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Les leaders mondiaux célèbrent l'armistice à Paris, Macron dénonce une paix en danger

Plus de 70 chefs d’État et de gouvernement, dont les présidents américain et russe, ont commémoré en grande solennité le centenaire de l'armistice dimanche à Paris, l'occasion pour Emmanuel Macron de dénoncer le nationalisme cher à Donald Trump.

Plusieurs chefs d’État ont profité de cette journée symbolique pour mettre en garde contre les risques de guerre, ravivés selon eux par la remise en cause croissante du modèle multilatéral, socle des relations internationales depuis l'après-guerre.

Sur la tombe du soldat inconnu de la Grande guerre, Emmanuel Macron, grand ordonnateur de cette commémoration hors-norme, a mis en avant le patriotisme et dénoncé le "nationalisme", dont se réclame Donald Trump, principal contempteur de l'ordre mondial multilatéral.

"Le patriotisme est l'exact contraire du nationalisme. Le nationalisme en est sa trahison", a affirmé le président français pendant la cérémonie solennelle dimanche matin, point d'orgue pour Emmanuel Macron, après une semaine de commémorations en France.

Sous une pluie fine, Donald Trump, Angela Merkel, Vladimir Poutine, Benjamin Netanyahu, Recep Tayyip Erdogan, Justin Trudeau, Mohammed VI se sont réunis sous l'Arc de Triomphe, en haut de la célèbre avenue des Champs-Élysées, sous lequel gît le soldat inconnu et brûle perpétuellement la flamme du souvenir, rappelant l'ampleur d'un conflit aux 18 millions de morts.

Après les honneurs militaires, le célèbre violoncelliste Yo-Yo Ma a joué du Bach, des lycéens ont lu des témoignages de 1918, et la chanteuse béninoise Angélique Kidjo a chanté en hommage aux troupes coloniales, avant qu'Emmanuel Macron ne conclue en ravivant la flamme.

- "Je suis là pour lui" -

"C'est une très belle cérémonie, très émouvante", a commenté au côté de son fils de 3 ans Jessie Rumbaugh, 25 ans, originaire de l'Idaho aux États-Unis, venue spécialement pour le centenaire, célébré aussi en d'autres points du globe, en Australie, en Inde, ou à Londres.

"Mon grand-père a fait la Première Guerre mondiale", expliquait non loin Nevan Lancaster, Néo-zélandais de 47 ans. "Il est mort quand j'avais 8 ans. Je suis là pour lui".

Après un déjeuner au palais de l’Élysée (au cours duquel Donald Trump et Vladimir Poutine ont eu un échange informel assez long sur les dossiers diplomatiques mondiaux, les dirigeants se sont rendus dans l'Est parisien pour participer au Forum sur la paix, deuxième temps fort de cette journée et nouvelle occasion pour le camp du multilatéralisme de dire le mal qu'il pense des vents nationalistes qui soufflent un peu partout sur le monde.

Mais sans Donald Trump, qui lui est allé au cimetière américain de Suresnes, en banlieue parisienne, pour rendre hommage à ses concitoyens tombés au champ de bataille, au lendemain d'un rendez-vous manqué à Bois Belleau, haut lieu de la mémoire militaire américaine pendant la Première Guerre mondiale.

Le déplacement du président à ce mémorial avait été annulé à cause de la météo empêchant l'hélicoptère présidentiel de voler, suscitant de vives critiques aux Etats-Unis. Sous la pluie, le locataire de la Maison Blanche a "rendu hommage" dimanche aux "courageux Américains qui ont donné leur dernier souffle", avant de regagner l'aéroport dans l'après-midi.

Auparavant, environ 1.500 personnes s'étaient réunies dans le calme à Paris pour dénoncer sa présence. En revanche, incident notable et rarissime, trois militantes Femen ont réussi dimanche matin à forcer la sécurité sur les Champs-Elysées pour s'approcher du convoi de Donald Trump, avant d'être interpellées.

"La sécurité du cortège et du président des États-Unis n'a été en rien menacée", a assuré le ministre français de l'Intérieur, Christophe Castaner alors que le dispositif de sécurité était massif, avec quelque 10.000 membres des forces de l'ordre déployés. La dernière fois que Paris a accueilli autant de dignitaires remonte au 11 janvier 2015, après les attentats islamistes contre Charlie Hebdo et le magasin juif Hyper Cacher.

- "Années 30" -

Au Forum pour la paix, dans une ambiance à la mi-chemin entre un Forum de Davos et un sommet de la COP, plusieurs des plus fervents défenseurs de l'ordre multilatéral ont plaidé pro domo devant une assistance globalement acquise, regroupant chefs d'Etat, d'organisations internationales et membres de la société civile.

Ils ont multiplié les mises en garde. Car si multilatéralisme et coopération offrent selon eux paix et progrès, nationalisme et unilatéralisme n'apporteraient que guerre et malheur.

"Bien des éléments aujourd'hui me semblent emprunter et au début du XXe siècle, et aux années 30, laissant craindre un engrenage invisible", a jugé Antonio Guterres, le secrétaire général de l'Onu.

"Nous voyons bien que la coopération internationale, un équilibre pacifique entre les intérêts des uns et des autres, et même le projet européen de paix sont de nouveau remis en question", a affirmé Mme Merkel.

Le président kenyan Uhuru Kenyatta a déploré "cette tendance d'un nombre croissant de pays au repli au lieu de chercher ensemble des solutions aux problèmes".

"Nous sommes fragilisés par les retours des passions tristes, le nationalisme, le racisme, l'antisémitisme, l’extrémisme, qui remettent en cause cet horizon que nos peuples attendent", a prévenu M. Macron.

Dans la foule des Champs-Élysées, le Néo-Zélandais Nevan Lancaster ne dit pas autre chose: "Nous entrons dans un futur plus incertain. Je ne pense pas qu'après 70 ans de paix, nous en aurons 70 de plus".

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