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Chez PSA Mulhouse, des réfugiés reprennent pied grâce au travail

"C'est important le travail pour la vie": sur la ligne de montage de l'usine PSA de Sausheim (Haut-Rhin), Idriss et Saïd s'affairent. Après avoir côtoyé l'enfer au Darfour et en Erythrée, ces deux réfugiés prennent un nouveau départ grâce à un programme d'intégration par le travail.

Les gestes sont précis et rapides, le temps est limité : insertion du joint de capot, vissage des sièges... Dans le vacarme des machines, les véhicules se succèdent, et Saïd Abdelatif n'a pas de temps à perdre.

"C'est bien de travailler à l'usine, ça se passe bien pour moi", sourit le jeune Érythréen de 22 ans. En 2016, il a quitté son pays et connu le parcours chaotique commun à des centaines de milliers de migrants: traversée du Soudan et de la Libye, puis de la Méditerranée, "trois mois" ensuite à Calais, avant d’atterrir à Mulhouse.

Non loin, Idriss Nazar, un Soudanais de 28 ans, s'active sur la même ligne du site PSA, près de Mulhouse. Originaire de Nyala, au Darfour, il a traversé le Sahara dans une camionnette "sans toit", passé la Méditerranée sur un "bateau en plastique" surchargé, débarqué en Sardaigne pour enfin rallier la France.

Depuis début avril, ces deux réfugiés sont intérimaires sur le site d'assemblage alsacien de PSA, l'un des plus gros employeurs de la région (5.300 CDI et 1.400 intérimaires) qui produit notamment la 508 et la DS 7, deux véhicules "premium" de Peugeot.

- "Sur-mesure" -

Un premier contrat - avec, peut-être, une embauche à la clé - qui vient couronner des mois d'efforts à apprendre le français et à se former dans le cadre d'un programme national d'intégration des réfugiés, lancé en 2017 : HOPE ("espoir" en anglais), acronyme signifiant "Hébergement, orientation, parcours vers l'emploi".

Piloté par l'Etat via les préfectures, ce programme regroupe une kyrielle d'acteurs (Afpa, Pôle Emploi, organismes paritaires collecteurs...) et propose à des groupes d'une douzaine de stagiaires huit mois de formation mêlant accès à un logement, cours de langue et certification professionnelle dans des secteurs en tension (industrie, tourisme...)

Une cinquantaine de groupe HOPE sont actifs en France, indique une source préfectorale.

Fin 2019, quelque 3.000 réfugiés ou bénéficiaires de la protection subsidiaire auront profité de HOPE et 1.500 autres en bénéficieront en 2020, selon le secrétaire d'Etat à l'Intérieur Laurent Nuñez.

Axé sur l'industrie automobile - PSA oblige -, le groupe HOPE Mulhouse a rassemblé, entre septembre et mars, douze migrants d'Afghanistan, d’Érythrée, du Soudan et du Monténégro, âgés de 20 à 31 ans.

"L'idée (de) HOPE est de maximiser les chances d'intégration professionnelle" des réfugiés, résume Blaise Gourtay, chargé des affaires régionales et européennes à la préfecture du Grand Est. Dans la région, 61% des réfugiés qui sortent de HOPE bénéficient d'un CDI ou d'un CDD.

En gros, il s'agit de faire du "sur-mesure", explique Simon Bonanno, responsable d'Ocito, société de travail temporaire spécialisée dans l'insertion, partenaire du HOPE mulhousien.

- "Exemplaire" -

Afin de permettre aux réfugiés de se concentrer sur leur formation, Ocito a embauché Nadia Ben Henia, une assistance sociale, pour les aider dans leur vie quotidienne.

"Gérer sa paperasse administrative dans sa langue, c'est déjà compliqué alors (dans une langue étrangère), ça rajoute de la complexité", explique-t-elle.

Pour Idriss, Nazar et leurs dix camarades, le programme s'est achevé en mars avec deux semaines de formation chez PSA. Ensuite, le saut dans le grand bain.

Et un départ sur les chapeaux de roues, à en croire les cadres du site mulhousien.

"Ça se passe très, très bien, ils insufflent du dynamisme collectif" et apportent une "vraie valeur ajoutée sur le climat social", se réjouit Mélanie Heitz, responsable gestion et développement Ressources Humaines.

Chargé d'encadrer la formation, Frédéric Campillo salue leur "motivation" et "leur savoir-être exemplaire" tandis que Mathieu Hurth, directeur du montage, souligne leur "abnégation au travail" et leur "volonté de s'intégrer dans les équipes".

Travailler ici est "une grande chance pour moi", explique Saïd, qui confie avoir vécu des choses "très, très dures" durant son exode. "J'aime la France (...) j'ai envie (de) rester!", renchérit Idriss. "Le travail, c'est difficile, mais j'ai envie d'y arriver".

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