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Diplomate aguerri, Richardson prévient Trump: Pyongyang "n'est pas de la téléréalité"

De Saddam Hussein à la junte birmane en passant par l'ancien dirigeant nord-coréen Kim Jong Il, c'est fort de son expérience de négociateur avec de nombreux dirigeants honnis que l'ancien ambassadeur américain auprès des Nations unies, Bill Richardson, a un conseil simple pour Donald Trump.

S'il est "audacieux" d'accepter de rencontrer Kim Jong Un, l'homme fort de Pyongyang, la diplomatie "n'est pas de la téléréalité: entourez-vous d'une bonne équipe et suivez une solide stratégie".

Il s'est entretenu avec l'AFP depuis son domicile au Nouveau-Mexique (sud-ouest).

- Que penser d'un sommet Kim-Trump?

"J'ai été extrêmement surpris. C'est un pari énorme, un grand risque, mais qui mérite d'être pris (...). Les choses ne pourraient pas être pires qu'en ce moment en ce qui concerne les relations et les tensions sur la péninsule coréenne", souligne l'ex-ambassadeur à l'ONU sous la présidence du démocrate Bill Clinton.

"C'est une véritable opportunité (...) Je m'inquiète du manque de préparation et de discipline du président. Mais je le félicite pour l'initiative très audacieuse d'avoir accepté cette invitation".

"Mais on n'est pas dans +The Apprentice+ ou une émission de téléréalité", poursuit-il à l'adresse du président américain, ancien animateur de cette émission de télévision. "Il s'agit d'une négociation avec un dirigeant imprévisible qui a au moins 20 armes nucléaires et menace les Etats-Unis".

- Quel accord possible?

La perspective de cette rencontre au sommet entre les deux dirigeants "est vraiment inhabituelle en diplomatie. Les choses se passent d'ordinaire du bas vers le haut", analyse Bill Richardson.

"Notre objectif devrait être la dénucléarisation mais je ne crois pas que ce soit réaliste. Il faudrait pousser extrêmement fort pour freiner et geler les forces nucléaire, balistique et conventionnelle de la Corée du Nord".

Selon le diplomate, un "signe de bonne volonté" de Pyongyang pourrait passer par rapatrier les trois prisonniers américains détenus par le régime et rendre à Washington les dépouilles de soldats américains tués pendant la guerre de Corée.

"Nous devrions admettre que la Corée du Nord va demander quelque chose en échange", souligne-t-il cependant.

- Peut-on se fier à Kim?

Agé de 34 ans, Kim Jong Un est "imprévisible, parfois irrationnel. Mais il a été sous-estimé", affirme Bill Richardson.

"Je pense depuis longtemps qu'il a un plan, une vision finale et il est évident que c'est le cas. Il a évolué, passant d'un dirigeant qui lance des bombes à un homme doté d'une vision stratégique. Il a plutôt réussi dans sa reprise de la diplomatie avec la Corée du Sud aux jeux Olympiques", poursuit-il.

Les Nord-Coréens "ont toujours voulu un accord avec les Etats-Unis. Cette demande d'un sommet entre dans le cadre des efforts de la Corée du Nord pour pouvoir dire +nous sommes des acteurs de premier rang et vous devez composer avec nous+".

Cependant, ajoute M. Richardson, "nous devrions nous assurer que nous ne tombons pas dans un piège tendu par les Nord-Coréens qui sont très bons dans l'art de négocier des accords avant de se retirer".

- Trump peut-il réussir?

La principale inquiétude de Bill Richardson, c'est que Donald Trump ait accepté la rencontre "au débotté".

"Il faut qu'il aie une stratégie et je m'inquiète du fait que l'agitation à la Maison Blanche en plus de son propre style ne suffisent pas (...) Il ne peut pas continuer de foncer tête baissée, à tweeter".

"Le secrétaire d'Etat (Rex Tillerson) doit mener ces discussions. Il devrait y avoir une représentation militaire. Le président doit rassembler une équipe et suivre une stratégie cohérente (...) On n'est pas dans une émission de téléréalité mais dans une négociation majeure sur la crise actuelle de sécurité nationale la plus brûlante au monde".

"La chose la plus intelligente que le président puisse faire, c'est d'appeler le président Bush et le président Clinton, et les consulter sur leur expertise. Il ne devrait pas le faire seul".

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