Accueil Actu

Cinq clés du premier tour de la présidentielle en Colombie

Le chef de la droite et ex-président Alvaro Uribe, opposé à l'accord avec l'ex-guérilla Farc, pèse encore en Colombie, où la gauche a toutefois enregistré une avancée inédite au premier tour d'une présidentielle marqué par une participation en hausse.

Voilà cinq clés du scrutin de dimanche, avant le second tour du 17 juin où les alliances seront déterminantes pour désigner le successeur du président Juan Manuel Santos, duquel dépendra la consolidation de la paix après plus d'un demi-siècle de guerre:

1. Le poids d'Alvaro Uribe

Ivan Duque, dauphin de l'actuel sénateur Uribe, est arrivé en tête avec 39,14% des voix, devant ce résultat essentiellement à la popularité de son mentor.

Le scrutin "montre l'importance qu'a encore l'uribisme", a ainsi déclaré à l'AFP Andrés Macias, de l'Université Externado.

Pour la troisième fois, l'ancien chef d'État (2002-2010), chantre du secteur privé, des valeurs traditionnelles et d'une main de fer contre les guérillas, a réussi à se placer au coeur du débat présidentiel.

En 2010, il avait soutenu Juan Manuel Santos. Quatre ans après, en rupture avec son successeur de centre-droit, il avait propulsé Oscar Ivan Zuluaga, vaincu toutefois au second tour. Aujourd'hui, il mise sur son nouveau protégé pour voir la droite récupérer la présidence.

2. Le pari des alliances

Les alliances joueront un rôle clé le 17 juin.

Ivan Duque s'est imposé en tandem avec l'ex-ministre conservatrice Marta Lucia Ramirez pour la vice-présidence, et avec l'appui des évangélistes ainsi que de l'ultra-droite.

Dimanche soir, il a paru tendre la main à l'ancien vice-président de centre-droit, German Vargas Lleras (4e avec 7,2%), dont le parti est la troisième force au Congrès.

De son côté, la candidat de gauche Gustavo Petro, arrivé 2e avec 25,08% des voix, espère compter sur les centristes divisés au premier tour.

Mais ni l'ancien maire de Medellin, Sergio Fajardo (3e avec 23,7%), ni l'ex-négociateur de l'accord de paix Humberto de la Calle (2,06%) ne lui ont assuré leur appui. Il pourra peut-être séduire les abstentionnistes malgré tout encore nombreux.

"L'alliance que va très rapidement chercher Duque sera avec Vargas Lleras, tandis que Fajardo et De la Calle seront difficiles à rallier", a averti le politologue Sebastian Bitar de l'Université des Andes.

3. Le facteur paix

Le pacte historique avec la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), convertie en parti politique, est en jeu.

"Duque propose de modifier une partie substantielle de l'accord de paix" signé en 2016, notamment le volet sur la justice, souligne l'analyste Nicolas Liendo, de l'Université Sergio Arboleda.

Le candidat de droite veut voir les anciens rebelles impliqués dans des crimes graves en prison et interdits de participation politique.

Pour cela, il pourrait bénéficier de l'appui de 48% du Congrès et n'aurait qu'à convaincre quelques membres d'autres partis pour amender le pacte.

Il reste au Parlement à voter sur le système qui jugera les ex-guérilleros et les militaires responsables de crimes pendant la confrontation armée, et à impulser la réforme agraire, colonne vertébrale de l'accord.

Ivan Duque veut aussi réviser le dialogue entamé avec l'Armée de libération nationale (ELN), dernière guérilla du pays.

Gustavo Petro a assuré qu'il honorerait l'accord de paix et est favorable aux pourparlers avec l'ELN, mais il n'a qu'un soutien minoritaire au Congrès.

4. Succès de la gauche

C'est la première fois que la gauche parvient aussi loin à une présidentielle dans ce pays traditionnellement gouverné par la droite.

L'ancien maire de Bogota et ex-guérillero du M-19 dissout, Gustavo Petro, 58 ans, a rallié plus de 4,8 millions de voix. Cela lui permet de prétendre disputer le fauteuil présidentiel à Ivan Duque.

Jusqu'à ce dimanche, le meilleur score de la gauche à un tel scrutin avait été de 2,6 millions de voix pour le défunt Carlos Gaviria, battu en 2006 par Uribe dès le premier tour.

Mais le candidat anti-système pâtit d'une image négative due à ses sympathies envers le chavisme vénézuélien.

"Dans la dernière étape de la campagne, des forces ont parié sur Fajardo pour affaiblir la candidature de Petro, et si cela se maintient, la gauche ne pourra rien faire", estime l'analyste Medofilo Medina, de l'Université Nationale.

5. Participation dépassant 50%

Dans ce pays de 49 millions d'habitants, la participation peine généralement à atteindre les 50%.

Dimanche, elle a été de 53,29% avec 19,6 millions des 36 millions d'électeurs.

Au premier tour de 2014, ils avaient été 13,2 millions, puis 15,7 millions au second.

"Il y a une augmentation de la participation, mais l'abstention reste élevée. Il faut voir si cela peut bouger en faveur de la candidature de Petro", a ajouté M. Medina.

À lire aussi

Sélectionné pour vous