portée par les organisations syndicales et associations de victimes parties civiles. Car la souffrance ne "s'arrête pas au procès", souligne Patrick Ackermann. "Des familles ont été détruites. Il faut que justice leur soit rendue."

Trois ex-dirigeants de France Télécom, dont l'ancien PDG Didier Lombard, sont jugés pour "harcèlement moral" et quatre autres responsables pour "complicité". Ils encourent un an d'emprisonnement et 15.000 euros d'amende, tandis qu'Orange, ex-France Télécom, encourt 75.000 euros d'amende.

Ils étaient "obnubilés par les profits de l'entreprise" et ont fait passer "au second plan" la sécurité des employés, a critiqué jeudi dans sa plaidoirie l'avocat du syndicat CFE-CGC.

"Votre décision va devoir envoyer un message très fort (...): la santé des travailleurs ne saurait jamais être subordonnée à des considérations purement économiques", a déclaré au tribunal Frédéric Benoist, au début de sa plaidoirie. "De cette dérive, ce dossier est une parfaite illustration", a-t-il ajouté.

Au coeur du procès, qui s'intéresse à la période 2007 - 2010: les plans Next et Act, qui visaient à transformer France Télécom en trois ans, avec notamment l'objectif de 22.000 départs. L'entreprise comptait alors plus de 100.000 salariés, dont une majorité de fonctionnaires, qui n'étaient donc pas licenciables.

"Obnubilés par les profits de l'entreprise, (les prévenus) ont fait passer la sécurité et la santé des agents au second plan, derrière des considérations économiques. (...) Pétris des seuls objectifs économiques, ils ont oublié l'essentiel", a plaidé Me Benoist.

Depuis le début du procès le 6 mai, le tribunal a analysé les cas de trente-neuf parties civiles, retenues par les magistrats instructeurs. Parmi elles, dix-neuf se sont suicidées.

Pour Frédéric Benoist, les sept prévenus "tentent grossièrement de tromper le tribunal", en affirmant que l'entreprise était au bord du dépôt de bilan et que les 22.000 départs devaient se faire "naturellement".

"Les dirigeants ont distillé leur politique déflationniste auprès des managers. (...) Certains ont appliqué cette politique notamment parce que leur prime en dépendait", a estimé l'avocat. Il rejette l'idée d'une dérive de quelques managers: "On ne dérive pas d'un cap fixé par sa hiérarchie. On suit ce cap". L'avocat parle même d'une "chasse aux fonctionnaires".

Les plaidoiries des parties civiles se poursuivent jeudi après-midi avec les avocats du syndicat SUD. Les procureures présenteront leurs réquisitions vendredi.

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