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Duque, dauphin d'Uribe qui mène la retour de la droite dure en Colombie

Il pourrait devenir le plus jeune président de la Colombie moderne. Mais Ivan Duque apparaît surtout comme le protégé de l'ex-président Alvaro Uribe, pour rendre le pouvoir à la droite opposée à l'accord de paix avec l'ex-guérilla Farc.

Affable, tout en rondeurs, ce récent sénateur de 41 ans est arrivé en tête du premier tour de l'élection présidentielle dimanche, mais sans dépasser les 50% qui lui auraient permis de l'emporter comme son mentor par le passé.

Le second tour du 17 juin l'opposera à Gustavo Petro, ex-rebelle du M-19 dissout et candidat de gauche anti-système.

Avocat diplômé en économie, Duque représente cette moitié de la Colombie "indignée" par les "concessions" à la rébellion, en échange de sa reconversion à la politique après plus de 50 ans de guerre.

Pour cela, il promet d'effectuer des "modifications structurelles" à l'accord de 2016 qui a permis le désarmement de 7.000 guérilleros.

Nous voulons que "ceux qui ont commis des crimes contre l'Humanité reçoivent des sanctions proportionnelles, incompatibles avec la représentation politique", a-t-il dit à l'AFP.

Le pacte prévoit des peines alternatives à la prison pour les ex-chefs guérilleros s'ils avouent leurs crimes et dédommagent les victimes d'un conflit, qui a impliqué guérillas, paramilitaires d'extrême-droite et forces armées, faisant au total plus de huit millions de morts, disparus et déplacés.

- Dauphin ou marionnette d'Uribe? -

Duque, qui qualifie le président vénézuélien Nicolas Maduro de "dictateur" et "génocidaire", est aussi le porte-parole des Colombiens qui craignent que le pays suive la pente du voisin en faillite.

Il est surtout la preuve que les idées du controversé mais populaire Uribe - secteur privé, valeurs traditionnelles et main de fer contre les guérillas - font toujours recette huit ans après son départ de la présidence.

Au sein de son parti, le Centre démocratique, certains affirment que Duque doit tout à son mentor; l'opposition lui reproche d'en être la "marionnette".

"Personne encore ne sait s'il a des critères propres ou s'il va obéir aux ordres", estime l'analyste Fabian Acuña, professeur de l'Université Javeriana.

Son premier mandat ne date que de quatre ans. Mais "il a la politique dans le sang depuis tout gosse", dit José Obdulio Gaviria, un des idéologues de l'uribisme.

Né à Bogota le 1er août 1976, il a appris de son père, Ivan Duque Escobar, un libéral à la longue carrière. Mais c'est Juan Manuel Santos, alors ministre, qui l'a initié dans les années 90 comme conseiller aux Finances. Puis il a travaillé près de treize ans à la Banque interaméricaine de développement (BID). Aujourd'hui, c'est un opposant au président sortant.

"Il est très dynamique dans ses relations publiques, très habile", a déclaré à l'AFP une source qui a travaillé avec lui à la BID.

- "Un bon petit gars" -

Aux États-Unis, il rencontre Uribe qui l'inclut dans sa liste pour le Sénat aux législatives de 2014.

"Ivan est très intelligent et je suis sûr qu'il a devant lui un avenir brillant", a écrit Uribe dans son livre "No hay causa perdida" (Il n'y a pas de cause perdue, 2012).

Ses collègues du Congrès saluent son sens des responsabilités. En quatre ans, il a promu quatre lois, la plus notable sur la liberté d'entreprise et l'économie de l'innovation.

Mais "un président doit avoir expérience, autonomie, capacité politique propre, tout se dont manque Ivan, qui est, comme tout le monde l'admet, un bon petit gars", ajoute Roy Barreras, sénateur de la majorité présidentielle.

Son image joviale, la plupart du temps sans cravate et en jean, contraste avec ses idées conservatrices: il est contre le mariage homosexuel, l'euthanasie et la dépénalisation de la drogue. Des secteurs de l'ultra-droite et des évangélistes l'appuient.

Marié et père de trois enfants, c'est un mélomane qui, plus jeune, jouait de la basse et chantait dans un groupe rock. Aujourd'hui, il taquine encore la guitare et aime danser la salsa. Enfant, il rêvait d'être footballeur.

Magicien à ses heures, l'un de ses tours les plus réussis sera d'être le plus jeune chef de l’État colombien, après le libéral Eustorgio Salgar (1870-1972), qui avait 39 ans.

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