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Derrière Huawei, la peur américaine de l'espionnage chinois

L'arrestation au Canada d'une dirigeante du géant des télécoms Huawei, à la demande des Etats-Unis, illustre les inquiétudes de Washington sur les liens entre les entreprises technologiques chinoises et le gouvernement de Pékin, sur fond d'accusations d'espionnage.

Meng Wanzhou, directrice financière du numéro deux mondial des smartphones et géant des équipements télécoms, a été arrêtée le 1er décembre à Vancouver, où elle se trouvait jeudi sous écrou extraditionnel vers les Etats-Unis.

La justice y soupçonne notamment Huawei d'avoir violé le régime de sanctions contre l'Iran en y exportant des produits d'origine américaine.

En avril, Washington avait déjà interdit de vendre des puces américaines à un autre géant chinois, ZTE, accusé d'avoir violé des embargos contre l'Iran et la Corée du Nord. ZTE avait finalement payé une amende d'un milliard de dollars.

Cette arrestation est intervenue le jour où, à Buenos Aires, les présidents américain Donald Trump et chinois Xi Jinping décrétaient une trêve dans leur guerre commerciale.

"C'est selon moi une provocation américaine à l'égard de la Chine", estime David Fidler, professeur à l'Université de l'Indiana et spécialiste de la sécurité informatique pour le groupe de réflexion Council on Foreign Relations.

Au-delà des sanctions, le groupe de téléphonie est soupçonné d'être un agent sous couverture du pouvoir chinois qui aurait rompu un pacte de non-espionnage économique signé avec l'ex-président américain Barack Obama.

La société chinoise est sous surveillance depuis longtemps et plusieurs de ses tentatives d'entrer sur le marché américain des télécoms ont échoué depuis 2007.

Une loi fédérale interdit aux responsables gouvernementaux et militaires d'utiliser des appareils construits par Huawei et ses liens supposés avec le Parti communiste chinois sont souvent mis en avant.

"C'est clair depuis un certain temps qu'Huawei, comme ZTE, est une menace pour notre sécurité nationale", a déclaré l'élu démocrate Mark Warner, vice-président de la commission du Sénat sur le renseignement

Le fondateur du groupe, Ren Zhengfei est en effet un ex-ingénieur de l'armée .

"Huawei agit comme une branche du renseignement chinois, il est soutenu par le gouvernement chinois à cause du renseignement", assure James Lewis, du Center for Strategic and International Studies.

Preuve de ces inquiétudes, les responsables américains en visite en Chine sont avisés de ne pas utiliser leurs portables ou ordinateurs américains et de ne pas ramener d'appareils électroniques fournis sur place.

- Inculpations pour espionnage économique -

Washington a également lancé une vaste campagne auprès de pays alliés pour dissuader leurs entreprises de téléphonie mobile et d'accès à internet d'utiliser les équipements du groupe chinois qui pourraient donner à Pékin un accès à des informations sensibles, selon la presse américaine.

La mise en garde, visant les réseaux 5G qui vont décupler les accès mobiles et ultra-rapides à internet et connecter d'innombrables objets du quotidien, a été suivie par le Royaume-Uni, l'Australie et la Nouvelle-Zélande, membres de l'alliance des services de renseignement dite "Five Eyes" avec les Etats-Unis et le Canada.

Ces restrictions ont un impact sur Huawei et les autres fabricants qui sont "dépendants de la technologie américaine et ne pourraient pas développer la 5G sans Intel ou d'autres fabricants (américains) de micro-processeurs", souligne M. Lewis.

Huawei a toujours assuré de son indépendance et affirmé qu'elle n'avait jamais utilisé ses équipements pour espionner ou saboter les communications dans les pays où ils sont utilisés.

Outre Huawei, d'autres sociétés chinoises ou leurs filiales asiatiques sont accusées d'espionnage économique par la justice américaine.

Pékin aurait ainsi volé certains secrets industriels du groupe industriel Micron Technologies, quatrième fabricant mondial de semi-conducteurs.

Fin octobre, dix ressortissants chinois ont été inculpés pour espionnage économique contre des sociétés aéronautiques française et américaines.

Plus tôt, un espion chinois présumé a été extradé de Belgique où il avait été arrêté, accusé d'avoir cherché à obtenir des informations sur plusieurs compagnies aéronautiques, dont General Electric Aviation.

Un autre avait été inculpé en septembre aux Etats-Unis, accusé d'avoir collecté des renseignements sur des scientifiques et ingénieurs travaillant dans le secteur de la Défense.

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