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Après le piratage d'un oléoduc, la peur d'une pénurie dans les stations-service américaines

La peur d'une pénurie d'essence après l'attaque informatique d'un important réseau d'oléoducs aux Etats-Unis a provoqué mardi de longues files d'attentes dans certaines stations d'essence, poussant les autorités à prendre des mesures d'urgence pour faciliter l'approvisionnement et éviter la panique.

Colonial Pipeline, qui transporte près de 45% des carburants consommés sur la côte est du pays, s'active à rétablir l'essentiel de ses activités "d'ici la fin de la semaine".

Confirmant cet objectif, la ministre de l'Energie Jennifer Granholm a assuré mardi qu'il n'y avait "pas de raison de faire des réserves de carburant". C'est un "problème d'approvisionnement, pas une "pénurie d'essence", a-t-elle martelé depuis la Maison Blanche.

Le gouvernement a pris plusieurs mesures d'urgence pour temporiser.

Mais certains conducteurs craignent malgré tout de manquer et se dépêchent de remplir leur réservoir, en particulier dans le sud-est des Etats-Unis.

"Les gens regardent les infos et prennent peur", raconte le gérant d'une station Exxon à Raleigh, une grande ville de l'est du pays, qui n'a pas souhaité donner son nom. "Ils remplissent des bidons d'essence."

Même si sa station été de nouveau approvisionnée il y a deux jours, ses huit pompes fonctionnent à plein et il s'attend à être à sec dans la soirée.

La ministre de l'Energie a assuré que les autorités n'auraient "aucune tolérance" pour les commerçants qui voudraient profiter de la situation en faisant grimper les prix.

- Calme sur les marchés -

Selon un analyste du site spécialisé dans le suivi des prix de l'essence GasBuddy, environ 8% des stations services en Virginie, 10% en Caroline du Nord et 7% en Géorgie étaient à court de carburant en fin d'après-midi.

Et le prix moyen dans le pays d'un gallon d'essence (3,79 litres) est à 2,99 dollars, "son plus haut niveau depuis 2014", affirme Patrick De Haan en rappelant que le coût d'un plein est en forte hausse depuis que l'économie américaine a commencé à rebondir.

Les spécialistes du marché pétrolier ne s'affolent pas: le prix du contrat d'essence de référence coté à New York a bien temporairement grimpé dimanche soir, mais il est depuis redescendu sous son niveau de vendredi, avant l'annonce de la cyberattaque.

"Les informations selon lesquelles des maisons de courtage sont en train de réserver des cargaisons d'essence en provenance d'Europe maintiennent le calme" sur le marché de l'or noir, avance Phil Flynn, de Price Futures Group.

- Exemptions pour les camions -

Selon la police fédérale américaine, le piratage informatique a été mené par le groupe criminel Darkside qui a utilisé un rançongiciel, ou "ransomware", un programme qui exploite des failles de sécurité pour encrypter les systèmes informatiques et exiger une rançon pour les débloquer.

Il a touché le plus grand opérateur d'oléoducs pour produits raffinés dans le pays, qui transportent de l'essence et du diesel sur plus de 8.800 km à travers les Etats-Unis, depuis les raffineries installées sur la côte du Golfe du Mexique autour de la métropole texane de Houston jusqu'au nord-est des Etats-Unis dans la région de New York.

Pour atténuer les perturbations, les autorités américaines ont autorisé dès dimanche soir les chauffeurs routiers transportant des produits raffinés à travailler plus longtemps qu'habituellement.

Mardi, l'Agence de protection de l'environnement (EPA) a "accordé une dérogation temporaire pour assurer qu'un approvisionnement adéquat en essence soit disponible dans les zones touchées".

Cette dérogation, qui permet d'assouplir temporairement la réglementation environnementale dans les zones urbaines, est valable jusqu'au 18 mai et concerne la capitale fédérale Washington, ainsi que les Etats du Maryland, de Pennsylvanie et de Virginie, détaille l'EPA.

Les gouverneurs de Géorgie, de Caroline du Nord et de Virginie ont pour leur part déclaré l'état d'urgence afin de faciliter l'approvisionnement, en levant par exemple les limites de poids pour les camions transportant du carburant.

Le ministère des Transports envisage aussi d'éventuellement lever certaines obligations pour faciliter l'acheminement de pétrole par navire depuis le golfe du Mexique.

Colonial Pipeline continue pour sa part à rouvrir progressivement des lignes latérales opérées manuellement, selon un communiqué diffusé mardi soir.

Elle assure avoir écoulé l'équivalent de 967.000 barils (environ 41 millions de gallons) depuis l'interruption de ses services et a mis de côté 2 millions de barils prêts à être envoyés dans les oléoducs dès que le système aura complètement redémarré.

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