Accueil Actu

Vingt ans de prison requis contre un diplomate iranien pour un projet d'attentat près de Paris

Une peine de 20 ans de prison a été requise devant le tribunal correctionnel d'Anvers (Belgique) contre un diplomate iranien accusé d'avoir projeté un attentat contre un rassemblement d'opposants au régime de Téhéran, en 2018 près de Paris, et qui a refusé vendredi de comparaître.

Assadollah Assadi, 48 ans, en poste à l'ambassade d'Iran à Vienne au moment des faits, doit répondre de "tentatives d'assassinat à caractère terroriste" et "participation aux activités d'un groupement terroriste".

Pour le parquet fédéral belge, cet agent du ministère iranien du Renseignement "agissant sous couverture diplomatique" est le coordinateur de ce projet terroriste et il doit être condamné à "la peine maximale" prévue pour ces infractions.

Des peines allant de 15 à 18 ans ont été demandées à l'encontre de ses trois complices présumés, qui eux ont pris place dans le box vendredi matin. Après les plaidoiries de la défense, prévues jeudi prochain, le tribunal devrait mettre son jugement en délibéré.

Ce dossier, mêlant espionnage et terrorisme, a suscité des tensions entre Téhéran et plusieurs capitales européennes.

En octobre 2018, Paris avait accusé le ministère iranien du Renseignement d'être derrière ce projet d'attentat déjoué par la justice belge, ce que Téhéran avait vivement démenti.

L'Iran a fustigé "une violation de l'immunité diplomatique" de M. Assadi, jugeant son arrestation "illégale". Un argumentaire repris vendredi par l'avocat belge de l'intéressé pour justifier son refus de se présenter devant le tribunal.

Un attentat à la bombe devait viser le 30 juin 2018 à Villepinte, près de Paris, le grand rassemblement annuel du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI), une coalition d'opposants comprenant les Moudjahidine du peuple (MEK).

Le jour même, un couple de Belgo-Iraniens domiciliés à Anvers (nord) est arrêté par la police belge à Bruxelles en possession de 500 grammes d'explosif TATP et d'un détonateur dans sa voiture.

- En chapeau de paille -

L'interpellation a lieu in extremis, et le rassemblement peut se tenir avec ses invités de prestige, dont une vingtaine sont parties civiles dans la procédure aux côtés du CNRI (entre autres la Franco-Colombienne et ex-otage des FARC Ingrid Betancourt).

Une même peine de 18 ans de prison a été demandée contre le couple jugé, Nasimeh Naami, 36 ans, et Amir Saadouni (40). Et 15 ans à l'encontre de Mehrdad Arefani (57), autre complice présumé, présenté comme un agent du renseignement iranien agissant depuis le sol belge.

Arefani, arrêté le 30 juin vers 19h00 sur un parking du Parc des expositions de Villepinte, devait guider le couple Saadouni-Naami à son arrivée sur place, selon les investigations.

Quant à Assadi il a été identifié comme étant l'homme aux allures de touriste (en chapeau de paille, appareil photo au cou, selon des images projetées à l'audience) repéré le 28 juin à Luxembourg en train de remettre au couple belgo-iranien un paquet contenant la bombe.

Arrêté le 1er juillet en Allemagne, Assadi a été remis en octobre 2018 à la Belgique, où il est incarcéré depuis plus de deux ans.

Selon le CNRI et ses soutiens, l'explosif très puissant aurait pu faire "un bain de sang" à Villepinte.

"On n'imagine pas l'ampleur de la catastrophe", a lancé devant les journalistes leur avocat Georges-Henri Beauthier, dénonçant un "terrorisme d'Etat" orchestré par Téhéran.

Révélé le 2 juillet au lendemain de l'arrestation d'Assadi, ce projet d'attentat avait mis en colère le président iranien Hassan Rohani, a rappelé l'expert français François Nicoullaud.

- "Rohani absolument furieux" -

"En visite au même moment en Europe, il était absolument furieux de cette opération des services (de renseignement iraniens), qui ont le génie d'intervenir à contre-courant du gouvernement", a dit à l'AFP cet ancien ambassadeur de France à Téhéran.

A l'époque, Hassan Rohani s'efforçait de conserver la bienveillance des Européens dans le dossier épineux du nucléaire iranien, alors que l'accord international de 2015 venait d'être dénoncé unilatéralement par le président américain Donald Trump.

Hasard du calendrier, ce procès intervient le jour du retour en Australie d'une chercheuse australo-britannique tout juste libérée après deux ans de détention en Iran pour espionnage. Sa libération a été obtenue en échange de celle de trois prisonniers iraniens.

Par ailleurs, la cheffe de la diplomate belge Sophie Wilmès a soutenu cette semaine l'appel lancé par son homologue suédoise Ann Linde à ne pas exécuter l'Irano-suédois Ahmadreza Djalali, condamné à mort en Iran.

Les deux ministres réagissaient à des informations selon lesquelles Téhéran se préparerait à procéder à l'exécution de ce médecin qui a été professeur invité à l'Université flamande de Bruxelles (VUB).

Des étudiants ont manifesté pour le soutenir vendredi devant l'ambassade d'Iran à Bruxelles.

À lire aussi

Sélectionné pour vous