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Dans le quartier de Breonna Taylor, les plaies jamais refermées du racisme

"On se sent toujours menacé": dans le quartier de Louisville où vivait Breonna Taylor, tuée par des policiers finalement pas poursuivis pour cet homicide, les résidents disent subir depuis trop longtemps les abus ou le racisme des forces de l'ordre.

"Ils peuvent nous tuer et ils s'en sortent avec une tape sur la main", assure jeudi à l'AFP Marcus Reede, 52 ans, un gérant d'une échoppe de grillades qui a grandi dans ce quartier familial de cette ville du Kentucky. Cet Afro-Américain dénonce la clémence du procureur dont auraient bénéficié les agents qui ont tiré sur Breonna, une résidente de "South Louisville".

Un anneau doré à l'oreille gauche, il raconte avoir lui-même été brutalisé par les forces de l'ordre lorsqu'il était jeune. "Ils étaient cinq ou six, en train de me frapper et de sauter sur moi", se souvient-il, en retournant ses côtes de porc.

Mais a l'époque, regrette-t-il, "il n'y avait pas de caméras" pour filmer les violences. George Floyd, Jacob Blake... La captation d'images de brutalités policières a donné ces derniers mois un écho national à ces affaires et alimenté un mouvement historique contre le racisme.

La jeune Breonna Taylor vivait à quelques rues du restaurant de M. Reede, au milieu d'un lotissement en briques, typique des classes populaires américaines.

"Repose en paix ma jolie, je n'arrêterai pas de me battre tant que tes meurtriers n'auront pas ce qu'ils méritent", mentionne une des lettres déposée contre la terrasse de cet appartement du rez-de-chaussée, au milieu de fleurs et de bougies. "Je n'arrêterai jamais de crier ton nom".

Devant le numéro 4 où Breonna Taylor habitait avec son conjoint et sa soeur, une porte blanche est venue remplacer celle enfoncée par les policiers le 13 mars au petit matin.

Sur le paillasson voisin, un message glaçant: "Rien à l'intérieur d'ici ne vaut la peine de mourir."

- Peur de mourir -

La mort de Breonna Taylor, dont le nom est scandé dans des manifestations antiracistes à travers les Etats-Unis depuis des mois, a provoqué une onde de choc dans cette communauté "de travailleurs", "où on essaie de s'en sortir du mieux qu'on peut", selon les mots d'une riveraine, Lillie McBride. L'affaire a réveillé auprès de plusieurs Afro-Américaines la peur de subir le même calvaire.

"Avant, c'était les hommes noirs" seulement qui se faisaient brutaliser par la police, assure Mme McBride, 46 ans, emmitouflée dans un pull blanc. Cette Afro-Américaine dénonce "l'injustice" à laquelle elle est exposée en raison de la couleur de sa peau.

"Je me sens toujours menacée", abonde Taina Thomas, qui a côtoyé Breonna Taylor au lycée.

"Elle ne méritait pas ça", raconte-t-elle à propos de sa camarade, évoquant une personne "incroyable", "bosseuse", "au bon esprit".

Cette femme de 28 ans, deux ans de plus que la travailleuse hospitalière tuée à son domicile, dit échanger régulièrement avec ses amies sur cette angoisse que la mort de Breonna Taylor a ravivée. Et d'assurer: "Cela pourrait être n'importe laquelle d'entre nous".

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