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Charlotte Adigéry, l'électro mystérieuse et métissée

L'artiste belge Charlotte Adigéry, de passage mercredi à Paris à l'occasion de sa tournée européenne, hypnotise avec ses boucles mystérieuses et métissées, et fait le pari qu'on peut rire en dansant.

Les frères Dewaele, rois belges de l'électro-rock avec leurs groupes Soulwax et 2 Many DJ's, l'ont fait éclore sur la bande originale du film "Belgica" en 2016.

Charlotte Adigéry développe une oeuvre entre Kassav, Soulwax et Lio, à l'image de son EP "Zandoli" paru en février. D'origine martiniquaise et guadeloupéenne, l'artiste de 29 ans y marie l'électro avec la "soul" de sa voix et ses origines, entre biguine et gwoka. Sur l'addictif "Paténipat", elle chante en créole.

"Ce qui m'intrigue beaucoup dans cette nouvelle génération d'artistes qui ont des racines un peu partout, mais qui vivent en Europe ou en Amérique, c'est qu'ils combinent ces deux mondes qui nous ont fait", souligne l'artiste dans un entretien à l'AFP.

En passant du temps en studio avec son partenaire Bolis Pupul, d'origine chinoise, "on s'est dit qu'il y avait beaucoup à raconter aussi de cet héritage", explique la musicienne qui a grandi à Gand. "C'est assez délicat. Pour un Antillais, je suis belge, mais pour un Belge je suis antillaise. J'ai eu besoin de temps et d'un peu de courage pour oser combiner ces deux univers. Je pense l'avoir fait avec respect".

Charlotte Adigéry profite aussi de ses morceaux pour glisser de l'ironie sur le dancefloor. Comme dans "High lights", "une revanche pleine d'humour" contre les critiques sur ses incessants changements de style qui l'ont "heurtée".

- album en 2020 -

Elle se moque aussi de son accent en anglais, "un drôle d'hybride américano-flamand tiré des séries TV".

"C'est quelque chose que ma mère m'a toujours dit: il faut relativiser, avoir de l'autodérision, ça adoucit la souffrance", explique la musicienne. "Quand tu es rigide, tu tombes plus facilement".

Avec sa mère, chanteuse elle aussi, Charlotte Adigéry poursuit par ailleurs un projet de rocksteady (soul jamaïcaine). De passage mercredi dans la salle parisienne du Badaboum, elle prépare aussi un premier album pour 2020.

Synthétique, parfois drôle, son oeuvre est surtout très intime, à l'image de sa dernière cassette parue mi-octobre, "Yin Yang Self-Meditation". La musicienne y propose un recueillement de 17 minutes sur fond de battements de coeur, ouvrant son carnet intime.

"Pour vous relaxer, suivez-moi dans mon exploration de mes propres peurs", lance-t-elle à l'auditeur. "Enfant, j'ai rêvé que me suivaient des yeux de toutes formes et toutes couleurs. Mais il fallait que je continue à sourire: si j'arrêtais, les yeux me tuaient", raconte-t-elle dans sa méditation. "Pourquoi les intervieweurs me posent toujours les mêmes questions? Ce ne serait pas mieux si j'écrivais directement les réponses?", demande-t-elle ensuite.

"Ce qui m'intrigue et m'inspire dans la musique ou dans l'art, c'est la vulnérabilité", souligne Charlotte Adigéry. "Je ne voudrais pas être une artiste parfaite, waterproof. Je veux aussi montrer la recherche, les doutes, la souffrance. Toutes ces choses, qui font qu'on est humain, doivent s'entendre dans la musique".

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