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Embuscade meurtrière au Niger: le Pentagone admet des erreurs

Manque de préparation, supervision insuffisante: une enquête du Pentagone a conclu jeudi qu'une succession d'erreurs était à l'origine de la mort de soldats américains lors d'une embuscade au Niger en octobre 2017.

Quatre Américains et quatre Nigériens ont été tués lorsqu'une patrouille conjointe de reconnaissance est tombée dans une embuscade à proximité du village de Tongo Tongo, à une centaine de kilomètres de Niamey, près de la frontière avec le Mali.

Les soldats ont été attaqués par des combattants affiliés au groupe Etat islamique (EI) équipés d'armes automatiques, de grenades et de mitrailleuses. Selon le Pentagone, les militaires n'avaient pas suffisamment préparé cette mission qui n'aurait pas dû être approuvée en l'état.

Le rapport de huit pages rendu public, un condensé de l'enquête restée confidentielle, conclut à une combinaison "d'erreurs et faiblesses individuelles, organisationnelles et institutionnelles".

Les militaires étaient arrivés à l'automne au Niger pour former l'armée nigérienne et lui fournir une assistance dans la lutte antiterroriste. Mais au moment du déploiement, seule la moitié de l'unité avait eu un entraînement collectif, note le Pentagone.

La mission d'octobre était de "trouver/surveiller et si possible, capturer" un responsable --non identifié par le Pentagone-- du groupe jihadiste autoproclamé "Etat islamique dans le Grand Sahara" (EIGS), dirigé par Adnan Abou Walid Sahraoui.

Des responsables ont précisé plus tard que la cible était Doundoun Cheffou, soupçonné d'être impliqué dans l'enlèvement de l'humanitaire américain Jeffery Woodke en octobre 2016 dans la région de Tahoua (centre). Le sort de l'otage est toujours inconnu.

Mais, selon l'enquête, le chef de patrouille a "défini de manière inexacte" la nature de cette mission pour qu'elle soit approuvée au niveau local, alors qu'elle aurait dû recevoir le feu vert au niveau du chef de bataillon, basé au Tchad.

- Intervention française -

La description de la mission était un copier-coller d'une mission précédente, ce qu'un "manque d'attention dans les détails" n'a pas détecté.

Tous ces éléments "ont contribué à un manque général de prise de conscience de la situation et de supervision de la part du commandement à tous les échelons".

De plus, l'unité n'a pas fait de répétition ni de simulation de combat avec la patrouille nigérienne avant le départ.

Le général Thomas Waldhauser, patron du commandement américain pour l'Afrique (AFRICOM), a affirmé lors d'une conférence de presse que l'armée était désormais "beaucoup plus prudente" lors des missions, pour lesquelles les militaires sont mieux équipés et bénéficient d'un soutien aérien renforcé.

Le Pentagone a aussi diffusé une reconstitution en images de synthèse des dix premières minutes de l'attaque, alors que le convoi quittait Tongo Tongo.

Les militaires ne portaient pas de gilet pare-balles et ont dû stopper les véhicules pour les mettre.

Le feu ennemi s'est rapidement intensifié alors que les assaillants sortaient d'une zone boisée. L'un des véhicules a été isolé des autres et entouré par les jihadistes.

L'intervention d'avions de chasse de l'armée française, qui ont survolé la zone à basse altitude dans une "démonstration de force", a forcé les assaillants à battre en retraite.

Si les chasseurs n'ont pas engagé le combat car ils n'avaient pas la position des Américains, ces rase-mottes "ont sûrement sauvé la vie des membres survivants" de la patrouille, souligne le Pentagone.

Les avions français "ont éloigné les jihadistes" qui avaient rassemblé les corps de trois des militaires tués, a souligné jeudi le général Roger Cloutier, chef d'état-major de l'AFRICOM, qui a dirigé l'enquête.

Celui du sergent La David Johnson, qui avait été séparé du groupe pendant l'attaque et qui s'était mis à couvert sous un gros arbre, avait été retrouvé 48 heures plus tard.

Sa mort avait provoqué une polémique à cause de commentaires attribués au président Donald Trump par la veuve du militaire lors d'une conversation téléphonique. "Je l'ai entendu dire +Je suis sûr qu'il savait ce pour quoi il s'engageait+", a-t-elle affirmé.

Les Etats-Unis ont quelque 6.000 militaires déployés en Afrique, des forces spéciales pour la plupart, en parallèle de celles du G5 Sahel (Mali, Niger, Mauritanie, Tchad et Burkina Faso). Portée par la France, cette force régionale lutte contre les groupes jihadistes ayant multiplié les attaques au Mali, au Burkina Faso et au Niger depuis 2015.

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