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Algérie: manifestations émaillées de heurts contre un 5e mandat de Bouteflika

Plusieurs milliers d'Algériens ont répondu vendredi aux appels à manifester lancés sur les réseaux sociaux contre le 5e mandat que brigue le président Abdelaziz Bouteflika, en défilant notamment à Alger, où des heurts ont eu lieu avec les forces de l'ordre.

"Pas de 5e mandat", "Ni Bouteflika, ni Saïd" (frère du chef de l'Etat, souvent perçu comme son successeur potentiel) ont scandé les manifestants, des jeunes hommes pour l'essentiel, dans le centre d'Alger, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Des rassemblements sans incidents notables ont également eu lieu dans d'autres localités, comme à Oran, la deuxième ville du pays, selon des médias algériens.

Les autorités ne se sont pas exprimées sur le nombre de manifestants à travers le pays.

Plusieurs cortèges, dans lesquels des drapeaux algériens étaient visibles, se sont formés à la mi-journée à Alger à l'issue de la grande prière hebdomadaire musulmane, sans que la police, déployée en nombre depuis le matin, n'intervienne.

Mais des heurts ont éclaté en fin d'après-midi lorsque des manifestants se sont dirigés vers la présidence de la République et ont été bloqués par les policiers.

Repoussés par des tirs de gaz lacrymogènes, ils ont répliqué par des jets de pierre et de projectiles divers contre les policiers qui ont procédé à quelques interpellations, selon un journaliste de l'AFP.

Le calme est revenu en début de soirée, les forces de l'ordre ayant réussi à disperser les protestataires. Beaucoup de policiers restent déployés dans le centre-ville, a constaté un journaliste de l'AFP.

Toute manifestation est officiellement interdite depuis 2001 dans la capitale algérienne, où la police intervient généralement sur le champ pour endiguer la moindre tentative de rassemblement.

- "Pouvoir assassin!" -

Au pouvoir depuis 1999, M. Bouteflika, 81 ans, a mis fin le 10 février à des mois d'interrogations sur ses intentions, en annonçant à la Nation qu'il briguerait un 5e mandat lors de la présidentielle du 18 avril.

Sur la place de la Grande Poste, bâtiment emblématique en plein centre d'Alger, des manifestants ont escaladé la façade du siège du Rassemblement national démocratique (RND), parti du Premier ministre Ahmed Ouyahia, et en ont décroché, sous les hourras, un grand portrait du président Bouteflika.

"Pouvoir assassin!", "Ouyahia, dégage!", ont scandé les protestataires. M. Ouyahia est considéré comme un fidèle de M. Bouteflika dont il dirige le gouvernement pour la troisième fois.

La photo a été lacérée et piétinée une fois à terre, ont constaté des journalistes de l'AFP.

La dernière manifestation à Alger a eu lieu en février 2018 lorsqu'un millier de médecins en formation avaient réussi à braver l'interdit en se rassemblant devant la Grande Poste. Ils avaient été rapidement encerclés et bloqués par la police.

Plusieurs appels à manifester ce vendredi contre la candidature et la victoire annoncée de M. Bouteflika à la présidentielle ont éclos ces derniers jours sur les réseaux sociaux, sur des pages dédiées, sans que le mouvement n'apparaisse pour l'heure structuré.

Des partis d'opposition ont indiqué "soutenir" les marches, mais aucun parti ou syndicat n'en est à l'origine ou n'a appelé ouvertement à y prendre part.

- Rares apparitions -

Selon le site d'information TSA (Tout sur l'Algérie), une "imposante marche" s'est également déroulée à Tizi Ouzou (100 km à l'est d'Alger).

"Des milliers de manifestants ont scandé +le peuple veut la chute du régime+" à Ouargla (est), a aussi rapporté le quotidien francophone El Watan.

La presse algérienne a fait également état de protestations d'ampleur variable à Béjaïa, Tiaret, Relizane et Sétif (nord), à Annaba (nord-est).

Elu pour la première fois en 1999 sans opposition, la totalité de ses adversaires s'étant retirés en dénonçant à l'avance des fraudes, M. Bouteflika a été constamment réélu depuis 2004 avec plus de 80% des voix au 1er tour.

Victime en 2013 d'un accident vasculaire cérébral (AVC) qui l'a depuis cloué dans un fauteuil roulant, il ne fait que de rares apparitions et ne s'exprime plus en public.

Dans son message du 10 février, il a devancé les critiques sur son état de santé, qui selon certains de ses opposants le rend inapte à gouverner.

"Bien sûr, je n'ai plus les mêmes forces physiques qu'avant (...) mais la volonté inébranlable de servir la Patrie ne m'a jamais quitté et elle me permet de transcender les contraintes liées aux ennuis de santé", a-t-il écrit.

Jeudi, la présidence algérienne a annoncé qu'il se rendrait dimanche à Genève pour des "examens médicaux périodiques".

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