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Décès de l'un des deux derniers survivants du massacre d'Oradour

L'un des deux derniers survivants du massacre par des SS d'Oradour-sur-Glane, qui avait fait 642 morts en juin 1944, Jean-Marcel Darthout, est décédé mardi à l'âge de 92 ans, a-t-on appris auprès du maire de la commune de Haute-Vienne.

Jean-Marcel Darthout était avec Robert Hébras, 91 ans, le dernier survivant du plus important massacre de civils perpétré par les nazis en France (642 morts, dont 247 enfants): un homme exemplaire "qui a oeuvré toute sa vie pour que personne n'oublie ce que la barbarie peut causer", a indiqué à l'AFP le maire Philippe Lacroix, confirmant le décès révélé par Le Populaire du Centre.

Le 10 juin 1944, les soldats de la division SS Das Reich remontant vers le front en Normandie avaient semé la mort sur leur passage à Oradour. Dans l'ancienne église, plus de 450 femmes et enfants avaient été enfermés et brûlés vifs. Séparés en groupes, les hommes, avaient été mitraillés dans des granges, avant que le village ne soit entièrement incendié.

M. Darthout, blessé par balles aux jambes et grièvement brûlé, n'avait dû son salut, comme M. Hébras, qu'au fait d'être tombé sous les corps de camarades. Laissés pour morts, ils avaient réussi à s'extraire de la grange malgré les flammes, et se cacher toute la journée. Six personnes avaient à l'époque survécu au massacre.

"J’ai toujours eu beaucoup de chance dans la vie, et ça a commencé ce jour-là", avait l’habitude de dire Jean-Marcel Darthout. Par pudeur, ou douleur, s'il n'avait jamais fait défaut au devoir de mémoire, il évitait de raconter par trop le drame. "Quand je raconte... c'est que j'y suis encore", confiait-il à l'AFP en 2013.

Celui qui, en 1944, écrivait dans un poignant témoignage sa "haine des Boches" avait évolué avec les années. "Je n’ai rien fait pour l'effacer mais le temps a passé, j’étais au procès de Bordeaux (en 1953, ndlr), j’ai vu les types qui étaient là, des pauvres types (…) et je n’ai plus eu de haine… Et puis aujourd’hui nous sommes en Europe. (…) Maintenant nous sommes amis avec l’Allemagne", déclarait-il sur RTL en 2013.

Cette année-là, MM. Darthout et Hébras avaient accompagné le président allemand Joachim Gauck avec François Hollande à Oradour, pour la première visite d'un dirigeant d'Outre-Rhin à travers les ruunes du "village martyr". L'ancien village d'Oradour n'a jamais été rebâti ou repeuplé, un nouveau a été construit un peu plus loin.

Camille Senon, ancienne militante syndicale et féministe de 93 ans, est aujourd'hui une autre témoin, rescapée indirecte, du martyre d'Oradour où elle perdit toute sa famille. Elle se trouvait à bord d'un tramway parti de Limoges, et stoppé à l'approche du village en flammes par les SS. Qui pourtant n'exécutèrent pas les passagers.

"Je savais Jean-Marcel Darthout fatigué, et pour autant je suis profondément touchée d’apprendre son décès. Les rescapés et familles de victimes partagent une proximité difficile à décrire ou à comprendre pour les personnes extérieures", a-t-elle commenté mardi, émue. "Je me souviendrai d’un homme tenace qui, tant qu’il en aura eu la force, s’est mis au service de la mémoire d’Oradour".

La commune d'Oradour, "en coordination avec l’association des familles de martyrs, et avec l’accord de ses proches" rendra à Jean-Marcel Darthout "un hommage appuyé lors de ses obsèques qui devraient se dérouler vendredi dans la petite église de Javerdat", a déclaré le maire mardi. Mais "le meilleur hommage à lui rendre, a-t-il insisté, est de promettre que les forces vives de la commune, les élus locaux, les associations mémorielles et la jeunesse continueront de porter témoignage et d’œuvrer pour la paix".

Jean-Marcel Darthout sera enterré à Oradour, où il avait fait préparer son caveau. "C'est là que je veux être, près de mes morts, près de ma mère et de ma femme", déclarait-il.

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