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"Du fric, des postes, un statut!": les accompagnants d'élèves handicapés crient leur colère

Avec une grève, des rassemblements à Paris et dans de nombreuses villes de France, les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) se sont mobilisés mardi pour protester contre leur précarité et la dégradation de leurs conditions de travail.

"Du fric, des postes, un statut!", "AESH en colère", ont scandé plusieurs centaines de manifestants à Paris, rassemblés à l'appel d'une intersyndicale FSU, CGT, FO, Sud, SNALC et SNLC, a constaté un journaliste de l'AFP sur place.

"Je touche à peine 900 euros par mois. Qui voudrait faire ce travail? Moi, parce que j'aime mon travail. Mais à un moment, ça suffit", s'insurge Clarisse Poussin, AESH dans le Val-de-Marne depuis 2018.

"Comment ça se fait qu'à l'Education nationale, il n’y ait pas (...) de salaire minimum?", s'interroge le député LFI François Ruffin, auteur récemment du documentaire "Debout les femmes!", venu soutenir les AESH.

Salaires insuffisants, temps partiels imposés, absence de statut de la fonction publique, manque de formation, conditions de travail dégradées...: la liste des motifs d'insatisfaction est longue pour ces accompagnants d'enfants handicapés, anciennement appelés auxiliaires de vie scolaire (AVS), une profession largement féminine.

Les AESH étaient 125.500 à la rentrée, soit une augmentation de 35% en cinq ans, selon le ministère de l'Education, tandis que plus de 400.000 élèves en situation de handicap étaient scolarisés dans les écoles et établissements.

"En 2017, quand nous sommes arrivés en responsabilité, (les AESH) correspondaient à 70.000 contrats aidés, même un peu moins. Au moment où je vous parle, c’est 125.000 CDD, et même parfois des CDI, des CDD de trois ans renouvelables une fois et à la fin un CDI. Nous avons créé une véritable carrière des AESH", s'est défendu mardi le ministre Jean-Michel Blanquer à l'Assemblée nationale.

"Est-ce que la situation est pour autant idéale? Non, parce que d'abord la demande est toujours plus forte", a-t-il ajouté. "Mais ce que nous avons réussi, c’est non seulement à stabiliser davantage mais aussi à organiser mieux".

- "On doit jongler" -

Le ministère a mis en place une grille indiciaire rénovée pour leurs rémunérations, mais "largement insuffisante" selon les syndicats. Il a aussi annoncé la création de 4.000 nouveaux emplois d'AESH pour la rentrée 2022, mais là aussi jugée bien en-deçà des besoins.

Les AESH sont par ailleurs unanimes pour dénoncer une dégradation de leurs conditions de travail avec la création des PIAL, ces Pôles inclusifs d'accompagnement localisés mis en place en 2019 et généralisés depuis pour mieux coordonner leurs interventions, mais qui leur imposent de suivre souvent davantage d'élèves.

"Les PIAL, ce sont des machines à broyer", dénonce Magalie Trarieux, enseignante et référente AESH dans le Val-de-Marne pour le Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, venue manifester à Paris.

"On m'a informée par lettre que je pourrais être envoyée sur sept établissements différents", raconte de son côté Clarisse Poussin. "Je ne dors plus, il y a beaucoup de souffrance, de notre côté comme de celui des enfants".

"Avec la mutualisation, des enfants peuvent avoir jusqu'à trois AESH différentes par semaine. Elles ne connaissent même pas leur prénom ou leur handicap. Les enfants sont complètement perdus. C'est grave", renchérit Nassira Younsi, depuis douze ans en Seine-Saint-Denis.

Car si certains enfants ont droit à un accompagnant individuel, beaucoup doivent désormais se partager un accompagnant, dit "mutualisé".

Du côté des parents également, l'exaspération est grande alors que beaucoup d'enfants sont privés de tout ou partie des heures d'accompagnement auxquelles ils ont droit.

Certaines familles n'hésitent pas à se tourner aujourd'hui vers la justice, comme Laetitia Sarre, qui a obtenu en juin la condamnation de l'académie d'Aix-Marseille pour non-respect du nombre d'heures d'accompagnement de son fils autiste à Marseille. "C'est un parcours du combattant terrible pour avoir ces moyens auxquels ils ont droit", dit-elle.

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