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Cyclone en Afrique australe: des milliers encore à secourir

Bloquées sur des toits ou affamées dans des zones inondées à perte de vue, des milliers de personnes attendaient anxieusement des secours encore trop lents à se déployer après le passage la semaine dernière du cyclone Idai en Afrique australe.

Près de 400 morts, plus de 10.000 habitations détruites, des centaines de milliers de personnes touchées: au Mozambique et au Zimbabwe, le bilan du cyclone, des inondations et glissements de terrain a continué de grimper jeudi alors que les humanitaires mettaient en garde contre le risque d'épidémie de choléra.

Au Mozambique, 15.000 personnes doivent être "secourues immédiatement", a prévenu le ministre de l'Environnement Celso Correia. "Elles sont bloquées sur des maisons, sur des toits", a-t-il expliqué à l'AFP depuis Beira (centre), la deuxième ville du pays, dévastée par le cyclone. "Elles sont en vie (...) mais on a besoin de les secourir, de les sortir de là".

"Chaque minute compte", a-t-il insisté, alors que des "milliers d'autres sont bloquées sur des zones plus élevées, sur des petites îles".

Pour la Fédération internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR), il s'agit de "la pire crise humanitaire dans l'histoire récente du Mozambique".

Dans le village de Praia Nova (centre) en ruines, Juila Luis a tout perdu. "Les autres années, j'ai connu des tempêtes mais c'est la première fois que je vois ça", dit cette mère de trois enfants. "Je dois recommencer ma vie".

- 'Recommencer ma vie' -

Au moins 242 personnes sont mortes au Mozambique et 139 au Zimbabwe, selon des sources officielles.

Plus de 180.000 personnes sont affectées par ces catastrophes au Mozambique, selon Maputo. L'ONU estime qu' 1,7 million de personnes auront au final besoin d'aide dans ce pays très pauvre.

Au Zimbabwe voisin, elles sont 200.000 touchées par ce désastre naturel, selon les Nations unies.

Le président Emmerson Mnangagwa a décrété jeudi soir un deuil national de deux jours, alors que 189 personnes sont toujours disparues, dont 30 élèves.

A Rusitu, dans le district de Chimanimani (est), "j'ai vu un désespoir total, d'énormes rochers qui ont englouti un marché de bananes et même un commissariat. Des policiers et des prisonniers ont été emportés, avec des bâtiments publics et des maisons privées", a-t-il déclaré de retour à Harare jeudi.

Les conditions à Chimanimani restent "très mauvaises", selon le porte-parole du Programme alimentaire mondial (PAM), Hervé Verhoosel. "Environ 90% du district a été endommagé de façon importante", a-t-il ajouté.

Un reporter de l'AFP a découvert un district coupé du reste du monde. Au moins huit ponts et une centaine de maisons ont été détruites dans cette région montagneuse, les routes englouties, un paysage comparé à une "zone de guerre" par le ministre zimbabwéen de la Défense Perrance Shiri.

Mais les secours, qui ont reconnu avoir été pris au dépourvu par l'ampleur des pluies qui ont suivi le cyclone, restent encore trop lents.

Mercredi, ils ont réussi à sauver au Mozambique quelque 3.000 personnes bloquées sur des landes étroites entourées d'eau, sur des toits ou sur des arbres.

Mais ils peinent à répondre aux besoins énormes.

A Buzi, des rescapés tentent de survivre coincés sur des toits et sur les gradins de stade. A Beira, des dizaines de personnes affamées ont pillé un entrepôt de riz. "Nous n'avons rien mangé", expliquait, à Paria Nova, Mariamo Humberto.

"Cela fait des jours que de nombreuses personnes attendent aide et soutien", reconnaît Jamie LeSueur du FICR.

"La réponse humanitaire commence vraiment à monter en puissance. C'est encourageant mais il en faut plus, on fait tout ce qu'on peut pour acheminer des ressources et atteindre toujours davantage de monde."

A Dondo (30 km au nord-ouest de Beira), la colère de rescapés venus la faim au ventre jeudi à une distribution de nourriture du PAM était palpable. La désorganisation régnait, selon un journaliste de l'AFP.

Et les maladies transmissibles par l'eau inquiètent les secours.

- Risques de choléra -

"Le déplacement d'un grand nombre de personnes et les inondations provoquées par le cyclone Idai augmentent significativement les risques de paludisme, de typhoïde et de choléra", a prévenu Matshidiso Moeti, directeur régional pour l'Afrique de l'Organisation mondiale pour la santé (OMS).

"La réponse d'urgence va être fondamentale pour éviter une propagation et apporter à la population le soutien de base", confirme Jamie LeSueur.

Or à Beira, ville d'un demi-million d’habitants, le principal hôpital, dont la toiture a été partiellement endommagée, ne peut fonctionner qu'à 40% de ses capacités.

Pendant ce temps, la décrue s'est amorcée au Mozambique. "A certains endroits, le niveau de l'eau atteignait jusqu'à 11 mètres, il a baissé de trois mètres", selon Celso Correia.

La vie reprenait très progressivement son cours, des voitures circulaient sur certaines routes redevenues praticables. Le réseau téléphonique, totalement interrompu pendant plusieurs jours, fonctionnait de nouveau par intermittence.

L'arrivée du cyclone avait été précédé pendant plusieurs jours de très fortes pluies au Mozambique et au Malawi, faisant au moins 126 morts.

Le Malawi a été épargné par Idai mais les autorités ont prévenu jeudi qu'un barrage situé dans le sud du pays pourrait céder en cas de pluies violentes et continues. Elles ont appelé la population vivant en aval à se préparer à évacuer si nécessaire.

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