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"Pas de guerre sans armes": à New York, des infirmiers dénoncent le manque d'équipement

"Les soldats ne vont pas à la guerre sans armes, pourquoi les infirmiers travailleraient-ils sans équipement de protection?" Une trentaine d'infirmiers ont organisé jeudi une rare manifestation devant un hôpital new-yorkais, pour dénoncer le manque de masques, blouses et autres équipements de protection qui les met en danger, eux et leurs patients.

En ces temps de pandémie, avec désormais près de 100.000 cas confirmés de Covid-19 et plus de 2.300 morts dans le seul Etat de New York, les manifestations sont rarissimes, et les consignes de distanciation strictes.

A l'appel d'un syndicat, infirmiers et infirmières s'étaient postés le long de la clôture de l'hôpital universitaire Montefiore, dans le quartier du Bronx, à distance les uns des autres, masqués et ruban noir au bras par solidarité avec tous les malades.

Tous avaient un panneau pour dénoncer le manque de "PPE" - les équipements de protection rationnés dans de nombreux hôpitaux new-yorkais - et réclamer aux dirigeants politiques qu'ils en fassent produire d'urgence.

"Nous sommes les combattants aux avants-postes (..) et nous n'avons ni les armes ni l'armure pour nous protéger contre l'ennemi", a lancé Judy Sheridan-Gonzalez, infirmière aux urgences et présidente du syndicat.

Ses collègues ont pris la parole les uns après les autres, chacun avec son histoire.

Benny Mathew, un infirmier de 43 ans, explique avoir contracté le virus après avoir soigné au moins quatre malades atteints du coronavirus, sans les équipements nécessaires.

Le 21 mars, il a arrêté de travailler vu la toux, les maux de tête, et les courbatures qu'il ressentait. Le 25 mars, le test revenait positif, mais le 28, sans fièvre, l'hôpital lui demandait de reprendre le travail.

"Le seul critère pour eux était la fièvre. Ils m'ont dit de mettre un masque et de revenir...On manque de personnel, donc je pense que c'était mon devoir de revenir (...) mais j'avais peur de transmettre la maladie à mes collègues, aux patients qui ne l'ont pas", dit-il à l'AFP.

Lui qui a suivi la progression de l'épidémie en Italie, où habite sa soeur, dit vivre de facto en quarantaine chez lui, isolé de sa femme et ses deux enfants, depuis début février, lorsque les premiers cas suspects de Covid-19 sont arrivés à son hôpital.

- "C'est le chaos" -

Autre conséquence de l'explosion de l'épidémie: Jacqueline Anom, infirmière en soins intensifs dans l'antenne de chirurgie ambulatoire du groupe Montefiore, raconte comment cet établissement de 11 étages a été transformé du jour au lendemain en centre d'hospitalisation pour malades du Covid-19.

Dans ce bâtiment où les malades ne sont pas censés passer la nuit, faute de douches, de vraies chambres avec portes ou de vrais lits, les personnes infectées ont commencé à arriver mardi sur des civières, et ils y restent, dit-elle.

Elle a été l'une des premières à devoir soigner un patient contaminé.

"Je n'avais pas les choses dont j'avais besoin", raconte-t-elle. Sans équipement de rechange, elle n'a pas osé aller aux toilettes ou sortir de la salle de soins pendant ses 12 heures, de peur de devoir manipuler sa blouse et son masque potentiellement contaminé pour les enlever puis les remettre.

"C'est juste le chaos", lance-t-elle.

"Je fais ça depuis 20 ans, et c'est la première fois de ma vie que je suis si incertaine. C'est très troublant, je suis furieuse: nous sommes aux Etats-Unis, on ne devrait pas avoir à se battre pour des équipements de protection".

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