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Elizabeth Warren à l'assaut des milliardaires, un pari risqué

Elizabeth Warren, dans le peloton de tête des candidats démocrates à la présidentielle américaine de 2020, a intensifié cette semaine ses attaques contre les milliardaires, un thème cher à ses partisans mais qui pourrait l'handicaper dans sa quête d'un soutien plus large.

La sénatrice du Massachusetts de 70 ans a notamment introduit jeudi sur CNBC, une chaîne financière où elle est souvent critiquée, une publicité montrant hommes d'affaires, banquiers et entrepreneurs prédisant l'apocalypse si la candidate accédait à la Maison Blanche et appliquait ses taxes sur les plus grandes fortunes américaines.

"La diffamation des milliardaires n'a pour moi aucun sens. C'est n'importe quoi", voit-on par exemple s'émouvoir le gestionnaire de fonds Leon Cooperman, l'une des têtes de Turc d'Elizabeth Warren.

En contrepoint, un message apparaît pour rappeler les accusations de délit d'initié ayant visé M. Cooperman.

Devant une foule acquise à sa cause, la sénatrice du Massachusetts apparaît à la fin du spot, enjoignant les plus fortunés à contribuer davantage pour réduire les inégalités.

Ce clip marque une nouvelle étape dans la stratégie d'Elizabeth Warren, qui a fait des attaques contre les milliardaires un point clé de sa campagne.

- "Un coup de pub" -

"C'est avant tout un coup de pub. Elle montre qu'elle tient le discours le plus intransigeant quand il s'agit de s'attaquer aux milliardaires et de défendre les classes populaires", avance l'analyste politique Capri Cafaro, professeure à l'American University à Washington et ancienne élue démocrate.

Dans sa bataille, Elizabeth Warren manie souvent ironie et dérision.

Quand Leon Cooperman s'est offusqué des méthodes "scandaleuses" de la pourfendeuse de Wall Street, le compte de la campagne de la sénatrice a tweeté "OK milliardaire", en référence à l'expression "OK boomer" (littéralement, "cause toujours, baby-boomer") devenue virale chez les jeunes Américains pour exprimer leur frustration face aux anciennes générations.

Pour répliquer à Bill Gates, qui semblait s'inquiéter des taxes qu'il paierait si la sénatrice remportait la présidentielle, l'équipe de la candidate a aussi mis en ligne une "calculatrice pour milliardaires", censée permettre de calculer leurs impôts en cas de présidence Warren.

Le site inclut une ligne pour le co-fondateur de Microsoft, affichant directement sa fortune, soit 107 milliards de dollars, mais aussi pour Leon Cooperman et l'ex-maire de New York Michael Bloomberg, qui songe à se lancer dans la course démocrate à la présidentielle.

- "Larmes de milliardaire" -

Sur son site, Elizabeth Warren propose également des produits surfant sur le rejet des ultra-riches, comme un "mug" avec l'inscription moqueuse "Larmes de milliardaire" ou des badges avec deux pièces de 1 cent, en référence à son projet de taxe de 2% sur les patrimoines supérieurs à 50 millions de dollars.

Outre Leon Cooperman, toujours prompt à réagir aux piques de sa bête noire, d'autres milliardaires se sont rebiffés.

Visé dans la publicité diffusée sur CNBC, Lloyd Blankfein, ancien patron de Goldman Sachs, s'est dit étonné, se demandant si "l'esprit de clan n'était pas dans l'ADN" d'Elizabeth Warren.

Jamie Dimon, PDG de JPMorgan Chase, a lui regretté qu'elle "vilipende" les personnes ayant réussi, plutôt que de les applaudir.

Quant à Mark Cuban, le propriétaire de l'équipe de NBA des Dallas Mavericks, il a accusé la sénatrice de tromper les Américains avec des propositions qu'il juge vouées à l'échec.

Cette stratégie peut-elle payer? Après avoir rivalisé dans quelques sondages avec l'ex-vice-président Joe Biden, avec plus de 20% des intentions de vote aux primaires, un sondage Ipsos publié vendredi par Reuters la donnait en baisse, à 13%, derrière Joe Biden et Bernie Sanders à 19%.

Selon Mme Cafaro, certains électeurs, déjà dubitatifs face aux propositions de la sénatrice, pourraient être rebutés par ce qu'ils pourraient considérer comme un regain d'agressivité contre les plus riches.

"Mais pour ceux qui estiment que les milliardaires doivent payer leur part, cela va rendre sa candidature encore plus attractive", nuance l'analyste.

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