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Argentine : le grand rabbin agressé après la profanation d'un cimetière juif

Le grand rabbin d'Argentine a été grièvement blessé par des inconnus à Buenos Aires, au lendemain de la profanation d'un cimetière juif, une agression condamnée mardi par Israël sur fond de résurgence d'actes antisémites dans le monde.

Gabriel Davidovich, âgé de 56 ans, se trouvait à l'intérieur de sa maison dans un quartier résidentiel de Buenos Aires avec son épouse, quand sept hommes y ont fait irruption lundi à l'aube.

Après les violences dont il a été victime, il a été hospitalisé avec des côtes brisées et un poumon atteint.

"La communauté est en état de choc, très préoccupée. Il faut que les autorités fassent en sorte que cela ne se reproduise pas", a déclaré à l'AFP Tomy Saieg, un ancien président de l'AMIA, l'Association mutuelle israélite argentine. Il n'a pas caché son étonnement car les juifs d'Argentine vivent habituellement à l’abri de l'antisémitisme existant dans d'autres pays.

"Nous savons que vous êtes le rabbin de l'AMIA", ont lancé les assaillants, avant de dérober de l'argent et des effets personnels, puis de prendre la fuite, selon un communiqué de cette association dont le siège avait été la cible il y a 25 ans d'un attentat terroriste.

L'Argentine abrite la deuxième communauté juive du continent américain, derrière celle des Etats-Unis. Elle compte à l'heure actuelle 190.000 membres contre 300.000 il y a 20 ans, la crise économique de 2001 ayant conduit de nombreux juifs argentins à s'exiler.

Le président de la DAIA, qui rassemble les institutions juives d'Argentine, Jorge Knoblovits, a quant à lui dénoncé "un acte antisémite" dans un pays où ils sont peu fréquents. "Dans le monde, il y a beaucoup de place pour l'ignorance et, là où il y a de l'ignorance, il y a un espace pour les antisémites", a-t-il regretté.

"Alors qu'il n'offrait aucune résistance au vol, ils l'ont jeté à terre, lui ont cassé neuf côtes et l'ont défiguré", a précisé M. Knoblovits.

- "Sous-monde antisémite" -

Les autorités ont ouvert une enquête pour identifier les agresseurs.

"Ils étaient bien renseignés, ils savaient qu'il était revenu de voyage trois jours plus tôt. Ils l'ont vu et ont commencé à le frapper, relève Tomy Saieg. Nous savons que l'Argentine n'est pas un pays antisémite, mes enfants vont à l'école avec la kippa et, dans la rue, personne ne leur dit rien. Mais il y a un sous-monde où l'antisémitisme est vif".

L'ancien président de l'Amia exprime un paradoxe entre la quiétude du quotidien des juifs argentins et des faits indiscutables. "Il ne faut pas oublier que l'Argentine a reçu des nazis en fuite et que deux attentats ont été commis sur son sol".

Sergio Blanck, un chef d'entreprise de 60 ans vivant à Buenos Aires, se dit "surpris" par l'agression du rabbin. "Des cas d'antisémitisme isolés, il y en a, mais je n'ai jamais eu la sensation qu'il y avait de l'antisémitisme en Argentine, ni à l'école, ni au service militaire, ni avec mes ouvriers à l'usine. Les attentats, ils étaient plus dirigés contre Israël".

- Attentats de 1992 et 1994 -

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a souhaité au rabbin et à sa femme "un prompt rétablissement". "Nous ne devons pas laisser les antisémites redresser la tête. Je condamne fermement les récents actes d'antisémitisme et j'appelle la communauté internationale à agir", a-t-il déclaré.

Cette agression est intervenue juste après la profanation de neuf tombes dans un cimetière juif de la province de San Luis au cours du week-end. Des pierres tombales y ont été détruites.

Un dirigeant politique local, Ariel Braverman, a condamné un "acte horrible de néonazisme, d'intolérance et de haine" découlant d'"un obscurantisme médiéval".

Dans le passé, la communauté juive de Buenos Aires a été durement mise à l'épreuve par deux attentats sanglants.

En 1992, 29 personnes sont mortes quand l'ambassade d'Israël a été soufflée par l'explosion d'une voiture piégée. En 1994, le bâtiment abritant les institutions juives, dont l'AMIA, a été pulvérisé par une bombe, un attentat qui a fait 85 morts et des centaines de blessés.

Les juifs d'Argentine avaient été traumatisés par ces deux attaques, attribuées à l'Iran, mais le quotidien tranquille d'une communauté bien intégrée avait pris le dessus.

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