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Quatre dessinateurs dont Charb et Cabu ont été tués: leur dernier dessin tristement prémonitoire

Les dessinateurs Charb et Cabu, de même que les dessinateurs Tignous et Wolinski, du journal satirique Charlie Hebdo figurent parmi les victimes de l'attentat à l'arme lourde survenu mercredi matin au siège du magazine et qui a fait 12 morts selon un bilan provisoire et une vingtaine de blessés. Le policier chargé de la protection de Cabu est lui aussi décédé. Le dernier dessin de Charb s'avère particulièrement prémonitoire. Les dessinateurs auraient été exécutés alors qu'ils étaient en conférence de rédaction.

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Ci-dessous, une photo montrant Cabu (gauche) et Charb (droite), ainsi qu'une photo datant de 2006 montrant plusieurs membres de Charlie Hebdo. Au centre, le dessinateur Tignous, également parmi les victimes de l'attentat.

Charlie Hebdo, un libre-penseur devenu une cible depuis ses caricatures de Mahomet

Symbole d'une presse libre et frondeuse, l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo, victime mercredi d'un attentat meurtrier, avait déjà été la cible ces dernières années de menaces et d'un incendie criminel après la publication de caricatures de Mahomet. Créé en 1970, Charlie Hebdo n'a jamais hésité à publier des dessins provocateurs, se moquant des dirigeants et des stars comme des religions.

En février 2006, l'hebdomadaire, comme plusieurs journaux européens, reprend 12 caricatures de Mahomet publiées par le quotidien danois Jyllands-Posten, au nom de la liberté de la presse. Ces dessins ont suscité des manifestations violentes dans le monde musulman et Charlie Hebdo a été depuis l'objet de menaces récurrentes de groupes islamistes.

"Il y a des menaces constantes depuis la publication des caricatures de Mahomet", a expliqué l'avocat de Charlie Hebdo, Richard Malka, mercredi sur RTL. "Ca fait huit ans qu'on vit sous la menace, qu'il y a des protections mais il n'y a rien à faire contre des barbares qui viennent avec des kalachnikov."

"C'est un journal qui ne fait que défendre la liberté d'expression, la liberté tout court, notre liberté à tous et aujourd'hui, des journalistes, des dessinateurs, de simples dessinateurs ont payé le prix fort pour ça", a-t-il souligné.

La justice française avait donné raison, en 2008, au journal, poursuivi pour "injure aux musulmans", estimant que les dessins visaient "clairement une fraction", à savoir les terroristes, "et non l'ensemble de la communauté musulmane".

En novembre 2011, malgré les menaces, Charlie Hebdo persiste et signe en publiant un numéro spécial rebaptisé "Charia hebdo" avec, en Une, la caricature d'un prophète Mahomet hilare. Il se vend à 400.000 exemplaires. Le jour de la publication, les locaux de Charlie Hebdo sont détruits par un incendie criminel. Le gouvernement parle alors d'"attentat" et pointe du doigt des "musulmans intégristes".

Le directeur de l'hebdomadaire, Charb, menacé de mort, est alors mis sous protection policière. Celle-ci s'est poursuivie jusqu'à aujourd'hui.

Le site internet du journal a aussi été victime de plusieurs piratages. En 2011, sa page d'accueil avait été remplacée pendant plusieurs heures par une photo de la mosquée de La Mecque avec ce slogan: "No God but Allah" ("Pas d'autre Dieu qu'Allah"). Un autre piratage massif a eu lieu en 2012.

En 2012, de nouvelles caricatures publiées par le journal avaient suscité des critiques virulentes dans de très nombreux pays musulmans, au point de faire réagir le gouvernement français.

Mais "Charlie" reste fidèle à sa ligne de conduite: "Il y a de la provocation comme toutes les semaines, pas plus avec l'islam qu'avec d'autres sujets", avait alors fait valoir Charb.

Son ancêtre Hara Kiri, fondé par Cavanna et le Profeseur Choron, avait choqué la France de 1970 avec une Une ironique sur la mort du général de Gaulle, qui avait abouti à son interdiction. L'équipe décide de faire reparaître le journal avec des bandes dessinées et sous un nouveau titre: Charlie Hebdo, référence à Charlie Brown, le célèbre "comics" américain de Schultz. "Charlie" accueille dans ses colonnes une multitude de dessinateurs irrévérencieux, de Cabu à Wolinski en passant par Reiser.

Habitué des procès, le journal, qui croule sous les procédures, doit s'arrêter de 1981 à 1992.

Aujourd'hui, l'hebdomadaire est menacé de faillite: déficitaire, il vend en moyenne environ 30.000 exemplaires, et vient de lancer un appel aux dons pour ne pas disparaître.

Mais il reste tout aussi mordant et irrévérencieux: son numéro de cette semaine est largement consacré à Michel Houellebecq dont le livre, "Soumission", qui imagine une France islamisée en 2022, paraît ce mercredi en France.

En une, une caricature de Houellebecq lance: "En 2015, je perds mes dents... En 2022, je fais Ramadan!" Un autre dessin fait dire à l'écrivain: "en 2036, l'Etat islamique fera son entrée dans l'Europe".

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