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SFR: l'AMF rappelle Vivendi, Bouygues, Numericable à la transparence

Le gendarme de la Bourse a sévèrement rappelé à l'ordre vendredi Vivendi, Bouygues et Numericable, leur reprochant l'opacité de leur communication dans la bataille pour le rachat de l'opérateur téléphonique SFR et laissant planer la menace de sanctions.

L'Autorité des marchés financiers a publié après la clôture de la Bourse un texte à la formulation inhabituellement directe, mettant les trois acteurs dans le même panier et exigeant qu'ils informent le marché "des caractéristiques des offres en présence".

Le câblo-opérateur Numericable et sa maison-mère Altice sont en négociations exclusives jusqu'au 4 avril avec Vivendi pour lui racheter sa filiale SFR, deuxième opérateur télécoms français. Mais Bouygues fait le forcing pour que sa contre-proposition soit sérieusement prise en compte et qu'il puisse revenir dans la course.

L'AMF indique avoir demandé "à plusieurs reprises" aux acteurs impliqués "la communication d?éléments d?information supplémentaires". Mais n'ayant eu en retour "que des réponses partielles", elle exige à présent que le marché soit informé "des offres en présence".

Certes, souligne l'AMF, SFR n'est pas cotée en Bourse et n'est donc pas à ce titre assujettie aux règles de transparence qui prévalent en cas d'offre publique d'achat.

Mais "Altice, Numericable, Bouygues, et Vivendi, en tant que sociétés cotées, ont l?obligation de fournir au marché une information exacte, précise et sincère", rappelle-t-elle.

Et en conséquence, l?Autorité tient à prévenir les parties prenantes qu'elles "s?exposent à des risques de sanction en cas de non-respect de la réglementation boursière".

Cette prise de parole sévère et directe du régulateur "est en soi une anomalie, le signe d?un malaise", admet le président de l'AMF, Gérard Rameix, dans un entretien mis en ligne sur le site du Figaro.

"Dans ce dossier, nous avons un sentiment de +vox clamens in deserto+!" (de parler dans le désert), regrette-il.

M. Rameix rappelle que l'Autorité des marchés financiers est évidemment "tenue à une parfaite neutralité et à un strict respect de la présomption d'innocence". Mais "nous voulons que le marché ait une information complète et précise", souligne-t-il.

- La "stratégie" de la non-information -

L'absence d'information peut être un "élément de stratégie" dans ce type de dossier, admet-il. Mais selon lui, la situation est également "assez inédite" car "la compétition d'offres a un impact sur cinq société cotées".

Dans la foulée de ces critiques, le groupe de Martin Bouygues a immédiatement réagi: "Nous ne comprenons pas très bien ce rappel à l'ordre en ce qui nous concerne, car nous avons communiqué le contenu de nos offres, contrairement à Numericable", a commenté à l'AFP un porte-parole.

Le groupe de Martin Bouygues a publié le 6, le 13 et puis le 20 mars des communiqués de presse détaillant les évolutions de son offre - en termes de cash, de pourcentage que Vivendi détiendrait dans le nouvel ensemble, ou encore de valorisation de l'opérateur issu du rapprochement.

De son côté, Numericable n'a donné des détails financiers sur son offre que dans un seul de ses communiqués officiels, le 19 mars, faisant seulement état en quelques lignes du montant en numéraire qu'il proposait dans son offre, et du pourcentage que détiendrait Vivendi dans la future société.

Certaines autres dispositions n'ont été évoquées qu'à travers des fuites orchestrées dans la presse.

Vivendi n'a pas voulu commenter la décision de l'AMF. Aucun commentaire n'était disponible en début de soirée auprès de Numericable.

Parmi les éléments de réponse que l'AMF a réclamé aux acquéreurs potentiels, figurent notamment des précisions sur les indemnités qui seraient prévues en cas d?échec de l?opération, ou encore les conditions de sortie de Vivendi du capital du futur ensemble.

La presse avait notamment indiqué que Bouygues, et peut-être même Numéricable, étaient disposés à payer d'énormes dédommagements, se chiffrant en centaines de millions d'euros, si l'opération de reprise devait échouer pour des raisons de concurrence. Mais cette information n'a jamais été confirmée officiellement.

La semaine dernière, l'Association de défense des actionnaires minoritaires (Adam) avait déjà épinglé le "manque de transparence" caractérisant le processus de cession de SFR et avait demandé à sa maison mère de publier le détail des deux offres reçues.

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