Accueil Actu

Au Cachemire pakistanais, les réfugiés craignent pour leurs familles côté indien

"Je m'inquiète pour ma famille" : les réfugiés du Cachemire indien vivant de l'autre côté de la frontière, au Cachemire pakistanais, disaient avoir peur pour leurs proches lundi après la révocation par l'Inde de l'autonomie constitutionnelle de la région, qui fait craindre de nouvelles violences.

Beaucoup parmi les quelque 250 habitants du camp de réfugiés de Manak Paiyan, près de Muzaffarabad, la plus grande ville du Cachemire sous contrôle pakistanais, ont fui les combats des années 1990. Mais tous conservent de la famille de l'autre côté de la Ligne de contrôle (LOC), la frontière de facto entre les deux pays.

Depuis des décennies, ils communiquent principalement par téléphone, et plus récemment par vidéo et appels WhatsApp. Mais l'Inde a coupé dimanche les télécommunications et interdit les "rassemblements et réunions publiques" dans cette partie du Cachemire.

Khadija Bibi dit avoir perdu son père il y a tout juste deux jours. Mais elle n'a depuis lors pas été en mesure de parler à sa famille. "Les routes sont fermées et nous n'avons aucun moyen d'y aller. Internet, téléphone, tout est coupé", regrette-t-elle.

Le gouvernement indien a annoncé lundi la révocation de l'autonomie constitutionnelle du Cachemire, une décision explosive qui vise à placer sous une tutelle plus directe de New Delhi cette région rebelle revendiquée par le Pakistan.

Cette mesure devrait exacerber la rébellion sanglante au Cachemire sous contrôle indien, qui a coûté la vie à plus de 70.000 personnes, principalement des civils, depuis 1989.

Elle devrait aussi renforcer l'animosité avec le Pakistan, qui comme l'Inde dispose de l'arme nucléaire et revendique l'autre moitié du Cachemire. Les deux voisins se sont déjà livré deux guerres pour ce territoire depuis leur partition en 1947, à la fin du joug colonial britannique.

- "Pas d'informations" -

"Je ne sais pas ce qui va se passer... Je m'inquiète pour ma famille. Je n'ai pas d'informations sur eux", peste Mohammad Altaf, 32 ans, qui se dit "très énervé".

Usman Hashim, qui a laissé les siens derrière lui lorsqu'il a fui au Pakistan en 1992, dit craindre que "quelque chose" puisse leur arriver. "Le monde devrait s'en rendre compte. (...) Ils devraient sauver la vie d'êtres humains", lance-t-il.

Quelque 38.000 réfugiés du Cachemire sous contrôle indien vivent dans des camps côté pakistanais, selon les autorités.

Les nationalistes hindous au pouvoir en Inde ont passé lundi un décret présidentiel abolissant un statut spécial de l'État du Jammu-et-Cachemire (nord), qui était garanti par la Constitution indienne et permettait à cette région de légiférer sur tous les sujets à l'exception de la défense, des Affaires étrangères et des communications.

Mais nombre d'habitants de cette région himalayenne à majorité musulmane sont hostiles à l'Inde et attachés à leur autonomie qui prévalait depuis les débuts de la république fédérale indienne il y a sept décennies.

En prévision de possibles troubles, les autorités indiennes avaient déployé ces dix derniers jours plus de 80.000 paramilitaires supplémentaires dans cette zone déjà hautement militarisée.

Pour Mohammad Yaseen Rana, le frère de Khadija Bibi, la décision indienne est l'étape "le plus cruelle" dans un conflit pourtant long et sanglant. Et d'affirmer : "nous n'accepterons jamais cela."

À lire aussi

Sélectionné pour vous