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Algérie: six mois de contestation massive

L'Algérie est secouée depuis six mois par une contestation inédite ayant contraint Abdelaziz Bouteflika à démissionner début avril et qui réclame depuis des institutions de transition débarrassées de l'ensemble du système au pouvoir depuis des décennies.

Mais le "Hirak" (mouvement de contestation), n'a encore obtenu aucune avancée vers un changement de régime et le "système" est toujours en place.

- "Pas de 5e mandat" -

Le 22 février 2019, plusieurs milliers de personnes manifestent dans plusieurs villes. "Pas de 5e mandat", "Ni Bouteflika, ni Saïd" (frère du président, perçu comme un successeur possible), scandent les protestataires à Alger, où les manifestations sont interdites depuis 2001.

Au pouvoir depuis deux décennies, M. Bouteflika, très affaibli depuis un AVC en 2013, avait annoncé le 10 février qu'il briguerait un 5e mandat.

Le 10 mars, le chef d'état-major Ahmed Gaïd Salah déclare que l'armée "partage" les "mêmes valeurs" que le peuple, quelques jours après avoir présenté l'armée comme la "garante" de la stabilité.

Le lendemain, M. Bouteflika renonce à briguer un 5e mandat, reportant sine die la présidentielle. Le ministre de l'Intérieur Noureddine Bedoui remplace Ahmed Ouyahia comme Premier ministre.

- Bouteflika démissionne -

Le 15, des manifestations ont lieu dans 40 préfectures sur 48. Des diplomates évoquent "des millions" d'Algériens dans les rues.

Le général Gaïd Salah demande fin mars que le président soit déclaré inapte à exercer le pouvoir ou qu'il démissionne.

Le 2 avril, il demande que soit appliquée immédiatement la procédure constitutionnelle permettant de l'écarter. Peu après, M. Bouteflika, 82 ans, démissionne.

Le 5, les Algériens descendent en masse dans la rue, déterminés à se débarrasser du "système".

Le 9, le président du Conseil de la Nation (chambre haute du Parlement) Abdelkader Bensalah est nommé président par intérim. L'opposition boycotte la réunion du Parlement.

Le directeur de l'Agence France-Presse (AFP) à Alger, Aymeric Vincenot, est expulsé par les autorités qui refusent de renouveler son accréditation.

Mi-avril, le président du Conseil constitutionnel Taïeb Belaiz, fidèle de Bouteflika, démissionne.

- Présidentielle annulée -

Le 20 mai, le général Gaïd Salah rejette deux principales demandes de la contestation: le report de la présidentielle et le départ des figures du "système politique". Le 22, il assure n'avoir "aucune ambition politique".

Le 2 juin, le Conseil constitutionnel annule de facto la présidentielle prévue le 4 juillet après avoir invalidé les dossiers des deux seuls candidats.

- Enquêtes -

Le 10 juin, un puissant homme d'affaires, Mahieddine Tahkout, est inculpé et placé en détention préventive dans des affaires de corruption, alors que plusieurs enquêtes visent surtout d'ex-proches de M. Bouteflika.

Dès début mai, son frère Saïd Bouteflika ainsi que deux ex-chefs des services de renseignements avaient été placés en détention provisoire, poursuivis pour "atteinte à l'autorité de l'armée" et "complot contre l'autorité de l'Etat".

Deux anciens Premiers ministres, Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, ont aussi été placés en détention provisoire.

- Drapeau berbère -

Le 19 juin, le général Gaïd Salah fait savoir qu'aucun autre drapeau que l'emblème national ne sera toléré dans les cortèges.

La police cible fin juin les porteurs de symboles berbères, notamment de drapeaux, lors de la manifestation hebdomadaire.

Plusieurs manifestants ont été placés en détention préventive pour avoir bravé l'interdiction.

- "On ne va pas s'arrêter" -

Début juillet, Abdelkader Bensalah propose un "dialogue" pour préparer la présidentielle, promettant que l'Etat et l'armée en seront absents.

Le 9, expiration du délai d'intérim à la tête de l'Etat, confié à Abdelkader Bensalah. Le lendemain, le général Gaïd Salah réaffirme le soutien de l'armée au président Bensalah.

Le chef de l'Etat par intérim charge le 25 juillet une "Instance nationale de dialogue et de médiation" de mener des consultations pour définir les modalités d'une future présidentielle. Mais cette instance peine toujours à asseoir sa légitimité.

Le 2 août, la "désobéissance civile" est prônée pour la première fois dans les manifestations.

Le 8, le général Gaïd Salah juge que les revendications "fondamentales" de la contestation ont été satisfaites, estimant que l'objectif est désormais la présidentielle. "Certains groupes (...) s'acharnent à rejeter toutes les initiatives présentées et tous les résultats obtenus, en scandant des slogans tendancieux et lançant des appels douteux".

Le 16, les Algériens manifestent massivement à Alger pour un 26e vendredi consécutif, scandant "c'est nous ou le pouvoir, on ne va pas s'arrêter".

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