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Bellingcat, un site britannique à l'avant-plan de l'affaire Skripal

Bellingcat, le site internet d'investigation affirmant avoir découvert la véritable identité de l'un des suspects de l'affaire Skripal, est né de l'initiative d'un Britannique voulant décrire les types d'armes utilisées dans la guerre en Syrie, depuis le centre de l'Angleterre.

Le site de journalisme citoyen, spécialisé dans la collecte et l'analyse d'informations disponibles en ligne, a rapporté mercredi que l'un des deux hommes accusés par Londres d'avoir empoisonné l'ex-espion russe Sergueï Skripal et sa fille en mars en Angleterre est un colonel du renseignement militaire russe décoré de hautes distinctions, dont le vrai nom est Anatoli Tchepiga.

Après cette révélation, qui a fait les gros titres de la presse, Bellingcat en a promis d'autres dès la semaine prochaine. Précédemment, le site s'était penché sur la guerre en Syrie et avait pointé du doigt la responsabilité de soldats russes dans le crash du vol MH17, abattu en juillet 2014 dans l'est de l'Ukraine en guerre.

Les dernières révélations en date n'ont pas eu l'air de plaire à Moscou. La porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a estimé que le site était "proche des services secrets" et qu'il faisait "intentionnellement de la désinformation sous le couvert d'enquêtes".

Le moteur de Bellingcat, c'est son fondateur Eliot Higgins, 39 ans, un employé de bureau au chômage autodidacte, sans aucune formation en journalisme. Il s'est fait connaître grâce à ses enquêtes sur la guerre en Syrie, sous le nom de blogueur "Brown Moses". Il a été l'un des premiers à rendre compte de l'utilisation, par le régime syrien, de barils d'explosifs, en analysant des frappes aériennes au moyen de sources ouvertes.

- Villages brûlés -

Le nom "Brown Moses" est issu d'une chanson de Frank Zappa, mais Eliot Higgins a depuis longtemps renoncé à dissimuler son identité, notamment pour éviter le développement de théories du complot.

Il a fondé Bellingcat en 2014. Le site s'est fait un nom presque immédiatement avec son enquête sur le crash du vol MH17.

"Je voulais lancer un site qui rassemble de nombreuses personnes menant, comme moi, des enquêtes en ligne à partir de sources ouvertes, et fournir des conseils et études de cas pour que les gens puissent apprendre et le faire eux-mêmes", explique-t-il à l'AFP.

Le site internet explique comment analyser des données ainsi que les méthodes utilisées pour parvenir aux conclusions de ses enquêtes. Par exemple, comment identifier des villages brûlés par satellite, avec des études de cas en Californie, en Birmanie et au Nigeria.

Alimenté depuis un petit bureau à Leicester, dans le centre de l'Angleterre, le site Bellingcat s'appuie sur une équipe d'une quinzaine de personnes, dont onze enquêteurs, et 60 contributeurs. Il compte plus de 82.000 abonnés sur Twitter.

Son financement provient pour moitié de dons et subventions, et pour moitié d'ateliers de formation aux méthodes d'enquête "open source".

- Des gens pouvant "creuser" -

Selon Eliot Higgins, Bellingcat va au-delà de ce qu'offrent les médias traditionnels, bien que de grandes organisations médiatiques s'ouvrent davantage à ce type d'enquêtes.

"Il y a beaucoup de matériel vraiment utile, intéressant, tant que vous avez les gens qui peuvent creuser", soutient-il.

Le projet Skripal a été mené en partenariat avec le site d'investigation russe The Insider.

A une époque où les fausses informations (fake news) en ligne sont légion, Bellingcat se fait un point d'honneur à détailler ses sources. Dans le cas Skripal, le site explique ainsi comment ses enquêteurs ont conclu que l'un des suspects était le colonel Tchepiga.

Le point de départ de l'enquête, ce sont les photos des principaux suspects et leurs pseudonymes. Des recherches d'images ont été effectuées sur des moteurs de recherche en ligne, d'anciens officiers de l'armée russe ont été contactés, les photos d'un album de promotion d'une académie militaire passées en revue et des bases de données russes ayant fait l'objet de fuite analysées.

Les enquêteurs ont alors retrouvé un extrait de dossier de passeport au nom d'Anatoli Tchepiga et contenant une photo ressemblant au "Rouslan Bochirov" de la photo diffusée par Londres.

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