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Après l'affaire de la jeune Saoudienne, la Thaïlande promet un assouplissement de sa politique migratoire

Dans les centres de détention de Thaïlande, où s'entassent des centaines de réfugiés, la récente médiatisation du cas de la jeune Saoudienne Rahaf Mohammed al-Qunun attise espoirs et doutes, Bangkok ayant promis depuis d'assouplir sa stricte politique migratoire.

Arrêtée début janvier à l'aéroport de Bangkok, la jeune fille de 18 ans devait être renvoyée vers l'Arabie saoudite où elle s'estime menacée. Mais face à la pression des réseaux sociaux, les autorités thaïlandaises ont renoncé et elle a été accueillie par le Canada quelques jours plus tard.

Un cas sans précédent en Thaïlande qui applique une politique migratoire draconienne.

Les demandeurs d'asile sont généralement expulsés en toute discrétion malgré le principe international du non-refoulement, selon lequel ils ne peuvent être renvoyés vers leur pays d'origine si "leur vie ou leur liberté est menacée".

D'autres attendent des années dans des centres de détention. Au final, très peu sont réinstallés dans un pays tiers.

Mais "l'affaire Rahaf" pourrait marquer un tournant, la Thaïlande ayant depuis annoncé un revirement dans sa politique migratoire.

Les réfugiés ne seront plus renvoyés dans leur pays "contre leur gré", a assuré la semaine dernière le chef de la police de l'immigration, Surachate Hakparn.

Par ailleurs, un protocole d'accord a été signé par plusieurs ministères ce lundi, prévoyant la libération des enfants détenus dans ces centres où sont parqués sans-papiers, demandeurs d'asile ou réfugiés.

"Des enfants et leurs mères ont déjà été libérés depuis octobre. On espère que tous seront bientôt relâchés", relève à l'AFP Jennifer Harrison du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).

- 100 par cellule -

Mais ces annonces seront-elles véritablement suivies d'effets ?

Dans le centre de détention de Bangkok, ouvert exceptionnellement lundi aux médias, quelques dizaines d'hommes, toute nationalités confondues, ont été autorisés à sortir de leur cellule pour faire du sport ou téléphoner à un proche, une opportunité offerte uniquement deux fois par semaine.

Et le scepticisme, quant à une éventuelle amélioration de leur sort, est souvent de mise parmi les 900 détenus.

"Je suis content de ce qui est arrivé à Rahaf, mais je ne pense pas que cela change grand chose pour nous. Elle vient d'Arabie saoudite, d'une famille riche, et nous nous n'avons rien", relève Ahmed, un Somalien de 25 ans, dont le prénom a été changé pour des raisons de sécurité.

Arrivé en Thaïlande en juin 2015, il a obtenu en septembre 2016 le statut de réfugié.

"La situation est bloquée depuis des mois. Le plus dur c'est la promiscuité: nous sommes plus de 100 dans notre cellule. On doit se coucher sur le flanc ou souvent on dort à tour de rôle", ajoute-t-il.

Le traitement pour Rahaf "a été si rapide", s'étonne de son côté Shamim, qui a fui le Pakistan après s'être convertie au christianisme pour se marier. Elle et son époux -qui se trouve en centre de détention- ont obtenu le statut de réfugiés en Thaïlande il y a deux ans, mais depuis rien n'a changé.

Après ce qui est arrivé à la jeune Saoudienne, "si j'appelle le HCR, ils vont me dire qu'il faut encore attendre, que nos cas ne sont pas comparables", s'inquiète-t-elle.

Surachate Hakparn renvoie d'ailleurs la balle dans le camp de l'agence onusienne, lui demandant d'accélérer le traitement des dossiers, faute de quoi, les demandeurs d'asile "devront continuer à vivre dans l'anxiété et passer six à sept ans ici".

Du côté du HCR, on estime être plus efficace.

"Fin 2014, il y avait en Thaïlande plus de 7.000 demandeurs d'asile en attente de l'éventuelle obtention du statut de réfugiés, ils sont moins de 1.000 actuellement, notamment car nous avons pu augmenter notre capacité de traitement", relève Jennifer Harrison.

- Moins de 1% -

Mais elle rappelle que "moins de 1% des réfugiés dans le monde sont envoyés vers un pays tiers", ajoutant que "le nombre de places disponibles continue de diminuer".

Lama, une Syrienne de 33 ans, a fui son pays, enceinte de jumeaux, il y a quatre ans. Après avoir obtenu le statut de réfugiés en Thaïlande, elle et son mari ont été dénoncés car leurs visas avaient expirés, puis placés en détention, sans leurs enfants.

Début janvier, "après avoir vécu l'enfer", ils ont décidé de renoncer à leur demande d'asile et de rentrer en Syrie. "Nous ne quittons presque jamais la maison par peur pour notre sécurité, mais au moins, nous sommes ensemble", raconte-t-elle depuis Damas à l'AFP.

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