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Chine: retour à la case prison pour un vétéran de la dissidence

Le vétéran chinois de la dissidence Qin Yongmin a été condamné mercredi pour "subversion" à 13 ans de prison, la peine la plus lourde infligée à un opposant politique depuis l'arrivée au pouvoir du président Xi Jinping au début de la décennie.

Qin Yongmin, qui a déjà passé 25 ans de sa vie en prison ou en camps de "rééducation par le travail", a été de nouveau condamné par le tribunal intermédiaire de la ville de Wuhan (centre), a annoncé la cour sur son site internet.

Qin Yongmin, 64 ans, avait été arrêté en 2015 sous l'accusation d'avoir organisé un rassemblement illégal. Sa nouvelle peine semble la plus lourde infligée en Chine pour "subversion" depuis ces 15 dernières années, selon les registres judiciaires.

Lors de son arrestation, il dirigeait une association de défense des droits de l'Homme qui dénonçait la politique du gouvernement sur internet et organisait des forums de discussion.

L'acte d'accusation évoquait un texte dans lequel M. Qin appelait les jeunes Chinois à lutter pour les garanties légales offertes par les traités de l'ONU en matière de libertés fondamentales.

"En trois années d'enquête, les autorités ont été incapables de bâtir un dossier contre lui", a observé Frances Eve, de l'association de défense des droits de l'Homme Chinese human rights defenders.

Lors de son procès en mai, l'opposant "a refusé de coopérer avec la cour" et a observé un silence total, selon un de ses avocats, Lin Qilei.

Son autre avocat, Liu Zhengqing, a déclaré à l'AFP que Qin Yongmin était "désespéré" par sa condamnation et "furieux contre ce régime véreux". Le dissident "fera certainement appel", selon son défenseur.

- "Je fais ce que j'ai à faire" -

Qin Yongmin avait été libéré fin 2010 après avoir purgé une peine de 12 ans de prison pour avoir tenté en 1998 de déposer les statuts d'un "Parti démocrate chinois".

Cette initiative suivait la signature par Pékin du pacte de l'ONU sur les droits civils et politiques, un texte que le gouvernement chinois n'a depuis jamais ratifié.

A sa sortie de prison, il avait promis de continuer à se battre. "Je continuerai à défendre les droits de l'homme. Sans les droits de l'Homme il ne peut y avoir de démocratie. Je fais ce que j'ai à faire", avait-il déclaré par téléphone à l'AFP.

Sa condamnation survient au lendemain du départ pour l'Allemagne de Liu Xia, la veuve du dissident Liu Xiaobo, qui était placée de facto en résidence surveillée depuis que ce dernier a obtenu le prix Nobel de la paix en 2010.

Liu Xiaobo est mort il y a un an presque jour pour jour d'un cancer du foie alors qu'il était en détention médicale et purgeait toujours une peine de 11 ans de prison.

"Il est affligeant de voir qu'un vétéran de la dissidence qui n'a fait qu'exercer sa liberté d'expression est aussi lourdement condamné au lendemain de l'espoir suscité par la libération de Liu Xia, a déclaré Patrick Poon, d'Amnesty international.

L'Union européenne (UE) a également critiqué le régime chinois mercredi à la suite du "dialogue euro-chinois sur les droits de l'homme" qui s'est déroulé lundi et mardi à Pékin.

Dans un communiqué, l'UE dénonce "la détérioration des droits civils et politiques en Chine, qui s'accompagne de la détention et de la condamnation d'un nombre important de défenseurs chinois des droits de l'Homme".

L'Union européenne regrette que Pékin n'ait toujours pas ratifié le pacte onusien sur les droits civils et politiques.

Arrivé au pouvoir fin 2012, le président Xi Jinping s'est engagé à éliminer "toute menace de nature à saper" l'autorité du Parti communiste chinois.

Depuis, la condamnation la plus lourde pour "subversion" avait été infligée en décembre dernier au militant Wu Gan, qui avait écopé de huit ans de prison.

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