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Accusations de pédophilie: les fans de Michael Jackson montent au créneau

Prêts à tout pour le défendre: le nouveau documentaire sur des accusations de pédophilie à l'encontre de Michael Jackson a suscité une levée de boucliers chez ses fans, bien décidés à protéger la mémoire du défunt "roi de la pop".

A l'ère des réseaux sociaux, les communautés de fans sont devenues des armées avec lesquelles il faut compter, avec chacune un surnom: Beyoncé a sa "Beyhive", Justin Bieber les "Beliebers", Cardi B le "Bardi Gang".

Et lorsque "leurs" célébrités se retrouvent accusées de crimes, le besoin de monter au créneau peut devenir irrésistible, selon la psychiatre new-yorkaise Sue Varma.

Ils ont "besoin d'un échappatoire, d'un rêve, quelqu'un qui leur sert de modèle", explique-t-elle à l'AFP. "C'est une espèce de déni", les célébrités "sont surhumaines, et nous voulons - ou plutôt nous avons besoin de penser qu'elles ne peuvent rien faire de mal".

Après la diffusion dimanche et lundi sur la chaîne HBO des deux parties du documentaire "Leaving Neverland", de nombreux fans de Michael Jackson, mort il y a presque 10 ans, se sont déchaînés sur Twitter, décrédibilisant les deux victimes présumées interviewées dans le film, notamment sous le mot d'ordre #MJInnocent.

- "Dévouement aveugle"? -

"Michael a été victime d'accusations fausses presque toute sa vie, venant de vautours avides d'argent ou de gloire. Il n'y a rien de changé", a notamment tweeté la musicienne Arika Kane.

"Jetez ce +mocumentaire+", avec "les victimes les plus ridiculement non-crédibles que le monde ait jamais vues", raillait aussi Zachary Jaydon, un musicien de Los Angeles.

Le réalisateur du documentaire, Dan Reed, a indiqué à l'AFP qu'il recevait depuis des mois des messages de fans au vitriol. "Ils sont dans le dévouement aveugle", dit-il. "C'est presque comme un culte religieux".

Les "superfans", dont la relation à une célébrité peut frôler l'obsession, ne constituent pas un phénomène nouveau, selon le professeur et expert en médias Paul Booth, de l'université DePaul de Chicago. Mais les réseaux sociaux les ont rendus plus visibles.

"Les fans ont toujours eu des désaccords et des antagonismes", poursuit-il. "La différence aujourd'hui, c'est que les gens qui ne sont pas fans peuvent voir" ce qu'ils pensent.

Sur les réseaux sociaux désormais, qui accentuent d'après lui "les sentiments d'identification", "ce n'est pas assez de défendre", il faut "contre-attaquer".

Avec les réseaux sociaux, "vous pouvez juste tirer", "pas besoin de réfléchir, il suffit de réagir", souligne une autre spécialiste des médias, Mel Stanfill, de l'université de Floride centrale.

"Notre perception de ce qui est socialement approprié a changé", dit-elle.

Il y a eu d'autres cas dans le passé d'artistes reconnus, comme Roman Polanski et Woody Allen, accusés d'abus sexuels sur mineurs, dont les fans ont tout fait pour que cela ne gâche pas leur admiration pour leur vedette.

- Des morts inattaquables -

Mais c'est devenu plus compliqué aujourd'hui, dans le sillage du mouvement #MeToo, qui a exposé la prévalence des abus sexuels.

Certaines célébrités, comme le chanteur de R&B R. Kelly, se retrouvent ainsi à nouveau confrontées à des accusations qu'elles avaient réussi à mettre en sourdine par le passé.

Dans le cas de Michael Jackson, le fait que l'artiste ne soit plus là pour se défendre ne fait qu'exacerber la volonté des fans de le protéger.

"Les gens peuvent être des légendes de leur vivant, mais ils deviennent en quelque sorte des anges après leur mort", souligne la psychiatre Sue Varma, citant notamment Elvis et la princesse Diana. "Culturellement, on nous apprend à ne pas dire du mal des morts, nous voulons en quelque sorte les exonérer".

Les héritiers de Michael Jackson --qui touchent entre 20 à 25 millions de dollars par an en royalties de ses enregistrements, selon le magazine spécialisé Billboard-- ont abondamment remercié les fans pour leur virulente défense.

"Merci à tous les fans qui ont toujours soutenu mon oncle et ma famille", a tweeté Taj Jackson, le neveu de Michael. "Vous êtes la colonne vertébrale de ce combat. Je n'aurais pas la force, si vous n'étiez pas là".

Pourtant, le réalisateur Dan Reed dit avoir reçu pour son film "un soutien bien plus fort" que ce qu'il attendait.

"Les fans n'accepteront jamais (les accusations), car le Michael Jackson qu'ils connaissent n'est pas le véritable Michael Jackson," dit-il. "Ce n'est pas l'homme, c'est le mirage, c'est l'image, c'est l'icône".

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