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Armes à feu, climat: une nouvelle génération monte au créneau

David Hogg se bat pour le contrôle des armes à feu aux Etats-Unis, Greta Thunberg pour la défense du climat en Europe: ils sont adolescents mais déjà connus dans le monde entier pour leur engagement, symboles d'une génération qui semble prête à renouer avec le militantisme.

David Hogg, 18 ans, fait partie des figures de proue du mouvement "March For Our Lives" ("Marche pour nos vies"), lancé par des lycéens de Parkland (Floride) après la fusillade qui a fait 17 morts dans leur établissement le 14 février 2018.

Le mouvement, qui entend pousser les élus à durcir la législation sur les armes à feu, a mobilisé des centaines de milliers de jeunes Américains.

Greta Thunberg, une Suédoise de 16 ans, s'est imposée ces derniers mois comme le nouveau visage de la lutte contre les dérèglements climatiques, entraînant des foules de jeunes dans son sillage en Europe.

Celle qui avait commencé en manifestant seule devant le Parlement suédois est désormais citée pour le prix Nobel de la Paix 2019.

Si elle l'obtenait, elle serait la plus jeune lauréate, devant la Pakistanaise Malala Yousafzai, Nobel de la Paix en 2014, à 17 ans, pour sa lutte pour le droit à l'éducation.

- "Penchant pour l'engagement" -

Certains sont encore plus précoces dans leur engagement, comme l'Américaine Alice Paul Tapper: son appel fin 2017, à 10 ans, à "Lever la main" ("Raise Your Hand") pour encourager les filles à ne pas se laisser intimider a enflammé les réseaux sociaux, grâce à l'aide de sa troupe de scouts et de son père, célèbre journaliste de CNN.

Un livre dans lequel elle raconte son parcours, sorti cette semaine, s'annonce comme un succès de librairie.

Selon plusieurs experts, ces exemples illustrent un regain d'engagement de la jeunesse qu'on n'avait pas vu depuis un moment, avec notamment la mobilisation pour les droits civiques du "Freedom Summer" de 1964 comme grand repère historique.

Si jeunesse a toujours été synonyme de contestation, il y a eu "une, presque deux générations où on voyait peu de militantisme", souligne Elizabeth Matto, qui étudie l'engagement des jeunes à l'université Rutgers.

"Les adolescents de ce qu'on appelle la génération Z ont un vrai penchant pour faire entendre leurs voix", dit-elle.

Selon elle, ils "commencent à réaliser qu'ils sont une force avec laquelle il faut compter. (C'est) une génération qui veut améliorer les choses et ne voit pas son âge comme un obstacle."

Et de citer pour preuve la hausse de la participation des 18-29 ans aux législatives américaines de novembre: quelque 31% d'entre eux ont voté, le taux le plus élevé depuis 25 ans, selon le Centre sur l'engagement citoyen de l'université Tufts.

Plus éduquée que les précédentes, maîtrisant parfaitement les réseaux sociaux avec lesquels elle a grandi, cette génération a des facilités à "monter une organisation et à attirer l'attention", souligne Sam Abrams, professeur au Sarah Lawrence College.

Capables de créer des vidéos de qualité cinéma, dit-il, les adolescents "peuvent partager leurs histoires très efficacement, on voit ça dans le monde entier".

David Hogg reconnaît que même sans les réseaux sociaux les lycéens de Parkland "auraient pu s'organiser, mais pas à la même échelle". Il est suivi par 950.000 personnes sur Twitter.

- Tenir la distance

Mais les réseaux ont beau permettre d'attirer l'attention, ils sont loin de garantir que cette génération obtiendra des changements substantiels, souligne Sam Abrams.

"La grande question est: peuvent-ils maintenir durablement leur mobilisation?", dit-il, relevant que les changements sociétaux, "ça prend des années".

D'autant que, selon lui, des étudiants engagés perdent souvent leur élan après le départ de certains camarades, ou l'obtention d'un diplôme.

Zanagee Artis, 19 ans, qui a co-fondé en 2018 la coalition "Zero Hour" pour le climat et la justice environnementale, reconnaît qu'après des mois d'activisme intense, il s'est désengagé de la plupart de ses responsabilités après avoir intégré l'université Brown.

"Les plus vieux comme moi, on a moins de temps" à consacrer à l'organisation, dit cet étudiant en sciences politiques et environnement.

"Mais je n'ai aucun doute que Zero Hour pourra continuer: avec les réseaux sociaux, on touche beaucoup plus de jeunes qu'avant, il y aura toujours des gens prêts à se mobiliser".

David Hogg reconnaît aussi qu'après avoir pris une année de césure pour sillonner le pays, il s'apprête à lever le pied pour entrer à l'université de Harvard.

Il se dit pleinement conscient des années qu'il pourrait falloir avant d'arriver à limiter les armes à feu aux Etats-Unis: "Il faudra peut-être attendre que candidatent au Congrès (des gens) qui sont encore enfants aujourd'hui", dit-il.

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