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Canada: la défense de la dirigeante de Huawei craint une extradition "politique"

L'un des avocats de la directrice financière du géant chinois Huawei, Meng Wanzhou, a dit craindre des "motivations politiques" derrière la demande américaine d'extradition de sa cliente, lors d'une audience mercredi devant un tribunal de Vancouver.

"Cela soulève de sérieuses préoccupations de nature juridique et factuelle (...). Il y a des préoccupations à caractère politique, sur des motivations politiques et (par rapport) à des commentaires du président américain", a déclaré Richard Peck devant la juge Heather Holmes, en rappelant que Donald Trump avait lié sur Twitter le cas de Mme Meng aux négociations commerciales entre Washington et Pékin.

L'arrestation de Mme Meng, le 1er décembre à Vancouver par les autorités canadiennes, sur demande américaine, a provoqué une crise sans précédent entre Ottawa et Pékin.

Lors d'une audience procédurale, la juge Holmes de la Cour suprême de Colombie-Britannique a fixé au 8 mai la prochaine comparution de Mme Meng, poursuivie aux Etats-Unis pour violations de sanctions contre l'Iran et vol industriel. Le ministère de la Justice, dans un communiqué, a ensuite précisé que l'examen sur le fond de la demande d'extradition commencerait à une date ultérieure, qui n'a pas encore été arrêtée.

Béret pourpre, veste à capuche violette et pantalon de yoga, la fille du fondateur du N.2 mondial des smartphones, a comparu une trentaine de minutes au tribunal, et ne s'est pas exprimée devant la presse.

En attendant, cette Chinoise de 47 ans demeure en liberté surveillée à Vancouver où elle possède deux demeures, alors que la Chine, qui a dénoncé un "incident politique grave", presse le Canada de la libérer sans tarder.

- Drapeau chinois brûlé -

Quelques dizaines de manifestants d'origine chinoise attendaient Mme Meng à l'extérieur du tribunal canadien, réclamant son "extradition" et dénonçant les "atteintes" aux droits humains en Chine. L'un d'eux a brûlé un drapeau de la Chine, a constaté une journaliste de l'AFP.

Le ministère américain de la Justice accuse Huawei et sa directrice financière d'avoir contourné les sanctions américaines contre l'Iran, mais aussi d'avoir, via deux filiales, volé des secrets industriels au groupe de télécoms américain T-Mobile.

Huawei a démenti avoir commis le moindre méfait et affirme n'avoir "pas connaissance d'actes répréhensibles de la part de Mme Meng" et être "persuadé que les tribunaux américains aboutiront à la même conclusion".

Après avoir étudié le dossier américain, le parquet canadien a conclu vendredi dernier qu'il existait "suffisamment de preuves à présenter devant un juge d'extradition pour une décision". Toutefois, a-t-il insisté, "la demande d'extradition n'est pas un procès".

La décision finale sur l'extradition ou non de Meng Wanzhou reviendra au nouveau ministre canadien de la Justice, David Lametti.

En parallèle à la demande d'extradition qu'ils combattent, les avocats de la directrice financière ont entamé une poursuite au civil contre les autorités canadiennes.

Ils dénoncent les "violations graves des droits constitutionnels" de Mme Meng lors de son arrestation et de son interrogatoire à l'occasion d'une escale à l'aéroport de Vancouver le 1er décembre, et réclament des dommages et intérêts.

Ses avocats contestent notamment les conditions dans lesquelles Mme Meng aurait été interrogée pendant trois heures par les douaniers, officiellement dans le cadre d'une inspection de routine, avant de se voir signifier son arrestation officielle. Les douaniers auraient fouillé ses téléphones et ordinateurs ainsi que ses bagages, en violation de ses droits selon ses avocats.

Mme Meng a été remise en liberté conditionnelle à la mi-décembre à Vancouver, moyennant le dépôt d'une caution de 10 millions de dollars canadiens (6,6 millions euros), le port d'un bracelet électronique et la remise de ses passeports.

Pékin voit dans cette affaire une tentative de miner son fleuron des télécoms, soupçonné par plusieurs services de renseignement occidentaux d'espionnage au profit de la Chine.

Depuis l'arrestation de Mme Meng, la Chine a arrêté deux Canadiens, dont un ancien diplomate qu'elle soupçonne d'espionnage, tandis qu'un tribunal chinois en a condamné à mort un troisième, mais Pékin assure que ces mesures sont sans lien avec l'affaire Huawei.

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