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Allemagne: verdict contre un groupuscule "terroriste" anti-réfugiés

Un tribunal allemand rend mercredi son verdict contre huit membres d'un groupuscule d'extrême droite, qualifié de "terroriste" et jugé pour des agressions contre des réfugiés et des opposants politiques en 2015 dans l'ex-RDA en pleine crise migratoire.

Le tribunal de Dresde, dans l'Est de l'Allemagne, rend sa décision à 13H00 contre les accusés, sept hommes et une femme de 20 à 40 ans soupçonnés d'avoir formé le "Groupe Freital", du nom de cette localité de Saxe où ont eu lieu la plupart des attaques.

Le parquet a requis à leur encontre cinq à onze ans de prison pour "constitution d'une entreprise terroriste", "tentative de meurtre" et "blessures corporelles" après cinq attentats à l'explosif menés entre juillet et novembre 2015 contre des foyers de réfugiés et des militants de gauche.

Une période qui a coïncidé avec le début de l'afflux de plus d'un million de migrants au total en Allemagne en 2015 et 2016, en provenance notamment de la Syrie en guerre civile.

Un migrant avait été blessé lors de ces agressions. La voiture d'un élu du parti de gauche radicale Die Linke avait également été plastiquée.

"Ils ont voulu créer un climat de peur et de violence", a martelé pendant le procès le procureur Jörn Hauschild. "Ceux qui ont des opinions différentes devaient être intimidés et les étrangers poussés à quitter le territoire", a ajouté le magistrat.

Selon l'accusation, les extrémistes de droite étaient parfaitement conscients du risque létal de leurs attaques.

Les faits avaient démarré à l'été 2015. Berceau du mouvement islamophobe et anti-réfugiés Pegida, la Saxe était alors l'épicentre de l'hostilité aux migrants et Freital faisait les gros titres pour ses manifestations houleuses, émaillées de slogans racistes et de saluts hitlériens.

Ironie de cette affaire, le procès qui s'est tenu sous haute surveillance a eu lieu dans une salle spéciale aménagée dans un bâtiment qui devait accueillir des réfugiés.

- Saluts nazis -

La seule femme sur les banc des accusés a esquissé un début de mea culpa. "J'aimerais pouvoir apporter une réponse aux victimes, car moi aussi j'ai souffert de discrimination et d'exclusion", a déclaré lors de la dernière audience, Maria Kleinert, homosexuelle qui dit être en bute à l'homophobie.

"Je suis désolé. Je ne peux m'expliquer le pourquoi du comment", a aussi dit Patrick Festing, considéré par les enquêteurs comme le spécialiste en explosifs du groupe et l'un de ses meneurs.

Les membres du groupe étaient soudés par leur xénophobie. Patrick Festing, livreur de pizza, a expliqué qu'il refusait à l'époque de livrer des étrangers.

Autre cerveau supposé du groupe, Timo Schulz, un conducteur de bus, a préféré se taire.

Leurs avocats n'ont pas contesté les faits mais ont rejeté toute intention criminelle ou terroriste, affirmant que les attaques étaient "spontanées".

Schulz et Festing avaient été arrêtés fin 2015. Le premier a déjà écopé d'une peine de prison avec sursis en 2016 pour avoir frappé à coups de batte de baseball la voiture de manifestants pro-réfugiés. Le reste du groupe avait été interpellé en avril 2016.

Dans le sillage de l'arrivée de centaines de milliers de demandeurs d'asile, les attaques contre les réfugiés ou les foyers de demandeurs d'asile se sont multipliées en Allemagne.

En 2017, 2.219 attaques contre les réfugiés ou des foyers de demandeurs d’asile ont été recensées, en baisse néanmoins par rapport aux 3.500 enregistrées en 2016.

Dans le seul Etat-région de Saxe, qui représente 5% de la population allemande, l'association d'aide aux victimes RAA a dénombré 437 agressions racistes en 2016 après 477 en 2015.

C'est aussi dans cette région, où le parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD) enregistre ses scores les plus élevés, qu'un groupuscule néo-nazi, NSU, fut créé à la fin des années 1990 et assassina durant plusieurs années des immigrés dans tout le pays.

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