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Au procès du viol du "36", le portrait élogieux d'un accusé, bon policier et mari "galant"

Un très bon flic, un compagnon "galant", "pas machiste pour un sou" : un portrait élogieux d'un des deux policiers du "36" jugés pour le viol d'une Canadienne a été dressé vendredi aux assises de Paris, quitte à oublier des éléments bien plus difficiles à assumer.

Au cinquième jour du procès de deux policiers pour "viol en réunion", la cour s'est intéressée à la personnalité des accusés. Pour un expert psychiatre, Nicolas R., 49 ans, et Antoine Q., 40 ans, ne présentent pas de "trouble de la personnalité" et pas non plus de "trouble sexuel". Les deux hommes sont accusés d'avoir violé en avril 2014 une touriste canadienne, très alcoolisée, dans leurs bureaux au 36 quai des Orfèvres, après une soirée arrosée dans un pub.

L'enquêtrice de personnalité a dressé, à partir des entretiens qu'elle a passés avec des proches et des collègues d'Antoine Q., un portrait flatteur, un peu lisse, de celui-ci.

"Il n'est pas machiste pour un sou" et pour lui "la femme est l'égale de l'homme", a assuré un ami à cette enquêtrice. "Il a été élevé dans le respect de la femme et de la mère".

Pour la compagne d'Antoine Q., avec qui il est depuis 2005 et avec laquelle il a un enfant, c'est "un homme très galant, élégant".

"C'est une femme hyper-courageuse. La preuve, c'est qu'elle me soutient", a dit, ému, l'accusé à la barre. Mais celle-ci, explique-t-il, n'est pas au courant de toute l'affaire, et en particulier de son infidélité. "Malheureusement, elle va savoir" après cette audience, admet-il.

L'accusé ne lui a pas parlé des baisers qui auraient été échangés avec Emily Spanton, la victime présumée du viol. Il a reconnu pendant l'enquête des caresses sexuelles dans la voiture, sur le chemin du "36", avec cette dernière. De cela non plus, il n'a pas parlé à sa compagne. Mais "je lui ai dit toute la vérité sur tout le reste", se défend-il.

- "Donner une chance" -

"Vous lui avez parlé de votre maîtresse ?", l'interroge le président. "Non", répond-il à voix basse. Antoine Q. a eu à deux reprises, à son bureau, des relations sexuelles avec une collègue rencontrée fin 2013. "Je voulais visiter les bureaux de l'anti-gang (l'ancien nom de la BRI) et en pleine nuit, nous avons couché ensemble au bureau", a raconté cette policière lors de l'enquête.

C'était, assure l'accusé, la première fois qu'il trompait sa femme et il n'a, à part cette fois là, "pas amené de femme au +36+ pour des relations sexuelles".

Les deux accusés ont été présentés comme de très bons professionnels. Antoine Q. a intégré en 2010 la BRI, la Brigade de recherche et d'intervention, un service d'élite pour lequel son père a oeuvré entre 1977 et 1984, et qui compte aussi son frère dans ses rangs. Pour lui, c'était "le Graal".

Après le viol présumé d'Emily Spanton, Antoine Q. a été suspendu puis sanctionné en conseil de discipline. "Mon monde s'est écroulé", raconte-t-il, évoquant une "torture permanente". Des chances d'intégrer la BRI, "je n'en aurai plus".

Nicolas R., divorcé, père de deux enfants, est lui entré à la BRI en 2002 et a ainsi réalisé un rêve de gosse. "Ses qualités professionnelles font défaut au service", écrivait un supérieur en septembre 2014, alors qu'il était suspendu. C'était un tireur d'élite, et sur une opération, il a sauvé au moins quatre collègues. "Il a grandement participé à élever le niveau de cette brigade", assure un de ses anciens chefs à la barre.

Il a rejoint en avril 2017 la Brigade de répression de la délinquance astucieuse, et traque notamment les escroqueries au bitcoin.

Antoine Q. a lui repris le travail en juillet 2017, à la Brigade d'exécution des décisions de justice, chargée de rechercher et interpeller des personnes condamnées qui se soustraient aux décisions de justice. "Il obtient de très bons résultats, il est apprécié", a expliqué à la cour sa nouvelle chef, qui a voulu "lui donner une chance".

Les deux accusés, qui comparaissent libres, encourent 20 ans de réclusion.

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