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Soupçons d'abus sexuels: le "psy de l'Eglise" Tony Anatrella sanctionné

L'archevêque de Paris, Mgr Michel Aupetit, a sanctionné le prêtre et psychanalyste Tony Anatrella, soupçonné d'abus sexuels sur de jeunes hommes, et désormais interdit de ministère, confession et activité thérapeutique, a-t-on appris mercredi de sources concordantes.

Surnommé le "psy de l'Eglise", Tony Anatrella, 77 ans cette année, doit définitivement renoncer à "toute activité thérapeutique", une exigence du cardinal André Vingt-Trois confirmée par son successeur à la tête du diocèse de Paris.

En outre, "Mgr Aupetit lui a signifié qu'aucun ministère sacerdotal ne lui serait plus confié. Il lui a demandé de ne pas entendre la confession des fidèles, de renoncer à la pratique de la direction ou de l'accompagnement spirituel et également de renoncer à toute intervention publique sans son accord", a détaillé le diocèse dans un message adressé à l'AFP.

Le printemps 2016 avait mis en lumière de nouvelles accusations, dix ans après de premières plaintes, à l'encontre de ce prêtre du diocèse de Paris accusé de thérapies déviantes sur de jeunes hommes dans son cabinet de psychanalyste.

L'AFP avait recueilli le témoignage d'un accusateur qui avait évoqué une "bonne dizaine" de "séances spéciales" en 2010-2011: "une demi-heure d'attouchements", suivie d'"une demi-heure de débriefing sur le ressenti, les émotions".

Tony Anatrella a toujours nié avoir eu le moindre geste déplacé. Trois plaintes devant la justice pénale de la République pour "agressions sexuelles" n'avaient pas abouti, en 2008, notamment parce que les faits étaient prescrits. Faute de résultat devant la justice laïque, plusieurs accusateurs se sont tournés vers l'Eglise.

Le père Anatrella a longtemps été bien en cour auprès de la haute hiérarchie catholique. La gestion de son dossier, dont a hérité Mgr Aupetit en arrivant à la tête de l'Eglise parisienne en janvier dernier, était donc jugée particulièrement délicate.

"Spécialiste en psychiatrie sociale", Tony Anatrella bénéficie d'un titre de "Monseigneur" sans être évêque. Connu pour ses écrits sur la sexualité des adolescents, il a été "consulteur" auprès de deux conseils pontificaux (famille et santé) au Vatican.

Associé à la préparation du premier guide de l'épiscopat français "Lutter contre la pédophilie" en 2000, ce contempteur de "l'idéologie du genre" fut l'un des inspirateurs de l'instruction romaine visant à écarter de la prêtrise les hommes présentant une orientation homosexuelle.

La mesure de "réprimande" - terme de droit canonique - prise à l'encontre du père Anatrella a été annoncée mardi à ses accusateurs par Mgr Eric de Moulins Beaufort, évêque auxiliaire de Paris, a indiqué une source proche des plaignants.

Interrogé par l'AFP, l'avocat (laïc) du prêtre-psy a dénoncé une "décision politique scandaleuse" de la part du nouvel archevêque de Paris, qui selon lui "se protège" après les scandales d'abus sexuels ayant touché plusieurs évêques ces derniers mois.

"Je me réserve aujourd'hui le droit d'une action en justice contre Michel Aupetit", a souligné Me Benoît Chabert, faisant valoir que la sanction de son client allait "contre les faits".

En outre, "il y aura un recours" devant la justice de l'Eglise, introduit par l'avocat ecclésiastique du prêtre, contre la "réprimande" décidée par l'archevêque, a ajouté Me Chabert.

"L'autorité judiciaire a classé l'affaire sans suite. Quant à la commission d'enquête canonique" réunie à l'officialité (tribunal ecclésiastique) de Toulouse, où l'affaire avait été dépaysée, "elle a conclu qu'il n'y avait pas délit au sens du droit canon", a assuré l'avocat.

Tony Anatrella, qui continue de clamer son "innocence", a cessé son activité de thérapeute en mai dernier, a-t-il précisé, soulignant que Mgr Aupetit l'aurait su s'il avait demandé à son prêtre de "s'expliquer".

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