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Une "trêve judiciaire" pour François Fillon et Marine Lepen ? "Ils demandent un privilège d’un autre temps"

Eva Joly, eurodéputée française écologiste, était l’invitée de Antonio Solimando ce matin sur Bel RTL. Elle a donné son avis sur le timing des convocations judiciaires adressées à François Fillon et Marine Lepen, tous deux candidats à l’élection présidentielle française.

ANTONIO SOLIMANDO: François Fillon et Marine Lepen, deux candidats à l’élection, sont impliqués dans des affaires pour le moment. Ils réclament une trêve judiciaire, de ne pas être poursuivis pendant le temps de la campagne. Qu’en pensez-vous ?

EVA JOLY: "En réalité, ils demandent un privilège qui appartient à un autre temps. Aujourd’hui, l’idéal démocratique, c’est que tous les citoyens soient traités de la même façon par une justice indépendante et c’est ce qui est en train de se passer. Concernant les faits ou les suspicions d’emplois fictifs de François Fillon, le parquet a immédiatement ouvert une enquête. Il faut bien comprendre qu’il s’agit de faits assez simples. L’enquête a été confiée à une brigade spécialisée qui a enquêté pendant un petit mois, puis une information a été ouverte. En fait, nous avons un fonctionnement normal de la justice. Ce sont les hommes et femmes politiques qui n’entendent pas s’y soumettre. Ils demandent un privilège."

Le fait que François Fillon va probablement être mis en examen à deux jours des dépôts de signature, le fait que Marine Lepen soit appelée à s’expliquer devant la police... A ce moment-ci, ce n’est pas dirigé politiquement par les juges ?

"Non, ce n’est pas du tout dirigé politiquement. Ce sont des magistrats qui font leur travail avec le rythme imposé par la procédure. Suspendre l’enquête est une décision qui, pour moi, est anormale. Les citoyens ont le droit de savoir qu’ils s’apprêtent à voter pour quelqu’un qui a des comptes à rendre à hauteur de 1 million d’euros. Les citoyens comprennent parfaitement de quoi nous parlons, ils comprennent ce qu’est un emploi fictif, ils comprennent que si vous n’êtes pas capable de fournir un témoignage du travail réel d’attaché parlementaire lorsque ce travail a duré plus de 10 ans, c’est sans doute qu’il n’existait pas. Ca, tout le monde le comprend."

Vous êtes engagée désormais derrière la candidature de Benoit Hamon, l’un des concurrents des personnes dont on parle jusqu’ici. Auriez-vous imaginé que 5 ans après votre propre candidature à l’élection présidentielle, le Front National soit en tête des intentions de vote, dans le cadre de l’élection présidentielle française ?

"Je pense que c’était possible de l’anticiper, parce qu’ils captent l’inquiétude et le désarroi des citoyens. Les électeurs du Front National ne sont pas tous des extrémistes, ce ne sont pas tous des racistes, mais ce sont des gens délaissés. Ce sont des gens de nos campagnes où tous les services publics ont disparu. Il n’y a plus de cafés, plus de centre-ville, parce que des hommes politiques mal inspirés ont favorisé des centres commerciaux à profusion, qui ont vidé les centres villes qui faisaient la qualité de la vie française. Donc cette angoisse, cette inquiétude, elle est captée par Marine Lepen qui a l’art et la manière pour fédérer les colères."

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