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Dégel germano-tuc en vue après la libération d'un journaliste

La justice turque a décidé vendredi de remettre en liberté un journaliste germano-turc emprisonné pour "terrorisme" depuis un an, levant un obstacle majeur sur la voie d'une amélioration des relations très tendues du pays avec l'Allemagne.

Selon l'agence étatique turque Anadolu, le journaliste, Deniz Yücel, a été remis en liberté conditionnelle sous la menace d'un acte d'accusation réclamant jusqu'à 18 ans de prison contre lui. Mais d'après Berlin, il va être autorisé quitter la Turquie et devrait donc pouvoir au final échapper à un procès.

"Je me réjouis fortement de cette décision de la justice turque et je me réjouis encore davantage pour Deniz Yücel et sa famille", a indiqué le ministre allemand des Affaires étrangères, Sigmar Gabriel, qui a été au centre des tractations politiques avec Ankara sur ce dossier ces derniers mois.

La détention du correspondant en Turquie du quotidien allemand depuis un peu plus d'un an était au coeur d'une brouille d'une ampleur sans précédent entre l'Allemagne et la Turquie, deux pays pourtant partenaires au sein de l'Otan et historiquement étroitement liés par la présence de 3 millions de Turcs en Allemagne.

- Départ en Allemagne? -

L'employeur du journaliste s'est aussi réjoui. "Enfin! il va être libre", a indiqué le journal sur son site.

Le bureau du procureur général d'Istanbul a officialisé vendredi, en parallèle à la remise en liberté, son acte d'accusation à l'encontre du journaliste. Il réclame entre quatre et 18 ans de prison contre M. Yücel, accusé de "propagande pour le compte d'une organisation terroriste" et d'"incitation à la haine".

Toutefois, selon Berlin, il est peu probable que le journaliste passe un jour en procès.

"Nous avons à présent une décision du tribunal turc qui remet en liberté Deniz Yücel sans restrictions, je pars du principe que cela va signifier qu'il va quitter le pays", a ainsi souligné le chef de la diplomatie allemande.

En décembre, la journaliste et traductrice allemande Mesale Tolu avait, elle, été remise en liberté après huit mois passés en prison, une mesure assortie néanmoins d'une interdiction de sortie du territoire.

L'annonce de la libération intervient au lendemain d'un entretien à Berlin entre Angela Merkel et le Premier ministre turc Binali Yildirim, au cours duquel la chancelière allemande avait accru la pression sur ce dossier.

"J'ai souligné pour la énième fois le caractère urgent de ce cas" qui a "terni nos relations et continue à le faire", avait dit Angela Merkel.

Le journaliste avait été arrêté en février 2017 dans le cadre des purges en Turquie qui ont suivi le putsch manqué contre le président Recep Tayyip Erdogan en juillet 2016.

Sa remise en liberté, après celle d'autres journalistes militants des droits de l'homme germano-turcs ou allemands devrait contribuer à détendre les relations entre les deux pays.

- 'Nazisme' -

Elles ont connu une phase de brouille inédite pendant un an et demi, liée principalement aux critiques de Berlin contre les dérives autoritaires en Turquie et aux accusations d'Ankara en retour de laxisme des autorités allemandes à l'égard des Kurdes installés sur son territoire.

Les tensions ont atteint leur pic l'an dernier lorsque le chef de l'Etat turc Recep Tayyip Erdogan est allé jusqu'à accuser les dirigeants allemands de pratiques dignes du "nazisme".

Les médias allemands se sont interrogés sur l'existence d'une possible "monnaie d'échange" payée par Berlin pour des remises en liberté de ses ressortissants ou bi-nationaux sous forme de livraisons d'armes à la Turquie.

"Je peux exclure qu'il y ait eu un quelconque deal" à propos du journaliste de Die Welt, a assuré vendredi un porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Rainer Breul.

Les relations ne vont pour autant pas passer immédiatement au beau fixe. Le sort de Deniz Yücel ne constituait "pas le seul sujet de dissonance", a prévenu le porte-parole, en référence aux restrictions à l'Etat de droit en Turquie.

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